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Nintendo condamné pour entente

Carl Desjardins, Dimanche, Novembre 17, 2002 - 10:55

transnationale

En avril 2000, les services du commissaire européen à la Concurrence Mario Monti avaient ouvert une "procédure d'enquête formelle" contre Nintendo et sept de ses distributeurs. La Commission les soupçonnait de participer à un "accord de type cartel dans le but de cloisonner le marché unique européen". Une pratique qui "pourrait contrevenir" aux règles européennes de la concurrence "en ce sens que les prix sont maintenus artificiellement à un niveau plus élevé".

Avez-vous payé votre console trop chère ? Après plusieurs années d'enquête, la Commission européenne a mis en évidence des pratiques illicites en matière de distribution de la part du japonais Nintendo et décidé de pénaliser le fabricant de jeux vidéo. Ce dernier devra s'acquitter d'une amende de 149 millions d'euros. Nintendo et ses distributeurs ont violé le droit de la concurrence en Europe pendant la plus grande partie des années 90. L'amende est la quatrième plus élevée jamais infligée pour cartel à une entreprise individuelle, a précisé la Commission européenne.

En avril 2000, les services du commissaire européen à la Concurrence Mario Monti avaient ouvert une "procédure d'enquête formelle" contre Nintendo et sept de ses distributeurs. La Commission les soupçonnait de participer à un "accord de type cartel dans le but de cloisonner le marché unique européen". Une pratique qui "pourrait contrevenir" aux règles européennes de la concurrence "en ce sens que les prix sont maintenus artificiellement à un niveau plus élevé".

"Escroquerie"

D'après les informations recueillies à l'époque, "chaque société s'était vu allouer une portion de territoire national au sein de l'UE pour distribuer les produits Nintendo. Elle était par ailleurs tenue d'empêcher le commerce parallèle, c'est-à-dire les exportations d'un pays à l'autre via des voies non officielles, principalement en imposant des interdictions d'exportation et des contrôles à leurs grossistes et détaillants".

Les sociétés qui autorisaient des activités de commerce parallèle dans leur pays étaient en outre "sanctionnées", avait ajouté la Commission en avril 2000. "Les familles européennes dépensent des millions chaque année en jeux vidéo et nous voulons veiller à ce qu'elles ne soient pas victimes d'escroquerie", avait expliqué Mario Monti en ouvrant la procédure d'enquête.

- De plus, je joins à cela, le communqué de presse de la Commission Européenne.

La Commission inflige une amende à Nintendo et à sept de ses distributeurs européens pour s'être entendus en vue d'empêcher la commercialisation de produits à faible prix

La Commission européenne a infligé une amende d'un montant total de 167,8 millions d'euros au producteur japonais de jeux vidéo Nintendo et à sept de ses distributeurs officiels en Europe pour s'être entendus en vue d'empêcher les exportations de pays à bas prix vers des pays à prix élevés. L'amende infligée à Nintendo elle-même a été fixée à 149 millions d'euros afin de refléter sa taille sur le marché en cause et le fait qu'elle a été le meneur dans le comportement illégal, et parce qu'elle a poursuivi l'infraction même après avoir été informée que l'enquête était en cours. Les prix des consoles et des jeux ont varié considérablement d'un pays à l'autre au sein de l'Union européenne au cours de la période examinée par la Commission: les mêmes produits ont coûté jusqu'à 65 % de moins au Royaume-Uni qu'en Allemagne et aux Pays-Bas. «Chaque année, des millions de familles européennes consacrent des sommes importants aux jeux vidéo. Elles ont le droit d'acheter les jeux et les consoles au prix le moins élevé que le marché peut leur offrir, et nous ne tolérerons pas de comportements collusoires destinés à maintenir des prix artificiellement élevés» a déclaré Mario Monti, le commissaire européen chargé de la concurrence.

La décision concerne Nintendo et sept distributeurs de produits de cette entreprise, à savoir: John Menzies plc (le distributeur de Nintendo pour le Royaume-Uni), Concentra - Produtos para crianças S.A. (Portugal), Linea GIG. S.p.A. (Italie), Bergsala AB (Suède), la division grecque de l'entreprise japonaise Itochu Corp, Nortec A.E. (Grèce), et la division belge de l'entreprise allemande CD-Contact Data GmbH.

La Commission a recueilli des preuves qui établissent que Nintendo et ses distributeurs se sont entendus pour maintenir des écarts de prix artificiellement élevés dans l'Union européenne entre janvier 1991 et 1998. Conformément aux accords conclus, chaque distributeur était tenu d'empêcher le commerce parallèle au départ de son territoire, c'est-à-dire les exportations d'un pays vers un autre par des canaux de distribution parallèles. Sous la houlette de Nintendo, les entreprises ont collaboré étroitement pour identifier l'origine de tout commerce parallèle. Les opérateurs qui autorisaient les exportations parallèles ont été sanctionnés par la réduction de leur approvisionnement ou par un boycott total.

Le Royaume-Uni est de loin le pays où les prix sont le moins élevés

L'enquête a permis d'établir qu'au cours de la période de sept ans sur laquelle porte la décision, les écarts de prix au sein de l'Espace économique européen (c'est-à-dire l'Union européenne, la Norvège, l'Islande et le Liechtenstein) ont été fréquents et importants. Les prix de loin les plus faibles ont généralement été enregistrés au Royaume-Uni, ce qui, comme on le comprend, a incité les opérateurs à réexporter des produits bon marché vers des pays à prix élevés.

Les écarts de prix les plus marquants ont été relevés au début de 1996, lorsque certains produits Nintendo ont été jusqu'à 65 % moins chers au Royaume-Uni qu'aux Pays-Bas et en Allemagne. Ils y étaient également plus abordables qu'en Espagne (où leur prix a été jusqu'à 67 % plus élevé qu'au Royaume-Uni), en Italie (54 %) et en Suède (39 %). Cet écart s'est rétréci mais est resté important en 1997, année où les prix britanniques de toutes les consoles de jeux N64 et de toutes les cartouches de jeux ont été inférieurs de 33 % (en octobre) à ceux du reste de l'EEE.

Une note rédigée par l'entreprise John Menzies à l'intention de Nintendo le 11 avril 1996, qui a été volontairement communiquée à la Commission, exposait la stratégie et les mesures à prendre pour maintenir les énormes différences de prix: «Je comprends très bien les difficultés que cet écart de prix crée pour les autres pays européens du continent où le marché peut à l'évidence supporter des prix bien plus élevés qu'au Royaume-Uni. [...] Je suis persuadé que nous pouvons, par une étroite collaboration, mieux contrôler la situation relative aux importations parallèles et trouver une méthode bien plus efficace de circonscrire nos produits et nos prix au seul territoire britannique, réduisant ainsi l'incidence de cet écart en Europe continentale».

John Menzies est ensuite passée à l'action, ainsi qu'il ressort d'une lettre obtenue à la suite d'une demande formelle de renseignements adressée à Nintendo: «Je peux vous assurer que depuis janvier/février de cette année, THE (une filiale de John Menzies dénommée THE Games Ltd) s'est beaucoup employée à mettre fin aux exportations parallèles à partir du Royaume-Uni vers le marché de l'Europe continentale. À cet égard, notre principale action a consisté soit à ne plus livrer du tout certains détaillants douteux soit à contrôler et/ou réduire véritablement les livraisons qui leur étaient faites afin de circonscrire les produits au marché britannique».

Il est à noter qu'auparavant, John Menzies avait elle-même fait l'objet d'un boycott de la part de Nintendo afin de forcer l'entreprise à mieux collaborer à l'infraction.

À la suite du comportement illégal de Nintendo et de ses distributeurs officiels, les familles d'Europe continentale n'ont eu d'autre choix que de payer des prix élevés. Pour mesurer le préjudice infligé aux consommateurs, il suffit de savoir que Nintendo a vendu 5 millions de consoles et 12 millions de cartouches de jeux en Europe rien qu'en 1997.

L'article 81 du traité CE interdit explicitement les accords et les pratiques concertées «qui sont susceptibles d'affecter le commerce entre États membres et qui ont pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur du marché commun (de l'UE)».

Les restrictions au commerce parallèle constituent une infraction très grave à l'article 81, comme l'ont confirmé les juridictions communautaires dès 1966 dans l'arrêt Grundig-Consten(1), qui a fait date en la matière, et comme l'a montré, plus récemment, la décision Volkswagen(2) en 1998.

La gravité de l'infraction et le tort causé aux consommateurs finals a conduit la Commission à infliger une amende totale de 167,843 millions d'euros, c'est-à-dire la cinquième en importance jamais infligée au titre d'une infraction aux règles de concurrence. Il s'agit également de l'amende la plus élevée jamais infligée pour une infraction «verticale», c'est-à-dire, en l'espèce, entre un producteur et ses distributeurs, tandis que les ententes horizontales sont conclues entre les fabricants d'un même produit. L'amende infligée à Nintendo est également la quatrième en importance jamais infligée à une seule entreprise pour une infraction unique.

Amendes individuelles

Ci-après figure une répartition des amendes par entreprise (en millions):

Nintendo Corporation et Nintendo of Europe GmbH (conjointement responsables) : 149,128

John Menzies plc : 8,64

Concentra - Produtos para crianças S.A. : 0,825

Linea GIG. S.p.A. : 1,5

Bergsala AB : 1,25

Itochu Corporation : 4,5

Nortec A.E. : 1,0

CD-Contact Data GmbH. : 1,0

Ces montants reflètent l'effet réel du comportement infractionnel de chaque entreprise sur la concurrence ainsi que leur taille variable, en vue de garantir un effet dissuasif suffisant. Nintendo, John Menzies et Itochu ont une taille nettement supérieure à celle des autres entreprises.

Nintendo a été l'instigateur et le meneur de l'infraction et, tout comme John Menzies, l'entreprise a poursuivi son comportement illégal même après que la Commission avait ouvert son enquête, ce qui constitue une circonstance aggravante. John Menzies a également tenté d'induire en erreur la Commission en ce qui concerne l'ampleur réelle de l'infraction à la mi-1997. Ces circonstances aggravantes ont été dûment mises en balance avec le fait qu'après décembre 1997, John Menzies et Nintendo ont coopéré avec la Commission. De même, lorsqu'elle a fixé l'amende finale de Nintendo, la Commission a pris en considération la décision de l'entreprise d'offrir une indemnisation financière importante aux tiers ayant subi un préjudice matériel. Nintendo et John Menzies ont néanmoins bénéficié de réductions importantes de leur amende, ce qui souligne l'importance que la Commission attache à la coopération des entreprises qui ont enfreint la législation communautaire sur la concurrence, même si l'infraction n'a pas consisté en la participation à une entente horizontale «classique»(3).

La faible amende infligée à Concentra reflète le rôle passif que celle-ci a joué dans l'accord illégal.

Rappel

Nintendo produit des consoles de jeux et des cartouches de jeux compatibles avec ces consoles. Les produits en cause dans la présente décision sont les consoles «statiques» NES et SNES, la console de jeux N64 qui les a remplacées et le Game Boy «portable».

Dans certains États membres, Nintendo est l'importateur officiel de ses produits, et elle les distribue elle-même aux grossistes et aux détaillants. C'est le cas en Allemagne, aux Pays-Bas, en France et en Espagne. Au début de la période sur laquelle a porté l'enquête, Nintendo distribuait également ses propres produits en Belgique, au Royaume-Uni et en Irlande, mais elle a ensuite désigné des importateurs officiels indépendants pour ces pays. The Games Ltd, qui fait partie de John Menzies, est devenu le distributeur officiel de Nintendo pour le Royaume-Uni et l'Irlande en 1995. CD-Contact Data GmbH est devenu l'importateur officiel de Nintendo pour la Belgique en 1997. Au Portugal, en Italie et dans les pays scandinaves, les importateurs officiels sont ou étaient Concentra, Linea GIG Spa et Bergsala AB. En Grèce, les produits Nintendo ont été distribués par Itochu Hellas EPE, une filiale d'Itochu, jusqu'en 1997. À cette date, la distribution a été reprise par Nortec EA. Après la période sur laquelle a porté l'enquête, Nintendo a réorganisé son système de distribution.

L'enquête de la Commission a commencé en 1995, mais elle s'est accélérée en décembre 1997, lorsque John Menzies, et ensuite Nintendo ont commencé à coopérer avec elle. Le 25 avril 2000, la Commission a adressé une communication des griefs aux entreprises. (Voir également IP/00/419 du 28 avril 2000). Toutes les entreprises ont répondu par écrit mais n'ont pas demandé à être entendues. Elles ont également eu accès au dossier de la Commission.

(1) Arrêt de la Cour de justice du 13 juillet 1966 dans les affaires jointes 56 et 58-64, Grundig-Consten, Recueil 1966, p.429.

(2)Volkswagen, décision de la Commission du 28 janvier 1998 relative à une procédure d'application de l'article 81 (ex article 85) du traité CE, JO L 124/60 du 25.4.1998.

(3)Comme l'infraction dans la présente affaire est une entente verticale, la communication de 1996 sur la clémence n'est pas applicable. Cependant, la communication de 1998 sur la méthode de calcul des amendes dans les affaires de concurrence permet également de prendre en considération la coopération à l'enquête hors du cadre de la communication sur la clémence.

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