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L’impuissance d’un médiaAnonyme, Mercredi, Juillet 9, 2003 - 03:35
Olivier D. Asselin
La Presse traite un sujet aux conséquences démocratiques et environnementales élevées comme un petit divertissement passager. Grâce à La Presse, on a eu droit lundi à un compte-rendue détaillé et émouvant de la journée de démolition à Guindonville : « Après que cinq des sept maisonnettes eurent été rasées par de la machinerie lourde, deux spécialistes de l’unité d’urgence de la SQ ont travaillé sur le toit de l’une des maisons pendant plus d’une heure sous les chauds rayons du soleil pour libérer la contestataire Kathy Pitre, qui avait emprisonné son avant-bras droit dans un mousqueton pris dans du ciment coulé dans un baril. Touchant n’est-ce pas ? Personnellement je remettrais une médaille au policier qui a remis la bouteille d’eau à la contestataire avant de la libérer. Tout cet article du quotidien de Power Corporation décrit, oh très objectivement et avec une verve poétique certaine, l’arrestation spectaculaire des citoyens de « Guindonville » en désobéissance civile pacifique. La question est de savoir pourquoi une vingtaine de personnes ont accepté de défier pacifiquement une force policière armée jusqu’aux dents si ce n’était pour avertir la population, par le biais des médias, qu’une aberration éthique se produit dans notre démocratie avec la bénédiction d’élus municipaux cyniques. Dans l’article, un expert municipal assure que tout s’est déroulé dans l’ordre. On a aussi interviewé l’agent Gilles Mitchell des affaires publiques de la SQ qui relate l’événement tel un joueur de hockey et son plan de match : « après qu’une quarantaine de policiers eurent pris position sur le coup de 6h, l’un d’eux a avisé les contestataires à l’aide d’un porte-voix que le tribunal avait prononcé un ordre d’éviction et qu’ils devaient partir. » Mais comment peut-on passer aussi loin d’un sujet d’actualité si révélateur ? Aucune interrogation sur l’acte de démolition de sept maisons habitées pour la « construction » d’un stationnement pour d’éventuels touristes, dans une petite agglomération qui compte des tonnes d’espaces bétonnables. On se permet même de titrer : Les policiers « ont bien agi » sans s’interroger un tant soit peu sur les causes du problème, en l’occurrence l’usurpation municipale d’espaces habités par la population pour qu’un investisseur privé puisse louer des condos de luxe en promettant un beau stationnement. Ainsi ce sera le stationnement de gens de passage qui, eux, ne contribueront aucunement à la vie communautaire de la ville sinon en enrichissant les puissants promoteurs étrangers, après que ceux-ci auront transformé la région en un gros village Playmobile inaccessible aux pauvres –comme au Mt Tremblant où la nature est désormais contrôlée, aseptisé et exploitée comme il faut. « La nacelle sur les lieux n’étant pas assez haute pour aller la rejoindre (la manifestante) il a fallu faire venir celle du Service des incendies de Mont-Tremblant. Un pompier et un policier sont montés, ont coupé la branche qui retenait le cadenas et ont placé Julie à leurs côtés dans la nacelle. Il était 11h35, l’opération policière était terminée. » Wow ! heureusement qu’on a su que la première nacelle n’était pas assez haute… Aussi, on a interviewé des sommités tel André Berthelet, un ex-conseiller municipal de Montréal qui prétend que la démolition des maisons était essentielle avant de détourner le sujet vers une idiotie surprenante : « Il y avait trois sites pour l’aménagement du stationnement et, pour diverses raisons, les deux autres ont été abandonnés. J’espère maintenant que le maire va tenir sa promesse de ne pas asphalter cet espace. » Que La Presse ait une ligne éditoriale de droite est une chose. Mais qu’on ait le culot de présenter à la Une de cette feuille de chou un tableau aussi pathétique que superficiel d’une situation sociale où une municipalité chasse sciemment ses citoyens, frise la malhonnêteté intellectuelle. Merci à Guindonville et au courage de ses militants.
Site de Guindonville
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