L'auteur est accuse d'avoir participe a une emeute lors du Carnaval contre le capitalisme du 20 avril 2001 dans le cadre du Sommet des Ameriques a Quebec. Il se represente lui-meme devant un jury. Ceci est le compte-rendu du premier jour du proces.
05 Septembre 2003
Il fallait choisir 12 jures parmis les 150 candidats qui avaient ete appeles (!); la defense et la poursuite avaient chacun 4 candidats qu’ils pouvaient eliminer. La selection du jury s’est faite le matin et je n etais pas tres reveille… Le jury est donc compose d une proprietaire d entreprise qui dit qu elle ne peut etre impartiale a cause des medias (ca commence bien…), un gars qui travaille pour une compagnie d assurance, une femme au foyer, une infirmiere, deux informaticiens, un prof de maths, une sans-emploi, une couturiere, une femme qui travaille pour le Centre de recouvrement du ministere de la securite sociale, un menuisier qui a des collegues policiers (?) et une autre personne.
Le juge Grenier s est ensuite adresse aux 12 jures pour leur dire qu ils devaient mettre de cote leurs prejuges et me considerer comme innocent tant que la poursuite n a pas prouve ma culpabilite hors de tout doute raisonnable. Il leur a rappele que leurs deliberations etaient secretes. Apres ca, le procureur de la couronne, Quitin, a parle du Sommet des Ameriques et dit que la liberte de manifester est protegee uniquement dans le cas de manifs pacifiques. Il a dit que des gens ont profite de l occasion pour manifester de maniere violente et il a dit que je faisais partie de ceux-la. Il a dit que le 20 avril une « manif violente de grande ampleur » a eu lieu et que j y ai participe jusqu a mon arrestation. Il a annonce les cinq temoins policiers.
Le premier de ceux-ci s appelle Charles Lemay et il etait capitaine-adjoint de l unite d urgence Est de la Surete du Quebec (SQ), dont la principale fonction est la repression des manifs et des greves. Lemay etait responsable d une Compagnie qui compte 3 pelotons d une trentaine de policiers chaque et une quinzaine d enqueteurs. Sa compagnie faisait partie du Bataillon Rouge, avec la compagnie de Montreal (unite d urgence Est de la SQ), le Service de Police de la Ville de Quebec (SPVQ) et 5 troupes de la Gendarmerie Royale du Canada (GRC). Le Bataillon Rouge etait le dernier rempart de l Etat (avant l armee) pour intervenir en cas de grabuge dans des manifs. Il y avait aussi des Bataillons d autres couleurs : blanc, jaune, bleu et vert.
Lemay a affirme que dans l annee precedant le Sommet il avait participe a des rencontres de planification avec la GRC et le SPVQ. Il a parle d une formation en controle de foule de 4 mois des policiers de la SQ a St-Jean sur Richelieu. Il a ensuite parle du Sommet des Ameriques et du contexte (« shut down » de l’OMC a Seattle, perimetres de securite a Washington D.C. et Windsor Ontario). Chaque corps de police avait son role a Quebec : la GRC s occupait de la securite des dignitaires et de l interieur du perimetre; la SQ du maintient de l ordre et du trajet entre l aeroport et le perimetre; le SPVQ du controle de foule a Quebec; la police de Ste-Foy de l aeroport et du trajet.
Lemay a affirme que le Parc de l Amerique francaise et le coin des rues Cote-d Abraham et des Aiguillons etaient des endroits qui devaient etre disponibles pour les manifestants pour etre vus des chefs d Etat. Il a explique que les manifestants etaient classes en 3 categories : les pacifiques, dont les droits qui etaient proteges par la Charte; ceux qui font de la desobeissance civile, des actions non-violentes tels des sit-ins sur le trajet; et enfin les manifestants violents qui lancent des projectiles, etc. Lemay a dit qu il faisait du contrôle de foule depuis plusieurs annees et qu il fallait s adapter au degre de violence. Il a explique le « continuum de force » des policiers : d’abord la simple presence; ensuite on demande gentiment aux gens de quitter; apres quoi on pousse « tranquillement »; et si on fait face a une « resistance extreme » ou a de la violence, alors on sort les grands moyens (lacrymogenes, batons, voire meme « armes d impact » si la securite des policiers est en danger). Le SPVQ, la GRC et la SQ avaient de telles « armes d impact », soit des fusils a balles de plastique. Les gens qui tiraient etaient des moniteurs de tirs et « moniteurs en utilisation de la force ».
Lemay a ensuite parle de la journee du 20 avril : la chute du Mur, les projectiles de tous genres, et le « jeu » (dans ses mots) ou les manifestants avancent, puis reculents, puis avancent encore pour lancer des choses, etc. Il dit que cette manifestation etait un « melange » des trois types de manifestants : certains qui lancaient des trucs et la majorite etant des « spectateurs ». Ca a pris environs 365 policiers anti-emeute (sans compter les flics en civil) pour vider le Parc de l Amerique francaise afin de reparer le perimetre.
Apres son temoignage, Lemay a ete soumis a mon contre-interrogatoire, qui a commence ainsi : « Alors M. Lemay, si je comprend bien vous etes un specialiste de la repression politique? » Quintin s est bien sur objecte et le juge a dit que c etait une question d opinion… Lemay a dit entre autres qu il etait present en 1990 a Oka lors de la fusillade avec les Warriors au cours de laquelle un policier de la SQ est mort et de nombreuses autres manifs. Il a dit que cet ete il etait a Montreal pour l’OMC et que c etait la premiere collaboration formelle entre la SQ et le Service de Police de la Ville de Montreal (SPVM).
Lemay a aussi du expliquer au jures ce qu etait le « taser gun » (fusil a chocs electriques) et que les policiers comptaient utiliser cette arme en cas de sit-ins, donc contre des manifestants non-violents. Il a aussi affirme qu il n a pas pris de notes lors des deux rencontres de planification avec la GRC et le SPVQ et qu a sa connaissance, personne n en a pris! Il a affirme qu il ne savait pas combien de policiers en civil etaient presents au Parc de l Amerique francaise et qu il ne savait pas qui etait leur responsable… Il a dit qu il avait remarque des drapeaux rouges, parce qu ils etaient rouges et dans les airs (!?). Il a affirme qu il ne savait pas quels groupes organisaient la manif. Il a aussi reconnu que les balles de plastique pouvaient tuer et qu il y avait des zones ou il ne fallait pas tirer, par exemple dans la gorge… Par contre, Lemay n a pas repondu a savoir si des corps policiers etats-uniens etaient presents lors de la planification, il parait que ce n est pas pertinent. Le juge m a demande si j avais d autres questions, j ai dit que oui, mais qu il ne les trouverais pas pertinentes…
Vint ensuite le tour de Robert Verge qui est depuis 28 ans dans la SQ et qui a du interrompre sa partie de golf pour venir au proces. Pendant le Sommet, Verge etait Sergent-chef du peloton No. 20 de la SQ, un groupe de 33 policiers qui faisait partie du Bataillon Vert dont le mandat etait le maintient de l ordre a l interieur du perimetre. Le 20 avril 2001, Verge et son peloton etaient affectes a la Porte 2 de perimetre sur le Boulvard Rene-Levesque. A 15h20, Verge a fait sortir ses hommes de l autobus scolaire dans lequel ils etaient parce qu il manifestant avait grimpe sur la cloture et que celle-ci avait ete renversee. Avec sa seule vision bionique, il aurait evalue la foule a 3000 manifestants.
Avant que ses flics sortent du bus, la foule etait relativement calme, mais une fois qu ils sont sortis, ils ont commence a recevoir une « pluie de projectiles », surtout des roches. Il dit que son peloton a recu deux cocktails molotov, dont un bien centre qui en a pogne trois flics. Heureusement pour celui dont les flammes lechaient le menton, les lieutenants avaient des extincteurs et l ont eteint. Ces deux de pique n avaient pas recu l ordre de mettre leurs masques a gaz, et ils ont commence a gouter a ceux lances par leurs collegues (meme si Verge pretend que ce sont des lacrymos lances par des manifestants…). Le probleme est que pour mettre leurs masques, ils devaient enlever leurs casques ce qui n etait pas recommande vu les conditions meteo… Le vent etait aussi du cote des manifestants et soufflait le gaz vers les flics et le Sommet!
Verge, qui devait etre distrait, dit avoir recu un gros cailloux sur la tete. Il ne l avait pas vu venir, mais il se doute qu il venait des manifestants. De la meme facon, il n a pas vu une enorme catapulte qui lancait des oursons en peluche vers ses hommes. Pourtant, Verge dit qu il voyait la fin de la foule deux blocs plus loin et qu il observait les manifestants avec des sacs a dos comme de potentielles menaces. Verge, avec ses 27 annees de controle de foule, dont 12 comme chef de peloton, dit que c etait la manif la plus violente de sa carriere.
En contre-interrogatoire, ce petit comique a dit que les manifestants faisaient des signes de « V » avec leurs doigts pour « Victoire ». -Est-ce que « V » peut vouloir dire autre chose? -Je ne sais pas… La journee s est terminee avec Verge qui nous disait que ses hommes et lui avaient ete decontamines apres avoir ete gazes par leurs collegues. Parce que, croyez-le ou non, ca leur pique les yeux a eux aussi car ils sont « aussi des humains »… Je lui ai en effet partage ma compassion en disant qu ils n avaient pas encore invente des gaz qui n affectaient que les manifestants!
La suite de ce cirque : lundi 8 septembre a 9h30 a la salle 4.01 du Palais d Injustice de la ville de Quebec.
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