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L'exode d'Orsainville...

vieuxcmaq, Mardi, Mars 20, 2001 - 12:00

Gilles Simard (cbv@oricom.ca)

La décision du ministre de la Sécurité publique du Québec de vider la prison d'Orsainville en vue d'accueillir d'éventuels manifestants qui seraient arrêtés, est-elle une menace aux droits des détenus et prévenus?

Serge Ménard: un gars dangereux pour la démocratie ...!

En clôturant la cité de Champlain avec briques et broche à volonté, et en dotant les corps policiers de tout un train de mesures plus débiles les unes que les autres, M. Serge Ménard, ministre de la Sécurité publique, donne dans la démesure, en plus de saloper joyeusement toute une brochette de droits démocratiques acquis de haute lutte.

En s'agitant ainsi du bocal, le député de Laval-des-Rapides fait montre d'une dangerosité publique mille fois plus grande que les milliers de soi-disant "dangereux" manifestants qui sont censés venir "braquer" Québec, dans la foulée du Sommet des Amériques et de celui, aussi, des Peuples.

Et, en expédiant quelques deux cents prévenu-e-s et détenu-e-s d'Orsainville à Montréal et Port-Cartier, l'ancien titulaire de la Justice, outre de faire preuve d'un incroyable cynisme et de témoigner un profond mépris pour l'ensemble de la population carcérale québécoise, démontre qu'en matière de gestion du crime ou de réinsertion sociale, il possède à peu près autant d'imagination que le produit du croisement d'un navet congelé avec un cactus à l'agonie! Dès lors, on ne se surprendra plus de l'entendre délirer ad nauseam sur les tenants et les aboutissants de la théorie des catastrophes...

En fait, avec toutes les ressources déjà existantes de différents réseaux (Maison Gomin, centres d'accueil, sections inutilisées de Robert-Giffard, autres...) où il eût été possible de caser pour quelques jours les supposées "terreurs", et alors qu'on trouve le moyen d'héberger à grand frais le sérénissime Maurice Boucher dans toute une aile de la prison Tanguay, il devient très difficile de croire au sérieux du ministre et de son entourage de bénis oui-oui en matière de sécurité du public. Évidemment, à trop s'exciter à vouloir montrer aux grands frères des États qu'on a hâte de jouer dans la même cour, on s'étonnera quand même un peu moins de voir les Beaudoin, Simard, Landry et Ménard débloquer du gallon et s'emmêler dans leurs pinceaux.

Faire du temps...
Quoiqu'en disent tous les André Arthur des ondes, et en dépit des reportages simplistes, voyeurs et sensationnels de Quebecor ou Power Corporation sur le sujet (1), faire du temps n'a jamais rien eu d'une sinécure ou d'un voyage avec le Club Med, et ce, tant pour les détenu-e-s que pour ceux et celles qui exercent le métier d'agent de la paix.

Avec la prison, on entre dans un monde clos et très complexe, dont la dynamique interne est à des années-lumière des us et coutumes, des codes et des lois qui régissent la société en milieu ouvert. Un univers glauque, subtil et sournois, déroutant, curieusement encodé et drôlement délirant, qui se nourrit de ses propres victimes. Une micro-société de contraintes et de confrontations, où la violence envers les autres et soi-même devient souvent une fin, en même temps qu'un moyen. À ce propos, rappelons juste que le taux de suicide en prison est en moyenne huit fois plus élevé qu'à l'extérieur (2).

Un exode appréhendé
Depuis que Serge Ménard a fait son annonce, un climat de peur et d'indignation s'est installé chez la majorité des 625 pensionnaires du Centre de détention -575 hommes et 50 femmes répartis dans quatre grands secteurs de prévention et de détention. Ainsi, à tous les jours, les groupes de défense des détenu-e-s (GDDDQ et ODD) enregistrent de nombreuses plaintes à cet effet (3). On ne veut pas aller à Port-Cartier. Et pour cause! Port-Cartier est une institution fédérale réputée pour accueillir des délinquants sexuels et des délateurs. Donc, une "clientèle" sous protection. À ce sujet, un officier d'Orsainville (dont nous taisons le nom) nous précisait que "tous les détenu-e-s d'Orsainville qui sont sous protection, sont visés par ce transfert." Le hic, c'est qu'une bonne partie de la population de la prison vit sous protection (Hell's, Rock, délateurs, flying saucers - détenus médicamentés et ayant besoin de soins psychiatriques)... On imagine le climat de suspicion, de peur et de pagaille qui s'ajoute au reste.

Faire son deuil...!
Vivre un transfert, en dépit du fait que les autorités banalisent les conséquences, c'est devoir faire son deuil d'une foule de choses, et appréhender le pire. Comme par exemple de ne plus avoir accès régulièrement à l'infirmerie, pour obtenir des soins ou pour prendre ses médicaments (insuline, anti-convulsifs, antidépresseurs, anxiolytiques...). Comme aussi de perdre de vue sa blonde, sa famille, son entourage -les autobus de la STCUQ ne se rendent pas sur la Côte-nord, et Bell Canada ne fait pas de cadeaux aux détenu-e-s.

De même, bien que M. Guy Samson, directeur des Services correctionnels québécois assure le contraire, aller faire du temps à Port-Cartier, ça peut aussi vouloir dire : perdre un emploi au Centre de détention de Québec (buanderie, imprimerie, ateliers du Centre), ou encore perdre, ou se voir retarder, son éligibilité à un programme d'encadrement en milieu ouvert (PEMO). Aller à Port-Cartier, ça peut vouloir dire, enfin, de se voir retarder indûment sa comparution pour une libération conditionnelle. Et, l'occasion faisant le larron, "il peut devenir très tentant pour les autorités, souligne un détenu du G-2 (les récidivistes), de se débarasser des leaders, des gars qui revendiquent le plus pour leurs droits..." Nous le croyons facilement!

Alternatives et garanties
Les fait est aussi qu'en permettant l'exode de prisonnier(ère)s pour la Côte-nord, le "brillant" ministre de la Sécurité publique, en plus d'adhérer à une logique des plus coûteuse pour le contribuable (personne n'a osé chiffrer l'opération), fait montre d'une énorme petitesse d'esprit à l'endroit des gens incarcérés.

En effet, il eût été très facile, plutôt que d'éparpiller des gens à diable Vauvert, d'incarcérer-loger des contrevenants dans des bâtiments déjà existants. On pense ici aux bâtisses de Valcartier, aux centres d'accueil avoisinants, à tous ces gymnases d'écoles fermées. Sait-on, à la Sécurité publique, qu'il s'agit d'aligner treize lits sur un plancher pour recréer un parfait contexte (quoique surpeuplé) de "wing" du secteur G-1 à Orsainville...? A-t-on toujours besoin de déluges ou de verglas pour faire sortir le "génie" québécois du bocal?

Enfin, pour parer aux cafouillages, aux turpitudes et aux dérapages de la Sécurité publique, nous faisons maintenant nôtres les demandes de garanties formulées récemment par les groupes de défense de droits au Québec (4), et nous appuyons sans réserve toutes les actions que croiront bon mener les gens du Comité de surveillance des libertés publiques mis sur pied par la Ligue des droits et libertés. Les actions menées par de tels groupes, de tels comités, nous semblent un peu plus rassurantes pour l'esprit, que les comités bidon ou les caméras spectacle du ministre Ménard.

1. Un reportage de "The Gazette", repris par le Journal de Québec à l'automne, où l'on comparait les conditions d'incarcération de Karla Homolka à Joliette, à celles d'un Club Med. On parlait alors de Club Fed.
2. Selon les statistiques du Service correctionnel canadien.
3. Le Groupe de défenses des droits des détenu-e-s de Québec et l'Office des détenu(e)s de Montréal.
4. Nous faisons entre autres, allusion aux demandes formulées par le GDDDQ et publiées dans la page frontispice de notre dernier numéro (1e février 2001).



Dossier G20
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Très beau dessin: des oiseaux s'unissent pour couper une cloture de métal, sur fonds bleauté de la ville de Toronto.
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