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L'ÉCONOMIE SOCIALE : UN OUTIL AU SERVICE DES RICHES

vieuxcmaq, Mardi, Février 13, 2001 - 12:00

Comité populaire Saint-Jean-Baptiste (compop@qc.aira.ca)

Québec, 13 février 2001 - Dans le cadre de la conférence L'économie sociale et lutte contre la pauvreté organisée aujourd'hui par le Centre Saint-Pierre, Anim'action et le Collectif régional de réflexion sur l'économie sociale (CRESQ) à la " Maison de la coopération ", le Comité populaire Saint-Jean-Baptiste tient à exprimer de nouveau sa dissidence face à la logique de l'économie sociale :

Le pourquoi de l'économie sociale

Pour " surmonter l'écart croissant entre les demandes adressées à l'État et sa capacité d'y répondre ", problème posé par la Banque Mondiale dans son document de 1997 L'état dans un monde en mutation, il existe deux visions des choses : la première, celle prônée par le Comité populaire Saint-Jean-Baptiste, consiste simplement en une redistribution de la richesse qui passerait par une réforme de la fiscalité (abolition des privilèges fiscaux des mieux nantis, taxation accrue des entreprises, etc.) de façon à financer adéquatement des services publics tout en les démocratisant. Cette vision exigerait, par exemple, la réduction des multiples abris fiscaux qui permettent à nos industries et banques de se soustraire plus que jamais à leurs obligations sociales. Un choix logique pour quiconque aspire à réduire l'écart entre les riches et les pauvres, à tendre vers une véritable justice sociale. Malheureusement, la Banque Mondiale n'étant pas contrôlée par des gens particulièrement pauvres, celle-ci préconise plutôt une autre solution. Une solution qui consiste " à faire accepter à la société une redéfinition des attributions de l'État, [...] fondée sur un effort accru pour alléger sa charge, en associant les citoyens et la collectivité à la fourniture des biens publics essentiels. "

Le gouvernement du Québec s'est rangé d'emblée derrière l'option de la Banque Mondiale. Une option qu'il nomme " économie sociale ", récupérant par le fait même une lutte menée il y a quelques années par les groupes de femmes (belle façon de nous faire avaler un concept néolibéral en l'associant à un terme d'origine progressiste). Bref, l'économie sociale n'est rien d'autre qu'une des composantes de cette politique beaucoup plus large qui vise à démanteler le plus possible l'État québécois. D'un côté, on cède aux gros investisseurs les secteurs rentables de nos services publics et de l'autre, on laisse aux " exclus " le soin de gérer les secteurs ne pouvant entrer dans la logique du marché. Si on prend pour exemple les conséquences du virage ambulatoire sur notre système de santé, cela donne d'un côté les " tests de résonance magnétique à 300 $ le traitement " pour l'industrie privée et de l'autre le " maintien à domicile " géré par les travailleurs - surtout les travailleuses, en fait - de l'économie sociale.

À qui profite le démantèlement des services publics ?

De fait, les gros investisseurs n'ont de cesse de réclamer aux États de nouveaux marchés pour investir. Il s'agit là d'un mouvement mondial, causé par la sursaturation des marchés conventionnels (et l'accord qui se négociera au Sommet des Amériques n'est qu'un des multiples exemples illustrant cette tendance). Le démantèlement des services publics est donc une des façons qu'ils ont choisies pour créer ces nouveaux marchés. Même que les fameuses crises financières des États - dette et déficit trop élevés - avec lesquelles on nous a tant rabattu les oreilles n'auront été créées artificiellement que pour mieux justifier le saccage actuel de nos acquis sociaux.

Cela dit, un État ne peut donner tout ce qui est rentable aux investisseurs tout en gardant à sa charge les secteurs coûteux (surtout pas s'il réduit au même moment les impôts !). C'est à ce moment précis qu'entre en jeu la logique de l'économie sociale qui permet de refiler aux pauvres les secteurs n'offrant pas de réelle possibilité de profits. Et qui plus est, s'ils n'en veulent pas, c'est de force qu'on les obligera à gérer leur propre misère avec les programmes obligatoires d'intégration à l'emploi pour l'aide sociale, l'imposition de " priorités gouvernementales " sous menace de couper les vivres pour les groupes communautaires ou encore en laissant des problèmes sociaux grossir (itinérance, violence, suicide, etc.) jusqu'à ce que des " aidantes naturelles " ou des bénévoles les prennent en charge.

Quel type d'emploi offre l'économie sociale ?

Un secteur non rentable ne peut offrir des emplois de qualité que s'il est largement subventionné. Or, les entreprises d'économie sociale doivent s'autofinancer dans les trois ans suivant leur mise sur pied ! L'économie sociale n'a donc à offrir, outre de très nombreux postes de bénévoles, que des emplois précaires, largement sous-payés, sur appel, sans avantages sociaux et, le plus souvent, sans les ressources nécessaires pour mener vraiment à bien ses tâches.

Malheureusement, peu de chiffres sont disponibles sur la question (on ne se demandera pas pourquoi...). On sait néanmoins que dans le secteur de l'aide domestique qui constitue 104 des 332 emplois créés par l'économie sociale entre 1996 et 1999 pour la région de Montréal, " les employé(e)s gagnent entre 7,25 $ et 8,90 $ de l'heure [...], la moitié d'entre eux-elles travaillent à temps partiel en raison d'un sous-financement des entreprises [...], de la concentration des heures réclamées par les client(e)s... " (Bousquet, Recto Verso, 2000, p.23).

Bref, des conditions de travail ridicules et indignes des beaux principes dont se réclament les CLD ou le Carrefour régional de l'économie et de l'emploi (CRÉECQ), deux des créatures se chargeant de mettre en place l'économie sociale. De plus, pour assurer cet autofinancement, les entreprises d'économie sociale devront nécessairement tarifer des services qui étaient offerts autrefois gratuitement. Ainsi, ce ne sera pas au gouvernement mais bien aux travailleurs et travailleuses de l'économie sociale d'assumer la colère des bénéficiaires ! Il s'agit là d'une forme particulièrement raffinée de contrôle social permettant au pouvoir de se dégager de ses responsabilités tout en divisant pour mieux régner.

Soulignons aussi qu'à l'origine de ce passage à l'économie sociale, ce sont en grande majorité les postes syndiqués et protégés occupés par des femmes qui sont coupés (notamment dans le réseau de la santé). Par la suite, que ce soit dans le milieu communautaire ou à la maison, ce sont à nouveau des femmes qui reprennent le boulot, cette fois pour des salaires de misère ou bénévolement. Il s'agit donc d'un recul impressionnant pour les femmes et qui se fait - nos dirigeants ne manquent pas d'ironie - sous une appellation usurpée de leur propre lutte.

Et n'oublions pas non plus que grâce à l'économie sociale, de nombreuses coopératives et associations d'entraide voient leur mission complètement dénaturée du fait qu'on leur impose d'autres priorités que les leurs.

Pour sortir de cette logique

Pour toutes les raisons que nous venons d'évoquer, le Comité populaire tient à réaffirmer qu'il ne croit pas à l'économie sociale et qu'il considère celle-ci comme un outil favorisant fortement le recul actuel de l'ensemble de nos droits sociaux. Bien que respectueux et solidaire d'un grand nombre de gens qui y œuvrent, nous refusons catégoriquement de collaborer à l'implantation de ce système et prendrons tous les moyens à notre disposition pour le contrer. Ce qu'il nous faut, ce n'est pas un tiers secteur sous-financé et soumis aux diktats de l'État ou du marché mais bien un réel service public, possédant des ressources adéquates, démocratisé et géré par les principaux concernés : ceux qui y travaillent et l'utilisent.

Enfin, dans un contexte où le gouvernement annonce des surplus budgétaires, nous pensons plutôt que le mouvement communautaire doit s'unir plus que jamais pour réclamer un réinvestissement massif et immédiat dans tous les programmes sociaux, une augmentation substantielle du salaire minimum ainsi qu'une taxation sérieuse des grandes entreprises. De même, nous devons continuer d'exiger une augmentation du financement des groupes communautaire dans le respect complet et inconditionnel de leur autonomie.

N.B. Les idées exprimées dans ce communiqué de presse nous été amenées par des gens provenant de divers groupes communautaires. Malheureusement, la crainte d'avoir à subir les contrecoups politiques et financiers de cette prise de position font que le Comité populaire Saint-Jean-Baptiste est ici le seul signataire et porte-parole. Cette perte de l'expression critique de certains groupes - de leur liberté de parole - nous apparaît aussi comme un des effets dramatiques de ce " partenariat " avec l'État inhérent à l'économie sociale. Un constat qui remet en cause jusqu'à la démocratie de notre société.



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