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Gaétan Breton, un comptable en lutte contre la pauvreté et l'exclusion

jplarche, Lundi, Mars 31, 2003 - 12:22

J-P

Du local au global...
• Le candidat de l'Union des forces progressistes dans Sainte-Marie–Saint-Jacques et ses idées pour faire avancer une collectivité où se concentrent les problématiques sociales.
• Le docteur comptable et la vision économique de l'UFP.

« Plus le temps passe, plus on s'en remet à l'individu qui travaille pour financer l'État au moment où moins d'individus travaillent pour produire plus de richesses. C'est dire qu'une partie toujours plus grande de la richesse échappe à la fiscalité. Il se trouve là tout un potentiel pour récupérer des richesses et les redistribuer. »

Sainte-Marie–Saint-Jacques élit depuis près de vingt ans, les yeux fermés, le candidat péquiste, André Boulerice. De l'avis de plusieurs, le député n'a pourtant pas fait beaucoup pour les gens de la circonscription. Par exemple, celui-ci considère la construction de la Grande bibliothèque près du métro Berri comme l'une de ses plus importantes réalisation du dernier mandat. En effet, c'est sûrement grâce à ses énormes talents de rassembleur qu'on a préféré installer la bibliothèque nationale du Québec au centre-ville de Montréal plutôt que dans celui d'Amos ou de Shipshaw...

Cette année cependant, c'est différent. L'Union des forces progressistes (UFP) présente dans cette circonscription un de ses candidats vedettes. Professeur de comptabilité à l'UQAM, notamment d'éthique en la matière, Gaétan Breton est assez connu à gauche pour ses prises de position en faveur de la propriété collective de l'eau et du caractère public d'Hydro-Québec. Il écrit régulièrement dans l'Autjournal.

À toute vapeur, une équipe de militants s'est formée dans le comté quelques semaines avant le déclenchement des élections pour le faire élire. Les échos des premiers jours de campagne permettent les meilleurs espoirs malgré des moyens modestes par rapport à ceux des trois grands partis. Sainte-Marie–Saint-Jacques fût parmi les premières circonscriptions à appuyer le PQ, alors marginal, dans les années 70 ; pourquoi pas aujourd'hui l'UFP ?

Faire avancer le comté
Localement, Gaétan Breton articule sa campagne autour de quatre grandes thématiques. D'abord la lutte à la pauvreté, très répandue dans le Centre-sud montréalais. Il met en avant les propositions de l'UFP, notamment l'instauration d'un revenu de citoyenneté, c'est-à-dire l'assurance en espèces sonnantes que les individus auront toujours de quoi combler leurs besoins essentiels. Combattre la pauvreté et ses maux, c'est aussi réformer le Code du travail et augmenter le salaire minimum, deux engagements de l'UFP. Gaétan Breton croit qu'en s'attaquant à la pauvreté on pourra progressivement trouver des solutions aux problèmes qu'engendrent la prostitution et la consommation de drogues dans le quartier. Il se dit près des préoccupations des plus pauvres et des exclus de notre société.

Deuxièmement, Gaétan Breton veut qu'on fasse plus de place aux modèles familiaux différents des traditionnels. Clin d'oeil de son crû à une conciliation travail-famille promise en grande pompe par le PQ mais qui restera aux frais des travailleuses et travailleurs, Gaétan Breton souligne que dans Sainte-Marie¬Saint-Jacques il y a beaucoup de familles qui ne sont pas formées d'un papa et d'une maman. Il veut qu'on puisse montrer dans les livres scolaires des modèles familiaux homosexuels ; une éducation de tolérance pour combattre, notamment, le suicide chez les jeunes personnes homosexuelles qui atteint un niveau effarant.

Troisièmement, le candidat reproche au PQ l'ensemble de son approche urbaine. Il souligne le manque de cohérence qui anime les élus lorsque vient le temps de construire une autoroute à la place de la rue Notre-Dame, par exemple. On défigure un quartier et on encourage la pollution atmosphérique alors que le concept de centre-ville devient de plus en plus désuet avec l'arrivée de nouvelles technologie qui favorisent la délocalisation des activités productives et que le transport en commun montréalais reste complètement inadéquat aux exigences d'une métropole.

Enfin, celui qui porte les couleurs rouge et verte met en avant sa ferveur souverainiste tout en marquant sa différence. Au PQ qui branle toujours dans le manche sur « son » option, l'UFP oppose un projet de société solidaire et socialement juste qui nécessite la souveraineté pour se réaliser. Par ailleurs, Gaétan Breton défend une vision plus large de la souveraineté, y incluant le revenu de citoyenneté permettant aux citoyens de pleinement exercer leurs droits démocratiques et le scrutin proportionnel qui favoriserait une meilleure représentation des voix discordantes à l'Assemblée nationale : le mode de scrutin actuel crée des distorsions néfastes dans la représentation faisant en sorte qu'un vote pour un candidat défait ne vaut pas celui en faveur du candidat élu.

Un vent de gauche ?
Comme presque tous les candidats des partis non représentés à l'Assemblée nationale, Gaétan Breton ressort peu dans les médias de masse. N'empêche, il s'agit là d'un candidat sérieux et assurément capable de remplir la fonction de député de Sainte-Marie–Saint-Jacques. Au sein de l'organisation de sa campagne, on compte plusieurs anciens péquistes, des militants des partis fondateurs de l'UFP (PDS, PC et RAP) ainsi que des militants d'organisations diverses qui en sont à leur première implication politique. Le même phénomène s'observe dans plusieurs circonscriptions. Bref, à peine neuf mois après sa création, l'UFP promet de modifier durablement le paysage politique. Qui s'en plaindra ?

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J'ai interrogé le comptable sur la viabilité économique du projet de l'UFP qui a essuyé son lot de critiques depuis le début de la campagne.

Dans son analyse des programmes politiques, la CSN écrit que l'UFP se résume à des voeux pieux et qu'elle ne se soumet à aucun test de faisabilité. En effet, contrairement aux trois partis traditionnels, l'UFP ne présente pas de cadre financier. Qu'en dîtes-vous ?

Si les autres partis se soumettent au test de faisabilité, c'est parce qu'ils partent avec ce qui est déjà en place et qu'ils ajoutent ou retirent telle ou telle mesure. Nous on veut changer radicalement la façon de voir le rôle de l'État et ses sources de revenus. Par exemple, entre 1990 et 1998, le PIB a augmenté d'environ 25 pour cent ; le revenu disponible pour les gens lui a augmenté de la moitié seulement. Ça veut dire quoi ? La population n'a pas augmenté de 25 pour cent. L'emploi non plus. Ça veut dire que de plus en plus de richesse est générée sans qu'il y ait de travail. Elle est générée par les machines qui appartiennent au capital : la rémunération des machines est la rémunération du capital. C'est donc de la richesse qui reste dans l'entreprise et qui va au capital.

Or progressivement, depuis 1950, la fiscalité suit un mouvement inverse. En 50, les revenus au Canada (le processus est similaire au Québec) provenaient à 50 pour cent des entreprises et 50 pour cent des individus. En 93, les individus fournissaient 88 pour cent des revenus de l'État contre 12 pour cent qui provenaient des entreprises. Autrement dit, plus le temps passe, plus on s'en remet à l'individu qui travaille pour financer l'État au moment où moins d'individus travaillent pour produire plus de richesses. C'est dire qu'une partie toujours plus grande de la richesse échappe à la fiscalité. Il se trouve là tout un potentiel pour récupérer des richesses et les redistribuer.

Le début du partage de la richesse consiste à mettre la main sur les gains de la technologie mais souvent les entreprises partent massivement avec ces gains.

Justement, on agite souvent l'épouvantail des entreprises qui déménageront si on les taxe trop lourdement. On brandit la fuite des cerveaux...

D'abord en ce qui concerne la fuite des cerveaux, c'est sûr que lorsqu'on regarde le monde politique on a l'impression que c'est vrai. Parce que ce qui reste collé ce ne sont pas toujours les cerveaux...

Ceci dit, moi je travaille dans une université et lorsqu'on perd des gens, c'est rarement à cause des salaires ni du niveau de taxation. C'est à cause des conditions comme un financement inadéquat de la recherche. Dans les universités, y'a encore des professeurs qui n'ont pas d'ordinateurs en 2003... ils devraient faire quoi ?

Notre fiscalité est pas si déficiente que ça.. On lance toujours des grandes phrases. J'ai vu Bernard Landry inviter Yvon Cyrenne – tu sais le cynique qui est passé à l'ADQ, je dis cynique parce qu'on voit rarement un exploiteur du peuple se montrer aussi cynique – à un Conseil national du Parti québécois pour expliquer aux membres que si on taxait trop les riches ils s'en iraient.... Moi je n'y crois pas du tout mais même si c'était vrai, eh bien qu'ils partent ! Mais, avant de partir, on va faire les comptes... Ces gens-là ont été engraissés et soutenus avec les fonds publics. Alors un moment donné, avant de les laisser partir avec leurs équipement et leurs technologies, faudra faire les comptes, ce qu'on fait jamais dans notre modèle néolibéral.

L'argent qui est donné aux entreprises l'est très facilement et on regarde pas beaucoup ce qui est fait avec. Il va falloir qu'on apprenne à nous organiser. Au Québec, on vit des matières premières, l'industrie de transformation, il n'y en a pas beaucoup. Si on vit de la matière première, c'est parce qu'elle est ici. SI elle est ici, on n'a pas besoin de personne pour l'extraire et vivre avec. C'est quoi l'idée qu'il faut nous mettre la cuillère de purée dans la bouche sinon on va se laisser mourir de faim sur le tas de richesses ?

Donc, cette question de taxation trop lourde c'est un faux problème c'est de la pure idéologie. Puis si ce n'est pas de la pure idéologie eh bien « good bye », on fait les comptes avant de partir par exemple, on ne les laisse pas partir avec le fric.

En matière de gestion de l'économie, le PQ se pète les bretelles, l'économie n'a jamais si bien roulé, jamais autant de Québécois n'ont travaillé comme lundi dernier clame la publicité du PQ. Même les commentateurs et éditorialistes frileux à l'égard du PQ lui accorde une excellente note sur le plan économique. Êtes-vous d'accord ?

Non. Plus de gens qui travaillent que jamais, ça c'est par rapport à ceux qui sont sur le marché du travail. Celles et ceux qui sont tannés et qui n'en sont plus, ils ne comptent pas. D'ailleurs c'est ce qui avait fait perdre Kim Campbell (Parti conservateur fédéral) lorsqu'elle avait lancé en public que pour régler le problème du chômage, il suffisait d'arrêter de compter un grand nombre de chômeurs.

Est-ce que Bernard Landry a amélioré l'économie ? Je ne le sais pas. Pour le savoir il faudrait savoir ce qui serait arrivé si Landry n'avait pas été là... Ce que je sais par exemple, c'est que Bernard Landry a continué dans la lignée néolibérale, qu'il continue dans une idéologie de développement qui ne tient pas compte de l'environnement, qui envoie l'argent aux riches. Il demande aux entreprises de changer les jobs de place et les présente comme des nouvelles jobs. Je pense à la Cité du multimédia qui coûte une fortune pour des emplois qui n'existent pas ou plutôt qui existaient déjà. Alors, il faut se méfier des chiffres de Bernard Landry. D'ailleurs, il s'est toujours fait le promoteur, là-dessus on ne peut l'accuser de changer d'idée, de la mondialisation, de l'ALENA. Il est fidèle à la ligne néolibérale et en ce sens, s'il connaît des succès, ils ne peuvent être qu'à court terme parce que à moyen terme, on ne peut pas continuer comme ça, nous le savons tous !

L'Action démocratique du Québec/Équipe Mario Dumont parle beaucoup du viellissement de la population et de la dette ; son message dit en gros que pour être équitable envers les plus jeunes il faut rembourser la dette du Québec dès maintenant. Qu'en pensez-vous ?

Tous les populistes à commencer par Gilles Proulx par exemple, aiment bien monter une génération contre l'autre, un groupe de pauvres contre un groupe d'un petit peu moins pauvres... Ce qu'il faut voir c'est : est-ce qu'on produit, par vieux, moins de richesse qu'on en produisait avant ? Parce que eux avec leurs calculs de fous nous ramènent à ce qu'on disait au début. Moins de gens travaillent pour produire plus de richesse parce qu'on la produit autrement. On dit : « avant il y avait 4 jeunes pour un vieux là il va y avoir 4 vieux pour un jeune, ça va être effrayant » mais s'il y a plus de machines qui produisent autant de richesse ? Les études nous montrent qu'on produit actuellement plus de richesse par vieux qu'on ne l'a jamais fait, c'est donc pas un problème le vieillissement de la population puisqu'on remplace les retraités par des machines. S'il y avait vraiment trop d'ouvrage pour les jeunes, là il y aurait un problème mais il n'y en a certainement pas trop ! Le problème encore et toujours, il est dans la répartition des richesses.

Quant au service de la dette, il n'est pas si lourd qu'on le dit. Dans les 108 milliards, il y en a 35 qui sont des pensions futures. Donc, même si je voulais les payer immédiatement, je ne peux pas ! Est-ce que je dois les approvisionner (mettre de l'argent de côté jusqu'au jour du paiement) ? Si on a jamais approvisionné les pensions, c'est à dire qu'on les payait au jour le jour et qu'on se met à le faire aujourd'hui cela veut dire que je me trouve à payer deux fois maintenant, celle d'aujourd'hui et celle de demain pendant X années, jusqu'à temps qu'on les ait approvisionnées pour ceux qui n'auront plus à les payer plus tard.

Il faut faire très attention à cela. Les gens disent n'importe quoi mais les finances publiques ce n'est pas si fou que ça. Le financement public est en général organisé pour coïncider avec le temps d'utilisation. Autrement dit, si on bâtit une aréna, on la finance pour 60 ans jusqu'à temps qu'elle ne soit plus bonne et qu'on en construise une autre. Et ce sont les gens qui vont l'utilliser qui vont la payer durant 60 ans. Mais si tu la fais payer d'avance... C'est la mentalité budget familial de l'ADQ qui ne comprend rien dans la vie. Eh bien si tu la fais payer d'avance pour la bâtir « cash » tu fais payer à des gens, avant, une aréna que d'autres gens vont utiliser, après ! Ce n'est pas logique de penser comme ça. Présentement justement on essaie de préserver une équité entre celui qui paie et celui qui utilise en pensant que les équipements d'une société sont utilisés par tout le monde. C'est le projet adéquiste qui est inéquitable !

Donc, il ne faut pas s'émouvoir de la dette au point d'arrêter de contruire (on est en train de détruire). Je ne suis pas pour la dette à l'infini, ce n'est pas ce que je dis. La vraie dette d'abord est de 70 milliards à peu près dont 30 milliards appartiennent aux REER que le gouvernement a financés lui-même et dont il récupérera un certain montant par les impôts futurs. On pourrait faire quelque chose avec cela. Dans ce qui reste, une bonne partie appartient aux Québécois via leurs obligations. On pourrait augmenter cette partie.

Moralité. Sommes-nous si mal pris avec cette dette-là ? Cela reste à voir mais il n'est pas question de brandir cela comme un épouvantail. Rembourser la dette, cela veut dire diminuer les impôts, diminuer les services et cela c'est bien le programme de la droite.

Permettez-moi de vous demander d'être plus clair. Quand on dit dans le programme de l'UFP qu'on va investir 10 milliards sur cinq ans en santé, ça semble être beaucoup d'argent.

Non ce n'est pas beaucoup d'argent. Il suffit de réaffecter les sommes déjà là. C'est deux milliards par année. Juste un exemple : nous allons dépenser au mois d'avril 1,3 milliard en manque à gagner pour les REER et ce n'est qu'un des abris fiscaux.

Il y a tout plein de programmes qui existent qu'on ne remet jamais en question. On dit toujours : y-a-t-il assez d'argent pour mettre en santé ou en éducation mais jamais y'en a-t-il assez pour mettre dans les REER cette année ? Ça, c'est comme pris pour acquis.

Oui mais on nous dit tellement que nous sommes parmi les plus taxés en Amérique du Nord, doit-on augmenter encore le fardeau fiscal ?

On ne peut pas taxer davantage les individus qui déclarent tous leurs revenus. Mais on estime que les fausses dépenses dans les PME atteignent les 100 milliards de dollars, c'est plus que le travail au noir. pourtant on ne fait pas de grandes campagnes pour sensibiliser les patrons au fait que passer des dépenses personnelles sur le compte des PME c'est voler ! Il y a en masse de revenus non taxés et il y a des tonnes de taxes non perçues. Il y a tout plein de revenus qu'on ne voit pas, seulement on regarde toujours au même endroit ; on nous force à regarder à la même place pour ne pas qu'on voit tout ce qui passe à côté.

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