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La globalisation de la conscience

Daniel Minville, Vendredi, Décembre 16, 2011 - 21:30

Daniel Minville

Certains biens pensants cherchent le post-humain ou déclare la fin de l'histoire. Pendant ce temps on globalise l'économie, les cultures, la morale et le politique. Malgré cette haute voltige, des millions de gens vivent avec leurs tripes et entrent tout de même, sans qu'ils ne s'en rendent compte, dans cette globalisation. La conscience humaine aussi se globalise, avec les conséquences qui s'en suivent.

On nous rabâche les oreilles avec la globalisation sous ses formes économiques, politiques ou culturelles, fort probablement avec raison. Mais pendant tout ce temps, nous ne réfléchissons pas aux effets que cette globalisation peut avoir sur la conscience humaine, sur nos façons de penser, ressentir, réagir et interagir au quotidien. Cela n’est pas banal, car la globalisation générale de ce qui touches l’homme change l’homme, il apprend à s’adapter avec et à travers cette globalisation. Les psychanalystes parleront de globalisation de l’inconscient : oui, La globalisation se glisse dans notre subconscient comme une publicité de boisson gazeuse ou l’odeur de la tarte aux pommes. Malheureusement, la majeure partie de la population n’en a aucune notion et c’est bien là toute la subversion de cette globalisation. Comment s’articule cette globalisation de la conscience ?

La pensée globale, voire totalisante, est inhérente à la conscience de l’homme. Sa volonté de vouloir tout englober ne date pas d’hier. Avant même que nous sachions que la terre est une sphère, certains biens pensants se l’imaginaient comme une sphère parfaite où seule la parcelle de terre connue était habitable. Il y eut, parmi les développements de la pensée globale, la découverte du « Nouveau Monde », puis la circonvolution de la terre. Et puis ? L’homme a levé la tête, Dieu est mort, et l’homme a voulu rendre visite à son cadavre dans les nuages et au-delà. En cinq cents ans, la conscience en a eu pour son compte. Les parenthèses qui englobaient son petit environnement se sont vues repoussées encore et encore, c’est-à-dire que ce que l’homme entendait sous le concept de “monde” grandissait toujours plus. Ce qui était à l’extérieur du monde connu passa systématiquement à l’intérieur. La désillusion de plusieurs fit passer le monde de la conscience européenne d’un espace créé par une magie divine à un espace absurdement silencieux. À ce silence, il fallait répondre de soi et s’identifier face à ce “nouveau monde”. Les frontières de la situation globale ainsi définies, un retour sur soi était requis, l’homme était libre et apte à créer et à en découvrir plus sur son monde. Alors que les parenthèses ne pouvaient plus rien contenir de plus grand, maintenant qu’il n’y a plus d’extérieur au monde, autant travailler pour conserver le peu que nous avons.

Il faut faire un bond dans notre situation globale. La globalisation de la conscience n’est pas à son terme : elle n’est pas global, mais elle se globalise. Trop de gens n’ont pas connaissance des différentes souffrances dans le monde. Si la globalisation nous rend responsables des souffrances d’outre-mer, elle nous rend tout aussi aveugle des souffrances locales, et vice versa. Les médias populaires veulent tout toucher et tout faire voir et ne vont pas à ce qui nous semble essentiel. La manipulation de l’information va bon train autant sur le choix de la nouvelle à montrer qu’au choix des nouvelles à ne pas montrer. Le contrôle de l’information est la meilleure façon de dresser l’homme. Au-delà des banalités du box-office et de la “pop-business”, les feuilletons télévisés et les magasines à sensations n’ont qu’une chose en tête : la popularité. Nous sommes à une époque où l’information a plus de valeur que la connaissance, l’information est même une forme de connaissance. Le bavardage ne touchant plus à la connaissance, mais à l’information concernant les cultures populaires. Ce bavardage impossible touchera des sujets aussi large que la météo, le pathético-dramatique ou la statistique.

À l’image de Dieu, la conscience globalisé est partout dans son monde et au même moment. Nous avons donc créé Dieu à notre image. Nous ne vivons plus notre monde comme nous le vivions il a un demi millénaire et plus. Le temps ne se calcule plus de la même façon et tant même à disparaître pour laisser place à l’immédiateté. À notre ère de l’immédiateté, tout est à notre portée, il n’y a donc aucune raison pour ne pas agir. On se surprend de l’individualisme ? Il n’y a pas de quoi : nous sommes très au fait de la quantité d’autres petites consciences comme la nôtre qui, elles aussi, n’ont aucune raison pour ne pas agir. Là se trouve le grand paradoxe de la globalisation : tout voir et tout savoir pour être plus au courant de la situation globale, mais en être submergé. Heureusement, nous sommes quelques milliards sur la planète et les possibilités d'associations sont extrêmement nombreuse, ce n’est donc pas la quantité de personnes qui manque pour aider son prochain. Nous nous sentons responsable de la misère dans la rue et de la misère que nous voyons à la télévision et qui est pourtant à des kilomètres.

Comment réagit-on ? Voilà la réaction populaire : puisque la vitrine sur la situation globale donne peine à voir, donnons pleine vitrine à ce qui distrait et oublions un instant toute cette misère. Puisque nous sommes tirés par le remord de ne pouvoir agir de façon efficace, abreuvons nous de fiction. Certes, la télévision, à ces balbutiements, fut un bel outil de globalisation de la conscience. Aujourd’hui, internet est l’outil par excellence, en plus rapide et efficace. Tout voir, tout savoir et cela immédiatement. Plus de distance temporelle entre la volonté et sa réalisation. Constamment, incessamment, nous sommes branchés sur notre monde. Pour nous détendre, nous nous coupons du monde. Le divertissement n’a rien de mal en soi, au contraire, mais nous faire oublier la situation globale au profit d’un divertissement mettant à profit l’absurde de cette même situation globale, c’est pousser les choses assez loin. Tout ça comme si de rien n’était. En effet, ce désintéressement du monde semble aller de soi, comme il va de soi qu’il y a des gens qui meurent de faim dans le monde, qu’il y a des opprimés, qu’il y a de la corruption, etc. Pourtant, il n’en est rien : de tout cela, rien ne va de soi. Tout ce qui va de soi, c’est que nous laissons cette souffrance aller de soi.

Dernier point à aborder, et non le moindre : les façons de vivre le monde s’aplanissent. Avec la disparition lente des religions, sinon leur dé-marginalisation, ainsi que la propagation des cultures mondiales aussi nombreuses que diversifiées, tout ceux qui ont accès au monde immédiat par nos médias populaires tendent à vivre le monde à l’unisson. De façon viscérale, c’est-à-dire émotionnelle, les populations télévisées tendent à se ressembler dans leur ensemble jusque dans leur tripes. De bavardages en bavardages, les avis se croisent, les idées se côtoient et se mélangent. Certaines civilisations peinent à se retrouver dans cette globalisation. Que l’on prenne seulement la Russie d’aujourd’hui. La recherche d’une nouvelle identité leur est interdite, forcé d’oublier le passé et n’aillant pas de choix pour le futur. Est-ce que la globalisation de nos consciences a pour effet de diluer notre identité dans la situation global du monde au profit d’un individualisme nécessairement sans objet ? Nous laisserons la question en suspend. Soulignons simplement qu’il y a tout de même de ces gens qui ne se laissent pas abuser par l’effervescence et la foison de notre monde. La globalisation exaspère tout autant qu’elle ramollit. Si l’exaspération en fait bouger plus d’un, la majorité reste encore ramollie. La globalisation encore à venir saura-t-elle plus exaspérer que ramollir ? Nous ou les générations à venir le saurons bien. Pour le moment, il est de notre devoir d’en réveiller un maximum.



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