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L'ÉQUIPE DE PAIX POUR L'IRAK: Rapports

Anonyme, Mercredi, Avril 2, 2003 - 22:32

Robert Turcotte

Journaux intimes d'un Québécois en Irak

28 mars 2003

La réunion de ce matin ne nous apporte pas de nouvelles très reluisantes. Dès le départ, notre représentant du gouvernement nous annonce que dorénavant nous ne pourrons plus sortir après 18h sans permission spéciale et sans escorte sinon nous serons immédiatement arrêté et conduit à la frontière. Nous avons l'autorisation de se déplacer entre les deux hôtels voisins entre 18h et 22h, maximum.

Les quelques réfugiés qui étaient dans les camps reviennent pour se battre. Ils ne peuvent accepter les conditions offertes et surtout les tueries de civils.

Basrah, une ville du sud qui compte 6 millions d'habitants, n'a plus d'électricité ni d'eau potable. L'aéroport est aux mains de Américains mais la ville est loin de l'être puisqu'une forte résistance serait en place.

La fenêtre de la maison de notre représentant du gouvernement ont volées en éclats à 7h ce matin alors qu'il se lavait. Trois centres de communications ont été détruits hier soir et cette nuit. Ça veut dire plus de téléphone ni d'internet. Allo le monde, ça ne va plus ! Je ne sais pas quand ce sera possible d'entendre vos voix ou de vous lire; Pour bientôt j'espère. Zéhira, Jooneed et Mickel sont allés visiter les sites des centres de communications où plusieurs personnes seraient décédées et d'autres blessées. Le décompte n'est pas terminé car on recherche encore des victimes sous les débris. Il n'y aura plus rien à faire avec ces édifices.

Douglas, Charles, Ha Yoo et moi sommes partis pour documenter un autre site bombardé le 25 mars à 12h30. Deux maisons entièrement détruites et trois autres extrêmement endommagées, dans le quartier résidentiel Ragi Baa à Khatoon-Al-Athenia, une ville de banlieue. Six personnes décédées et 20 blessées qui furent conduit à l'hôpital Al Nooman. Mohammed Al Khateed, frère de Achmed Al Khateed le propriétaire du numéro civique 13 de la rue no.5 du secteur 320, nous raconte que le missile est tombé sur la maison de son frère dans laquelle 3 personnes sont décédées. Kassem Talib nous montre les dégâts causés au 14/7/320 où une personne a été blessée. Nous observons plusieurs morceaux de missiles trouvés dans les décombres. Au moment où nous entendons une détonation tous les petits enfants présents à notre visite ont fui à toute vitesse vers leurs demeures. Des gens essaient de retrouver quelques effets personnels à travers cet amas de pierres. L'auto du proprio n'est plus qu'un tas de ferraille. (....) Lâchez pas le combat pour la PAIX ! À suivre

27 mars 2003

Martin, Zéhira, Sang Jin et moi partons avec notre chauffeur Omar pour aller documenter le secteur commercial du district de Al-Shaab, sur la rue Abitalib. Des gens racontent avoir vu une longue tracée blanche dans le ciel puis deux missiles explosés avec 5 secondes d'intervalle entre chacun. Environ une trentaine de commerces au rez-de-chaussée avec deux étages de logements au dessus et une quinzaine de voitures ont été bombardés hier à 11h30. Jusqu'à présent on dénombre 25 morts et 45 blessés, tous des civils. Le propriétaire du restaurant Edilime, Imad Aisa Ali, a perdu 3 employés, Abou Hassan, 45 ans, père de 5 enfants, Sabah Noury, 28 ans, Malikt Hanoud, 17 ans et 2 clients sont morts aussi. Le chauffeur d'une voiture a été tué et deux jeunes garçons grièvement blessés, Safa Isam, 17 ans et Marouan 12 ans. Le fait qui revient le plus souvent parmi les personnes interrogées est ce bébé qui fut éjecté d'un logement, la tête sectionnée du corps et qui a monté très haut dans les airs. Rahee Sabeer, étudiant au nursing collège, me raconte avec beaucoup d'émotions l'horrible scène que nous avons sous les yeux; L'étendu des dégâts causés aux édifices, les voitures complètement décomposés, le cratère causé par un missile, les objets éparpillés partout et le sang séché sur des murs qui témoigne de la perte de vies humaines.

Nous quittons ce secteur dévasté pour se rendre dans le distrit Al Tijjar où la maison de la famille Muheed a subit d'important dégâts et fait 3 blessés graves dont un jeune garçon de 6 ans, Ccasar. L'école secondaire pour jeune fille située de l'autre côté d'un mur qui longe la maison a été bombardée par les pierres de la maison qui volaient de partout. Les fenêtres ont volé en éclats ainsi que toutes celles de 9 maisons des alentours.

Je commence à croire que la déception des ricains de ne pouvoir atteindre leurs objectifs les poussent à se venger sur la population civile car depuis quelques jours le nombre de crime de guerre ne fait qu'augmenter. Ils n'aident pas leur cause en tuant des civils car ils ne font qu'augmenter la rage parmi la population qui ne voulait pas participer à cette guerre. S'ils n'arrêtent pas bientôt ils auront les 27 millions d'habitants sur le dos qui seront prêt à mourir pour sauver leur peau. Il est urgent que toute la population internationale trouve un moyen pour les arrêter avant que l'on assiste à un génocide d'une ampleur dont on ne peut s'imaginer

Je termine mes visites du jour chez madame Amal, une amie de IPT qui a reçu plusieurs délégations chez elle dans sa luxueuse demeure d'une quinzaine de pièces avec un grand jardin sur le bord du fleuve. Toutes ses fenêtres et baie vitrées ont volé en éclats et plusieurs de ses beaux tableaux se sont décroché des murs pour se briser sur le plancher. La tempête d'hier n'a pas arrangé les choses avec tout le sables qui été soufflé dans la maison. J'ai un peu plus de difficultés à m'apitoyer sur son sort après les visites précédentes mais, elle est tout de même une victime que je respecte. Elle nous invite à prendre le thé chez sa famille d'accueil. M. Qusay Akram Jabbar en profite pour faire une leçon d'histoire et de morale à Martin d'origine américaine. Il trouve inacceptable cette conquête du monde entrepris par les Américains, il la compare à Albert Le Grand qui avait voulu faire la même chose.

Les bombardements qui avaient été ralentis avec la tempête reprennent de plus belle ce soir. À deux reprises pendant que j'écrivais ces lignes j'ai levé de ma chaise tellement ils étaient de fortes intensités.

Aucun appel des médias cette nuit, une première depuis que je suis ici.

26 mars 2003

Le décor extérieur est très étrange ce matin. L'atmosphère, le sol, les arbres, les bâtiments, les voitures, tout est brun autour de nous. Un vent de forte intensité transporte du sable et une pluie fine qui se collent au moindre contact. Notre chauffeur qui nous conduit vers un autre site m'informe qu'il n'a pas vu ce phénomène depuis six ans et que c'est extrêmement râre. Selon lui, le déplacement des tanks et des hélicoptères dans et au-dessus du désert soulèverait le sable dans les airs et le vent le transporte jusqu'à nous; explication logique ! Sur le bord d'une rue nous apercevons un homme, enveloppé d'un drap blanc sur lequel est écrit NO WAR, qui s'est enchaîné à un arbre. On me dit que c'est un Turque et qu'il est là depuis deux semaines.

Ha Yoo, membre de IPT de Séoul, une photographe de l'Angleterre, Jooneed et moi arrivons dans le quartier résidentiel de Al Qadisiyeh sur un site situé à quatre rues derrière l'hôpital Yarmouk. Cette fois c'est la grosse merde qu se présente à nous. Sept magnifiques maisons, si on se fit au voisinage, presque entièrement détruites sauf une qui laisse un trou béant à sa place. Au centre, le missile a creusé un cratère de huit mètres de profondeur et de quarante-deux mètres de circonférence. Un voisin nous raconte que cinq des maisons étaient vides car les propriétaires ont quitté la ville il y deux semaines et qu'il y avait deux familles pour un total de quatorze personnes dans les deux autres maisons. Les gens présent à notre visite crient au miracle car il n'y a eu que deux victimes avec des blessures relativement mineures. Hashim Abdul Dayem, cousin et neveu des victimes, raconte que sa cousine est étudiante vétérinaire et quelle gardait des lapins derrière la maison pour ses études et que tous sont morts. Son cousin et sa tante sont à l'hôpital Yarmouk et insiste pour que nous allions les visiter, ce que nous feront. Après avoir pris quelques photos nous allons à l'hôpital. Nous rencontrons Hashim Abdul Dayen, 27 ans, étudiant, blessé au pied et à la jambe droite. C'était dimanche à 19h, il était sortit de la maison pour se rendre chez le deuxième voisin alors qu'il a aperçu une grosse lumière rouge et a entendu un bruit puis s'est retrouvé étendu par terre. Abasourdi et réalisant qu'il ne pouvait se porter sur une jambe il s'est traîné par terre pour aller voir l'état de sa mère. Cette dernière, Halima, 66 ans, a eu une coupure sous l'oil droit et un choc nerveux. Il nous remercie de notre visite et accepte que nous le photographions.

Notre chauffeur, escorte et interprète du jour, Talib Aldulaymi, s'exprime en anglais et en français. Un gars très sympathique avec qui j'ai des jases intéressantes et très enrichissantes.

Au retour nous rencontrons sept nouveaux arrivant de l'équipe Christian Peace Team venu se joindre à IPT. Un des gars de Vancouver, Jim Douglas, a participé à une des mes tribunes lors du sommet des Amériques. Il raconte que l'autoroute entre la frontière de Jordanie et Baghdad a été bombardé à plusieurs endroits, ce qui les obligeaient à quitter la route pour pouvoir passer. Ils ont croisé des militaires américains qui les ont insultés et intimidés en montant sur le capot de la voiture.

April nous raconte qu'au moment où elle était dans un hôpital plusieurs blessés sont arrivés dans un autobus. Un autobus de 45 passagers en provenance de la Syrie a d'abord été obligé d'arrêter en vitesse car un missile venait de faire sauter un pont. Au moment où des passagers descendaient de l'autobus pour se mettre en sécurité un autre missile a été lancé direct sur l'autobus, blessant une vingtaine de personnes et tuant huit personnes. Tous des civils irakiens. Un calvaire qui continue.

Rapport 25 mars

Sur le parcours nous pouvoir voir plusieurs édifices gouvernementaux très endommagés et des installations militaires complètement désintégrées. Nous passons à travers des nuages de fumée noire provenant des tranchées de gaz en feu. Nous arrivons dans le district Nhrawane puis atteignons la zone rurale sans apercevoir aucune installation militaire ni d'édifices gouvernementaux. Nous sommes accueillis par le fils de 16 ans de Azmi Abdullah Ammad. Il était à l'extérieur de la maison, à environ 100 mètres, quand le missile est venu s'abattre sur la maison familiale. Ses parents et deux autres familles de sa parenté, résidents de Baghdad venus s'installés ici pour éviter les bombardements, prenaient le thé dans le salon, bien tranquilles. Des onze personnes présentes dans la maison, huit furent grièvement blessées et trois sont mortes. Parmi celles-ci une jeune femme de 16 ans qui s'était marié la semaine dernière. Ces victimes sont celles que nous avons vu arriver hier à l'hôpital Al Kindi. Notre présence attire les fermiers des environs qui en ont gros sur le cour et les mots ne manquent pas pour exprimer leurs rages au point où notre interprète ne fourni pas dans les traductions « Nous étions pour la paix mais cette attaque nous donnera le courage de combattre pour défendre nos frères et sours » « Bush doit payer pour nos morts et nos blessés, c'est un assassin » Nous aurions pu croire qu'ils puissent s'en prendre à nous mais c'est tout le contraire. Ils nous remercient à maintes reprises d'être venu constater leur malheur et d'être ici avec eux.

Plus je découvre ce peuple plus il m'impressionne par son esprit de compréhension, par son respect, par son honnêteté, par sa serviabilité et par l'accueil qu'il nous réserve partout où nous allons.

Robert

[NOTE: Les extraits des journaux intimes des Québécoises et Québécois membres de l'Équipe de Paix pour l'Irak sont aussi sur le site www.nowar-paix.ca/ . Des extraits des journaux intimes des autres membres de l'Équipe de Paix pour l' Irak, des rapp


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Très beau dessin: des oiseaux s'unissent pour couper une cloture de métal, sur fonds bleauté de la ville de Toronto.
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