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Contre-révolution au Venezuela

Dominic Dagenais, Samedi, Avril 13, 2002 - 15:29

Dominic Dagenais

Le renversement du président vénézuélien Hugo Chávez et les dessous du coup d'État militaire.

Dans la nuit du jeudi 11 avril au vendredi 12, le haut commandement militaire vénézuélien annonce la démission du président Hugo Chávez. Les syndicats patronaux, ayant déclenché une grève générale illimitée le mercredi 10 avril, ont raison du président. Cependant, la soit-disant démission du président Chávez ressemble davantage à un coup d’État.
La manifestation du jeudi 11 avril a donné naissance à d’importants affrontements entre, d’une part, les manifestant-e-s (issu-e-s des syndicats patronaux, des syndicats de l’industrie du pétrole et de citoyen-ne-s des quartiers aisés de Caracás) et la police métropolitaine (le maire de Caracás étant de droite) et, d’autre part, l’armée nationale ainsi que des partisan-ne-s de Chávez (pour la plupart issu-e-s des quartiers populaires de Caracás). Ainsi, contrairement à ce que l’on tend à démontrer, les manifestations anti-gouvernementales ne sont pas le résultat d’une opposition populaire à la présidence de Chávez, mais plutôt le fruit d’une contestation grandissante dans les milieux patronaux, de leurs syndicats et des syndicats jaunes de l’industrie pétrolière. Malgré l’importance des manifestations du 11 avril, notons que des milliers de citoyen-ne-s, issu-e-s des quartiers défavorisés ou de la paysannerie ont combattu les contre-révolutionnaires de la droite vénézuélienne. Le renversement de Chávez n’a donc rien de comparable à celui de De La Rua en Argentine, en décembre dernier, où les classes moyennes et populaires sont descendues dans la rue pour réclamer la démission du président.
De plus, contrairement à la version officielle de l’armée qui s’est finalement retournée contre les chávistes (qui est également la version de la plupart des médias), les premières victimes des affrontements du 11 avril se trouvent dans le camp de Chávez. Elles sont tombées sous les balles de la police métropolitaine, aux ordres du maire de Caracás, Aflredo Pena. Ainsi, la raison évoquée par le haut commandement militaire, comme quoi les ordres gouvernementaux de faire feu sur les civil-e-s constituaient la goutte faisant déborder le vase, semble être pur mensonge. L’armée avait probablement prévu son coup bien avant que ne tombent les premières victimes.
La version officielle prétend également que Chávez a donné sa démission au cours de la nuit du 11 au 12. Cependant, c’est le commandant en chef de l’armée de terre, Efrain Vasquez, qui a annoncé la démission du président. Chávez n’a jamais prononcé quoi que ce soit depuis le «revirement» de l’armée, le soir du jeudi 11 avril. Ce qui incite à croire qu’il ne s’agit pas d’une réelle démission. C’est d’ailleurs la thèse qu’affirme Isaias Rodriguéz, le procureur général de la république, qui prétend qu’il s’agit là d’un coup d’État et ajoutant que si le président avait démissionné, ce serait le vice-président, Diosdado Cabello qui lui aurait succédé. La fille de Chávez, Maria Gabriela, depuis La Havane, prétend également que son père n’a jamais démissionné et qu’il est un «président prisonnier». En effet, Chávez est détenu pour une période indéterminée, au Fort Tiuna, la principale base militaire de Caracás.
Aussi, le nouveau président intérimaire, le patron des patrons vénézuélien, Pedro Carmona, appuyé par l’état-major (qui l’a porté au pouvoir), des dizaines de représentant-e-s du patronat, de la hiérarchie catholique, des syndicats et des grands médias, suspend les institutions démocratique dès son entrée au pouvoir le vendredi 12 avril. Il annonce ainsi la dissolution du Parlement et de la Cour suprême. Ce qui démontre encore une fois que le renversement de Chávez n’a rien de populaire et de démocratique.
Chávez, représenté comme un dicateur, avait pourtant été élu démocratiquement en 1998 et réélu en 2000. Jouissant d’un large appui populaire, il souhaitait que la V république vénézuélienne serve les intérêts des défavorisé-e-s, largement majoritaire au pays. C’est ainsi qu’il entreprit de nombreuses réformes socialisantes afin de pallier les inégalités sociales. Chávez, rare président non-Blanc et issu de milieu modeste, jouissait d’une grande popularité au sein des classes ouvrières et paysannes. Il entreprit notamment une importante réforme agraire, au détriment des grands propriétaires terriens qui ont tôt fait d’organiser une opposition au régime. Chávez a également entreprit une réforme de l’industrie pétrolière, principalement revenu du Venezuela. Nationalisant une grande part de l’or noir, il a dû également faire face à une opposition croissante des hauts cadres de l’industrie pétrolifère et aussi des Etats-Unis, principaux acheteurs. Son amitié avec le président cubain Fidel Castro, ses liens avec l’Iraq et la Libye, ainsi que sa neutralité face à la guérilla colombienne ont attisé une opposition grandissante sur la scène internationale. Il a également dénoncé la propagande des mass-médias, opposés à son gouvernement. De plus, faut-il rappeler que lors du Sommet des Amériques à Québec, en avril 2001, Chávez s’était fait le porte-parole des pays pauvres, dénonçant la mauvaise répartition des richesses et l’impérialisme économique des pays du Nord, en l’occurrence le Canada et les Etats-Unis.
C’est par l’ensemble de ses positions politiques, très marquées à gauche, que Chávez a couru à sa perte. Par sa défense des opprimé-e-s, il a dû forcément retirer une partie des privilèges de la classe dominante. Bien qu’il ait défendu les intérêts de la grande majorité de la population vénézuélienne, il n’en reste pas moins que c’est la minorité détenant le pouvoir économique qui possède les moyens de vaincre. D’autant plus que cette minorité fut appuyé par la communauté internationale, Etats-Unis en tête. Faut-il rappeler que l’actuelle crise au Proche-Orient et les conséquences économiques qui s’en suivent, telle l’annonce de la suspension de l’exportation de pétrole de l’Iraq, a possiblement précipité le coup d’État militaire.
Le renversement de Chávez représente la fin d’un espoir, dans un pays si riche en ressources, mais dont la majorité est sous le seuil de pauvreté. C’est également la fin d’une solidarité pour Cuba, qui avait trouvé en Chávez son meilleur allié depuis la chute de l’URSS. Le 12 avril, le directeur du rafinage et de la commercialisation de PDVSA, Edgar Paredes, a annoncé que le Venezuela n’exporterait plus un seul baril de pétrole à Cuba (qui recevait 53 000 barils de pétroles du Venezuela, chaque jour).
La révolution bolivarienne est maintenant bel et bien terminée. Le mythe de Chávez dépassera-t-il celui de Simón Bolivar? Quoi qu’il en soit, c’est en attendant le sort de ses bourreaux, que Hugo Chávez croupie sous les verrous, emprisonné pour son humanisme.

Éditorial du journal Le Monde du samedi 13 avril.


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