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Les insolences du citoyen untel

Anonyme, Mercredi, Mars 27, 2002 - 13:33

Critique de la société québécoise et de son inertie socio-politique partiellement généralisée.

Je suis né au Québec et parfois, presque souvent, j'ai honte. Honte de ne pas comprendre ce qui se passe ici et honte d'être associé, en tant que citoyen, à ce qui se passe ici. Nous contribuons entre autres à la dégénérescence de la planète, participons à la répartition inégale de la richesse mondiale et pratiquons le suicide assisté sur chacun de nous à la lumière de nos cousins canadiens et américains. Bref, nous carburons tous aux mêmes idées : rentabilité économique, adaptabilité, performance. Nous ne sommes décidemment pas distincts.

En 1948, les Borduas, Riopelle, Gauvreau, Ferron et compagnie signaient un manifeste qui allait entrouvrir la porte du Québec à la modernité. À cette époque, les automatistes sonnèrent la charge notamment contre ce « petit peuple serré de près aux soutanes restées les seuls dépositaires de la foi, du savoir, de la vérité et de la richesse nationale ». Cinquante années se sont écoulées depuis et le décès de chacun des signataires du Refus global est récupéré habilement par nos politiciens : Barbeau, un héros, Ferron, une femme, Riopelle, un génie. Political correctness, quand tu nous habites. Mais qu'est devenu ce petit peuple serré de près aux soutanes?

2002, le peuple a changé de berger. Les soutanes ont céder leur place aux vestons et cravates à titre de nouveaux emblèmes des savoirs et pouvoirs. L'État, et de plus en plus l'entreprise privée, ont succédé à l'Église dans son rôle de gardien du peuple et ce, avec tout ce que le sclérosé de l'époque comportait, de l'aliénation à la foi. En d’autres termes, l’idéal automatiste a été rejeté. De l’Église à l’État, rien n’a vraiment changé. La bible s’appelle maintenant circulaires des bas prix et les prêtres, eux, hommes d’affaires.

Dans cette perspective, les années 1980 ont vu s'opérer la substitution de l'État-providence par ce qu'il m'arrive de nommer l'État-connivence. Plus précisément, la collaboration actuelle entre les États et le monde de l'industrie s'inscrit dans une dynamique de collusion, de connivence : complicité qui consiste à cacher la faute de quelqu'un. Décidémment, le terme est bien choisi.

À cet égard, la pollution industrielle est réglementée, la fraude fiscale est légitimée et les reports d’impôts sont octroyés à certaines des plus grandes entreprises. L'État québécois souhaité et mis en place au cours de la Révolution tranquille n'affiche plus de couleurs sociales-démocrates : il est désormais une compagnie. Ses valeurs s’articulent autour d’un principe économique : l’efficience. Son siège social, situé à Québec, accueille plusieurs jours par année un conseil d'administration fort imposant. On y jase administration : celle des hôpitaux, celle des écoles, celle des banques, etc. On administre, sondages à l’appui. Bref, la politique québécoise est devenue une gestion de sous à défaut d'être une gestion de nous. Pour dire clairement les choses, l’économie a supplanté la politique.

Ainsi, le parti québécois ne sait que faire de son étiquette social-démocrate. Ses pratiques sont à cent mille lieux de cette notion politique et la direction du parti le sait très bien. La seule différence entre le parti québécois et le parti libéral réside actuellement dans l'idée de la souveraineté. Ici peut-on apercevoir d’ailleurs la recette miracle de la politique québécoise : diviser, au tour d'une seule idée, pour mieux régner. À ce sujet, Monsieur Landry sait pertinemment que la souveraineté des États, dans le contexte actuel, n’est plus une solution. Alors que la planète se questionne à savoir quel pouvoir possède encore ou devrait encore posséder les États nationaux, nous nous acharnons à se poser la question suivante : voulons-nous un pays? Il y a trente ans, j’aurais sans doute été l’un des plus fervents défenseurs de la cause nationale : l’intérêt y était, la distinction également. Aujourd’hui, niet. Plus rien. Pas de projet de société particulier sinon celui de nationaliser, dans un Québec souverain, le néolibéralisme ambiant. Nous sommes désormais conformes au monde des affaires, à la vie économique en société. Les big boss patroneux anglophones dénoncés par le Front de Libération du Québec sont maintenant francophones. On peut désormais nous aussi thinker big en français.

Les Québécois demeurent les yeux grands fermés devant plusieurs de nos réalités : pauvreté, concentration des médias, entraves aux libertés civiles, etc. Toutefois, les gens ne sont pas dupes : seules leurs actions le sont. Accepter passivement, comme c’est le cas actuellement, les plus récentes données de l’Institut Fraser par exemple concernant l’abaissement du nombre de pauvres à l’échelle canadienne relève du domaine de l’aberration chronique. Cet institut canadien, armé d’experts néolibéraux, manipule les chiffres dans une seule et unique perspective : légitimer les coupures en matière d’intervention étatique. Certains rouspètent, mais la machine médiatique est bien huilée. Il n’y pas de place pour la critique profane devant les chiffres de l’expert. Œil pour œil, expert pour expert.

Bref, ni documentaire choc, ni manifestation populaire, ni critique dans les journaux, ni statistique tronquée, ni émission de télé sensationnaliste et ridicule parviennent à éveiller les consciences québécoises. Le peuple dort dans un confort ISO 9001. Un confort signé qualité totale. Et quand il se réveille, c’est pour quémander une baisse d’impôt. Pour consommer davantage. Zzzzz. La société de consommation : une simple sommation de cons? Non. La connitude n’est que la caractéristique du système actuel. Pas celle des gens. Du moins, tel est mon souhait.

Citoyens et citoyennes, que voulons-nous? Un Québec ultralibéral articulé autour d’un monde du travail où la main-d’œuvre devient une variable à compresser au besoin selon les contraintes financières des entreprises? Un Québec pollué par des industries qui font rouler l’économie au grand plaisir de notre consommation hebdomadaire à bas prix dans les magasins à grande surface? Un Québec centré autour d’une agriculture industrielle d’exportation à l’intérieur de laquelle nos animaux deviennent des machines à produire de la viande. Un Québec dont la liberté est une marque de yogourt, un forfait de téléphone cellulaire ou une compagnie d’assurance? Un Québec pour qui la notion de citoyenneté ne fait plus aucun sens et pour qui les individus sont désormais des clients, des usagers, des participants, des partenaires et des associés? Si oui, qu’on me chante un requiem.

Sinon, prenons conscience de la richesse de la vie et donnons-nous des moyens de production de biens et services et de reproduction des êtres humains plus respectueux. Sortons des eaux troubles de la pratique économique actuelle. Sachez que le bal économique en vigueur n’a de légitimité qu’en raison de notre accord. De notre accord. Il faut agir collectivement. L’individu, seul, a ses limites.

Toutefois, devant les orientations de certaines chambres de commerce du Québec et du Conseil du Patronat, je crains de voir se pointer à l’horizon un nouveau FLQ : un Front de Libéralisation du Québec. Hommes d’affaires opportunistes, l’idée vous est lancée. Le clin d’œil historique sera sans doute apprécié.

Bref, à ceux pour qui l’argent fait tout savoir, je dis bravo! À la Fureur, je dis Bravo. À TQS, je dis bravo. À la concentration des médias, je dis bravo. Aux instigateurs des contrats de performance ligotant les mains des dirigeants universitaires, je dis bravo! À l’UPA, je dis bravo. L’union fait la force. Votre démonstration est étincelante comme mes dents lorsque brossées avec du Crest ultra plus max full nouveau blanchissant.

Citoyens et citoyennes, l’union fait la force. Le comprendrons-nous un jour?

Site de la revue Espaces de la parole
www.ao.qc.ca


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