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Le perfectionnement de la répression

vieuxcmaq, Lundi, Mars 26, 2001 - 12:00

Eva Beaudoin (elfarmonia@yahoo.com)

Santiago-Chili.

Lorsque la Banque interaméricaine de développement, extension continentale de la Banque mondiale, s’est réunie à Santiago, du 15 au 20 mars de 2001, pour la première fois au Chili, une coordination de la gauche chrétienne, de groupes communistes, anarchistes et trotskistes et de différents syndicats, collectifs de travailleurs et collectifs étudiants fut mise sur pied pour manifester le désaccord populaire envers les politiques économiques imposées par la BID. Établissant un programme de manifestations au long de la rencontre de la BID, pour le diffuser...espérant ainsi attirer la sympathie et la participation du public.Pourtant, dès les premiers instants, la Concertation annonça l’intolérance implacable qu’elle exercerait face aux manifestations de désaccord à la BID, quelles qu’elles soient.

(Santiago-Chili)
Les manifestations antimondialisation, qui depuis Seattle se multiplient à travers le monde, ont fait face, en chaque occasion, à une répression brutale. Alors que les revendications corporatistes demeurent tolérables aux yeux des instances de pouvoir, toute critique envers le système économique en ses fondements mêmes, toute remise en question de la légitimité de l’ordre économico-politique imposé, appellent à une réplique intransigeante et sourde.

Il n’est maintenant un secret pour personne que la dictature de Cesar Augusto Ramon Pinochet Ugarte, financée par les tentacules de l’empire américain, fut un instrument d’instauration du système néoliberal, imposant dans le sang et la peur toutes les déréglementations économiques prônées par les instances économiques internationales. Lorsque le travail de fragmentation et de stérilisation du mouvement populaire fut suffisamment assuré, lorsque les principales ressources du pays furent vendues aux investisseurs étrangers, une « démocratie », dite Concertation, fut instaurée, gardant toutefois en sa constitution les limitations nécessaires à la pérennité des politiques économiques si durement instaurées.

Lorsque la Banque interaméricaine de développement, extension continentale de la Banque mondiale, s’est réunie à Santiago, du 15 au 20 mars de 2001, pour la première fois au Chili, une coordination de la gauche chrétienne, de groupes communistes, anarchistes et trotskistes et de différents syndicats, collectifs de travailleurs et collectifs étudiants fut mise sur pied pour manifester le désaccord populaire envers les politiques économiques imposées par la BID. Établissant un programme de manifestations au long de la rencontre de la BID, pour le diffuser...espérant ainsi attirer la sympathie et la participation du public. Pourtant, dès les premiers instants, la Concertation annonça l’intolérance implacable qu’elle exercerait face aux manifestations de désaccord à la BID, quelles qu’elles soient.

Dans un pays possédant une tradition de répression si dramatique, les tentatives de manifestation comme celles du 15, du 17 et du 20 mars eurent une amère saveur de souvenir. Il y avait longtemps que tant d’intolérance envers les manifestants n’avait été vue à Santiago. Les médias officiels, dans leur travail de diffamation, allèrent jusqu’à prétendre que les mobilisations contre la BID avaient été financées par des activistes étrangers, qui auraient payé les manifestants pour leur présence et leurs cris... les policiers devaient défendre la nation du désordre importé, pour le bien de l’économie, évidemment...

Pour commencer, lors de la première manifestation, le jeudi 15 mars au matin, vers 9.30, entre 70 et 80 personnes se sont réunies pour diffuser de l’information sur la BID et ses politiques économiques. Un policier s’est approché pour les aviser que si elles demeuraient où elles étaient, sans tenter de s’approcher de la Station Mapocho, où se réunissait la BID, elles seraient laissées tranquilles. Pourtant, lorsque une demi-heure plus tard ces quelques manifestants se dirigèrent vers Alameda, dans la direction opposée à la Station Mapocho, les policiers les encerclèrent, détenant une vingtaine de personnes.

Quelques heures plus tard, vers six heures, une manifestation tenta de se former, au coin d’Alameda et Ahumada, telle que prévue par la coordination contre la BID, mais les policiers occupaient déja le site, interdisant une quelconque agglomération, menaçant de la bouche sale du guanaco. (Le guanaco se fit fameux au sein des techniques de répression imaginées par la dictature militaire : genre de tank aspergeant ses cibles d’un fort jet d’eau sale, impregnée de produits chimiques, de merde, et de qui sait quelle autre cochonnerie) . Cette seconde tentative de manifestation fut donc également un échec, bien que le cocktail molotov qui fut lancé à un McDonald du coin résonna comme une petite victoire.

Le samedi suivant, suivant la même logique d’intimidation, les policiers essayèrent de tuer la tentative de manifestation dans l’oeuf, mais cette fois, ce ne fut pas si facile. Laissant à peine les manifestants marcher un coin de rue, les policiers lancèrent le guanaco, doublé de gaz lacrymogènes, repoussant les manifestants vers le Parc Forestal. Par chance, sur ce site coïncidait un évenement organisé par le Ministère de l'Éducation, ainsi lorsque les policiers à cheval nous encerclèrent, nous pûmes nous réfugier sous le chapiteau, aux côtés d’une quarantaine d’enfants, de leurs parents et des organisateurs hystériques. Les policiers détinrent une vingtaine de personnes, laissant par la suite les manifestants se disperser. Un point de rencontre fut défini, et nous nous dirigeâmes vers les rues San Pablo et Puente, de manière plus ou moins dispersée. Là aussi les policers nous attendaient. En plein centre-ville, la répression continua, aspergeant tous les passants de gaz lacrymogènes. Les policiers arrêtèrent tous les manifestants qui étaient à leur portée. Pourtant, les protestations éparses persistèrent, à la Plaza de Armas, face à la Station Mapocho et au coin des rues Alameda et Ahumada.

Au total, plus de 100 personnes furent arrêtées. Lorsque, suivant le processus d’appui juridique, les parents, amis et avocats des détenu(e)s se réunirent face au commissariat, les policiers lâchèrent une fois de plus le guanaco, aspergeant tous ceux qui se trouvaient sur son chemin; deux bébés durent être transportés d’urgence à l’hôpital, asphyxiés par les produits chimiques de l’eau sale crachée par le guanaco. Tout finit pourtant par rentrer dans l’ordre, tous les détenu(e)s retrouvèrent leur liberté le soir même, avec des accusations de graves désordres sur la voie publique.

Le lendemain, dimanche 18 mars, nous fûmes plus de trois cents personnes réunies à nouveau au Parc Forestal. Ce fut le « jour de la culture », où chacun eut l’occasion d’exprimer son opposition à la BID, de la forme artistique de son choix. Suite à la déclaration d’opposition de la coordination contre la BID, le charmant présentateur anarchiste céda le mégaphone à son frère qui nous interpréta un rap a capella, auquel succéda une présentation de danse contemporaine par une camarade du collectif des travailleurs, quelques acrobaties et des rires à profusion qui nous furent offerts par les clowns révolutionnaires Pepe et Astoldo, puis une danse traditionnelle indigène à laquelle finit par s’incorporer une grande partie du public. Une jeune anarchiste vint également partager avec le public certaines conclusions des évenements des derniers jours, appelant à une union transidéologique et à une rénovation de nos stratégies de résistance.

Lorsque nous nous réunîmes à nouveau le mardi suivant, pour clôturer cette suite d’évenements d’opposition à la BID, la Plaza Italia suintait une ambiance macabre. La tension des derniers jours était condensée à tel point qu’elle était presque palpable. À la première tentative de mouvement, les policers attaquèrent brutalement, arrachant déjà quelques manifestants au groupe. Nous étions déjà presque encerclés, alors un cri fut lancé, appelant à se regrouper au second point de rencontre. Nous nous sommes alors dispersés, pour nous réunir sur le Boulevard Alameda, marchant au rythme des consignes. Quand le guanaco menaçait, où que des cordons de policiers tentaient de nous barrer la route, nous nous dispersions pour nous réunir à nouveau. Ainsi continua la marche, dans les rues du centre-ville, qui entre dispersions, répression et détentions finit par être une tentative de plus. Encore une fois, plus de cent personnes furent arrêtées, et relâchées le soir même.

La coordination de résistance formée en ces circonstances se maintiendra en action, transcendant cette rencontre occasionnelle de la BID. Un jeune anarchiste participant à la coordination déclara que leur travail se concentrerait principalement dans la diffusion d’information sur les politiques économiques imposées par les instances de pouvoir, et dans des actions de contestation.

Il est essentiel que nous nous rendions compte que la répression, surtout dans les manifestations « antisystémiques », perfectionne de plus en plus sa stratégie, et que, par le fait même, nous devons inventer de nouvelles formes de protestation :ATTAQUER LÀ OÙ ILS NE NOUS ATTENDENT PAS. Chaque être et chaque groupe a la responsabilité de tirer des conclusions des défaites passées, nous ne pouvons laisser le traumatisme de la répression limiter notre travail. Il est plus que temps d’arriver à se coordonner pour construire ensemble sur de nouvelles bases; de cette humilité idéologique dépend le succès de l’élaboration d’une société distinte, de cette humilité idéologique dépend la survie de l’humanité.



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