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Reportage : Laissez-moi passer

vieuxcmaq, Jeudi, Avril 5, 2001 - 11:00

Nynon Lessard (lnynon@hotmail.com)

« Nynon Lessard, vous êtes en état d’arrestation. Vous avez le droit de garder le silence, tout ce que vous direz pourra être retenu contre vous. » Que voulez-vous que je taise, qu’est-ce qui aurait pu être retenu contre moi, citoyenne de la planète? J’affirmerai plutôt au nom de la démocratie, que ce qui se prépare en terme d’accord continental, à long terme mondial, met en péril ma survie en tant qu’être humain libre. Je ne garderai pas le silence.

Le 2 avril dernier avait lieu la perquisition citoyenne gouvernée par la Table de convergence de l’opposition pacifique au Sommet des Amériques. En tout, près de 400 manifestants prêts à affirmer leur droit. Le droit de connaître le contenu des textes de la ZLEA (Zone de libre-échange des Amériques), à leur yeux peu transparent. Ce droit devait amener 87 personnes à l’arrestation inévitable.

« Nynon Lessard, vous êtes en état d’arrestation. Vous avez le droit de garder le silence, tout ce que vous direz pourra être retenu contre vous. » Que voulez-vous que je taise, qu’est-ce qui aurait pu être retenu contre moi, citoyenne de la planète? J’affirmerai plutôt au nom de la démocratie, que ce qui se prépare en terme d’accord continental, à long terme mondial, met en péril ma survie en tant qu’être humain libre. Je ne garderai pas le silence.

Le 2 avril dernier avait lieu la perquisition citoyenne gouvernée par la Table de convergence de l’opposition pacifique au Sommet des Amériques. En tout, près de 400 manifestants prêts à affirmer leur droit. Le droit de connaître le contenu des textes de la ZLEA (Zone de libre-échange des Amériques), à leurs yeux peu transparent. Ce droit devait amener 87 personnes à l’arrestation inévitable.

Un périmètre de sécurité avait été mis sur place entourant l’édifice Lester B. Pearson et une force policière de la GRC et de la police d’Ottawa était sur les lieux pour contrer l’action des manifestants.

La première perquisition citoyenne a eu lieu vers 10 h 30 et c’est à ce même moment que la première arrestation de 2 personnes a été effectuée. À la fin de la lecture du mandat de perquisition, adressé entre autres au ministre Pierre Pettigrew, chacun affirmait : « Je m’appelle [Nynon Lessard] et je suis ici pour exercer mes droits de citoyenneté. S’il-vous-plaît, laissez-moi passer. » S’ensuivait, l’escalade de la barricade et l’arrestation. L’agent Roger Brown affirmait à chacun que s’il traversait la barrière, il serait en état d’arrestation; tout le monde le savait, mais pour la symbolique de ce geste, la légitimité de ce droit, l’arrestation n’était que secondaire et permettait à la population de voir à quel point la démocratie était un concept en voie de disparition.

À la traversée de la barrière, la plupart des gens se sont effondrés laissant le soin à la police (2 par personne) de les transporter jusqu’au stationnement intérieur de l’édifice Lester B. Pearson, lieu où l’on fouillait et prenait les coordonnées de chacun. Une policière exerçant son travail a affirmé qu’il était inhabituel de procéder à l’arrestation des gens dans un stationnement intérieur, qui sentait le gaz à plein nez.

Lecture des droits (en français même pour les anglophones), fouille, mise des effets personnels dans un sac de plastique, photographies de l’arrêté et des 2 policiers, menottes (en plastique), puis escorte jusqu’à l’autobus blindé.

"La policière qui m’a accompagné semblait scandalisée que j’accepte d’avoir un casier judiciaire pour une cause si banale à ses yeux. Je crois qu’elle ne connaissait pas les enjeux de la ZLEA. Pourtant j’ai remarqué une certaine conscientisation de la part d’autres policiers." Effectivement, plusieurs policiers étaient très sympathiques et outre l’exercice de leur fonction, ils furent très enclins à l’échange. Certains manifestants ont même tenté de faire de la sensibilisation.

Dans ce genre d’arrestation, où les citoyens savent qu’ils sont en plein exercice de leur droit, une solidarité carcérale est appliquée. Une solidarité de consultation entre autres, permettant à chacun de sortir indemne, sans conditions de libération. L’inverse aurait pu, par exemple, empêcher les personnes concernées de manifester au Sommet des Amériques (but ultime pour eux).

Dans cette situation, 2 points étaient envisagés. Premièrement, exiger des policiers que les francophones et les anglophones soient interrogés dans leur langue maternelle, sinon refus de répondre. Deuxièmement, refuser toute condition de libération entravant le droit de manifester, particulièrement à Québec du 16 au 22 avril. Finalement, la deuxième ne s’est pas appliquée.

Tous les manifestants se sont retrouvés au Poste de police d’Ottawa, femmes et hommes séparés. L’attente au transfert des cellules fut relativement longue, on ne prévoyait pas autant d’arrestations. Certaines en ont profité pour comprendre la position des policiers et poser des questions. Un agent a fait ce témoignage dans un français respectable : « Nous ne sommes pas nécessairement en désaccord avec vos revendications, seulement, nous devons faire notre travail et cela n’implique pas que nous ayons subi un « brainwash » ». Plusieurs policiers sont sensibles aux enjeux et cela se manifeste par leur bon vouloir lors des arrestations. Un vent d’espoir souffle, néanmoins il semble qu’ils ne se compromettront pas dans un futur rapproché.

Arrivés au poste de police, les citoyens ont connu l’arrogance et la méchanceté de policiers abusant de leur pouvoir. À plusieurs reprises, les gens leur affirmaient que cet exercice se voulait non-violent, pourtant eux le furent. Une jeune femme vomissait depuis près d’une heure et parce qu’elle souhaitait être abordée dans sa langue maternelle, on lui a refusé toute aide. La policière a précisé en anglais et elle ne parlait pas français : « Si elle est si malade que ça, elle va parler en anglais. » La jeune femme malade s’est retrouvée à l’hôpital. Il est à noter que certains policiers travaillaient déjà depuis plus de 32 heures, cela expliquerait sûrement une part de leur impatience, de là à la subir... Il faut tout de même souligner que certains étaient très coopératifs. Même s’il travaillait depuis 40 heures pour se payer des voyages au Mexique un policier a été très amical.

Les prisonniers étaient prêts à passer la nuit en prison pour la solidarité carcérale. Par contre, vers 21 heures, la libération s’est amorcée. Aucune charge n’aura été retenue contre les manifestants. La seule ombre au tableau consiste en ceci : ils ont procédé à l’identification de chaque personne, avec photographie. Il est certain que ces données sont déjà inscrites au dossier. Aucune de ces informations ne peut se perdre dans le système.

La fin de cette péripétie s’est conclue avec un comité d’accueil des manifestants de la journée présent avec des vivres et leur solidarité. Sourire, satisfaction, accolade, chacun se retrouvait, soulagé et conscientisé. «Pendant les 10 heures qu’a duré mon incarcération, j’ai pu imaginer l’intimidation, l’abus de pouvoir que pouvait subir un prisonnier. J’ai pu sentir l’impuissance que j’aurais derrière les barreaux si j’avais commis un crime contre l’humanité».

Cela peut laisser entrevoir le déroulement des arrestations lors du Sommet des Amériques. Par contre, l’événement au ministère des Affaires étrangères et du commerce international était non-violent, ce qui ne sera pas nécessairement le cas lors du sommet. Les forces policières déployées seront plus nombreuses et probablement plus répressives étant donné qu’il faut protéger des chefs d’États.

Ne traversez pas la clôture, sinon le méchant loup va vous mordre ou vous faire mordre la poussière de cayenne. Le loup devrait plutôt faire cette clôture en dollars US lors du Sommet des Amériques. Même si nous connaissons une partie de la ZLEA et son caractère financier, nous sommes en droit d’en prendre connaissance en son entier. Le procédé est antidémocratique ainsi que la structure proposée. Déjà nous avons la preuve de cette tendance totalitaire, voyez pourquoi nous fûmes arrêtés.

Envoyée spéciale, Nynon Lessard pour le CMAQ

Voir également le reportage de Michaël Pineault



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