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Éveil militant contre « l'hystérie sécuritaire »

vieuxcmaq, Samedi, Février 9, 2002 - 12:00

LSIjolie (Campagne pour la libération de la cryptographie) (lsijolie@lsijolie.net.)

Ils se sont mobilisés à la suite de quel ques dates marquantes ou de quelques mots de trop. Depuis l'automne dernier, trois mouvements sont nés, regroupant chacun, de manière plus ou moins informelle, des acteurs de la vie sociale, des sociologues ou des militants.

vendredi 8 février 2002

Ils se sont mobilisés à la suite de quel ques dates marquantes ou de quelques mots de trop. Depuis l'automne dernier, trois mouvements sont nés, regroupant chacun, de manière plus ou moins informelle, des acteurs de la vie sociale, des sociologues ou des militants. Plusieurs centaines de personnes. Politiquement ancrés à gauche mais pas seulement, le Réseau, Esprit et Claris (1), parfois lancés sous le coup de l'indignation, finissent par se structurer et veulent désormais, à quatre mois de l'élection présidentielle, « clarifier » ou « dénoncer » un débat public marqué par « l'hystérie sécuritaire ».

Le Réseau de la haine

Au commencement était un acquittement. Le 28 septembre 2001, le policier Pascal Hiblot est déclaré non-coupable par la cour d'assises des Yvelines, à Versail les, alors qu'il a, dix ans auparavant, tué Youssef Khaïf, un jeune de Mantes-la-Jolie qui s'enfuyait dans une voiture volée. A la suite du verdict, quelques personnes, dont l'écrivain Serge Quadrupanni et le documentariste Frédéric Goldbronn, font circuler un texte dénonçant une « parodie de justice ». Qui signe ? Environ trois cents personnes, écrivains (Maurice Rajfus), syndicalistes (Annick Coupé, de Sud) ou sociologues... Baptisé Réseau contre la fabrique de la haine, le mouvement regroupe beaucoup « de gens d'extrême gau che ou de libertaires », dit Frédéric Goldbronn. Qui militent aussi, très souvent, dans d'autres associations comme Attac ou le DAL... Inspiré par les travaux de Pierre Bourdieu (qui n'avait pas signé), et du sociologue Loïc Wacquant (qui a signé), le Réseau revendique sa radicalité. Ici, on pense que le « sécuritarisme, levier du néo-libéralisme, est une guerre menée contre les plus remuants des pauvres ». Et que la police, explique Frédéric Goldbronn, loin d'abriter quelques « brebis galeuses » responsables de « bavures », serait plutôt le bras armé d'une « injustice de classes », d'une inégalité structurelle dont pâtiraient en premier lieu les jeunes des banlieues.

« Esprit » et l'Appel contre la suspicion généralisée

Lancé début décembre, l'Appel contre la suspicion généralisée rassemble environ 300 noms autour de la revue Esprit. Au départ, explique Joël Roman, « nous ne visions pas des intellectuels, mais plutôt trois sortes de gens : les "spécialistes" des questions de délinquance et de sécurité, sociologues ou autres ; les responsables de réseaux associatifs de banlieue ; les praticiens du travail avec les jeunes en difficulté ». A l'arrivée, on relève, sur cette liste très gauche plurielle et assez people, plusieurs Verts (Noël Mamère, Dominique Voynet, Stéphane Pocrain), des chercheurs (Benjamin Stora, Alain Touraine) ou encore l'avocat Henri Leclerc, président d'honneur de la Ligue des droits de l'homme. Tous animés par le même souci : « Le climat de suspicion généralisée à l'égard des jeunes de banlieue. »

Claris, « clarifier le débat public sur l'insécurité »

Claris, le plus récent de ces trois groupes, est surtout constitué de sociologues, et est « né » dans Libération du 30 janvier 2002, par la publication d'un manifeste. Le noyau dur de Claris pour « Clarifier le débat public sur l'insécurité » se compose de huit personnes, chercheurs ou praticiens, dont Laurent Mucchielli et Michel Kokoreff. Réfutant d'emblée le terme d'« experts », car « monopolisé par tous ceux qui prennent la parole avec des intérêts corporatistes », ces « observateurs » veulent donc, par le biais de leurs travaux sur telle ou telle cité, « refléter la pluralité des points de vue ». Policiers, magistrats, mais aussi jeunes, associations, travailleurs sociaux... « Ce qui nous choque, disent ces sociologues, c'est le décalage entre ce qu'on voit sur le terrain et ce qu'on entend dans le débat public. » Exemple : le « sentiment d'insécurité », principalement exprimé par des femmes ou des personnes âgées. Or, affirment les gens de Claris, « ce sont surtout des jeunes hom mes qui sont victimes de violences ». Autre idée reçue : les policiers se feraient tirer dessus bien plus qu'avant. « En fait, il y a moitié moins de morts en service qu'il y a dix ans. Peut-être plus de caillassages, mais alors on ne parle plus de la même chose... »
(1) Adresses e-mail : Le Réseau (pro...@samizdat.net) Esprit (joel...@club-internet.fr) Claris (clar...@free.fr)



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