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Police à mort

Anonyme, Jeudi, Juin 9, 2011 - 12:06

Montréal - 7 juin 2011 : Deux morts : un sans abri malade et agité qu’ils connaissaient parfaitement et un passant qui par nature passait, abattus par 4 policiers sous une pluie de balles, dans une rue fréquentée autour de l’UQAM.

L’un abattu sous l’effet d’une «nécessité impérative» (1 type malade devant 4 policiers), et l’autre par pure distraction sans doute ; tout cela va sans dire car l’enquête - qui durera plusieurs années, les meurtres de Freddy Villanueva, et ceux des 40 personnes tuées en 20 ans (1987-2006) explicitent bien la tactique juridique et policière : faire durer et oublier, payer éventuellement en dernier recours, mais blanchir les agents à tout prix –l’enquête donc, prouvera que trois policiers sur quatre avaient eu raison de tirer tous ensemble sur un gars de la rue (armé seulement d’un couteau) qu’ils pouvaient dominer par la force et le nombre.
Pour Mario et le passant (Patrick Limoges), la morgue, pour les 4 policiers des soins pour choc nerveux. On ne refuse pas un baiser lorsqu’on aime.

Sans doute aussi les marques d’affection et de compréhension des corps policiers, de leurs proches, les dévotions de leurs chiens, l’adoration des enfants, sans oublier la protection de leur syndicat et quelques jours de congés pour se reposer après une telle réussite dans ce sport méritoire : le tir au sans-abri. On en pénalisera peut-être un, celui qui a compromis l’élégance des nombreuses balles qui visaient la poitrine de Mario et non ses jambes par exemple. Il faudra identifier le désarroi terrible de la balle perdue, égarée jusque dans un cou mystérieux et muet. Vous verrez que cette balle perdue fera taire la clameur vaine des proches de Patrick ou de Mario mais pas la pitié hypocrite des policiers du SPVM à commencer par son chef, Marc Parent, dont le communiqué animé d’une sensibilité de pierre, éblouit par la cruauté d’une parole invoquant la technique, balayant toute compassion minimum. Il faudra s’en souvenir !

Notez qu’ils doivent déjà penser à combien cette affaire va leur coûter en milliers de dollars. Avec l’argent, le meurtre disparaîtra de leur horizon et la pitié sera mise en délibéré puis monnayée par leurs avocats. Et tout recommencera quelques rues plus loin.

Pourtant le dilemme policier ne devrait pas être de s’acharner sur quelqu’un qui est déjà dans une situation désespérée ou d’être mis en déroute par un type muni d’une arme blanche. Contrôler, ne pas céder à la panique, appartient à une dimension individuelle et humaniste qui fait totalement défaut à l’enseignement des techniques policières (!) qu’on diffuse aux aspirants policiers (mais qui peut bien vouloir être flic … ?), si enseignement il y a. Après tout leur métier consiste précisément, en principe, à enrayer ou à dominer les causes de violence et en dernier recours à utiliser la fuite en avant des armes. Mario Hamel était bien connu de la police de son quartier ; de plus, il était fort abimé par la vie ; ses problèmes de santé mentale et sa déficience sociale auraient du être traités par des organismes compétents et il aurait du être suivi de beaucoup plus près. Son attitude ce jour-là relevait clairement d’un diagnostique de santé mental.

Échecs répétés sur toute la ligne pour l’administration. Les avertissements du RAPSIM et des organismes communautaires sur les dangers et les difficultés de l’itinérance partout au Québec, sur la politique aveugle des tickets délivrés par les policiers pour tout un tas de raison, le harcèlement policier dans plusieurs quartiers, mêlés à l’absence de volonté politique, de budget, d’encadrements, de programmes adaptés face à l’augmentation de la misère sociale, laissent place à la seule répression ciblée et de plus en plus brutale et incontrôlée. C’est le policier qui décide si le suspect doit mourir ou pas, il suffit d’une balle et c’est terminé, ce qui en soi, est bien plus simple.

Mario Hamel incarnait la « norme » d’une misère sociale en pleine expansion, grandie dans l’indigence et l’exclusion, tiraillée entre violence, petits délits et rémission momentanée, sans travail, vivant d’expédients, coincée dans ses problèmes de santé par une prise en charge médicale et psychologique insuffisante. Inutile de le tuer pour le savoir, le tissu communautaire du Centre-sud et d’Hochelaga-Maisonneuve regorge d’itinérants avec des histoires similaires à celle de Mario. Pour l’instant ils sont bien vivants, mais jusqu’à quand ? Ce sont autant de cibles qui croisent des nerveux de la gâchette à toute heure, des brutes transformés en publicités syndicales, casquette rouge aux armes de la Fraternité entre les brancards de leurs oreilles.

Pourquoi tuer Mario ? La peur de la menace ne tient pas ou alors il faut que ces 4 policiers changent de métier. Une ceinture noire de Karaté ou de Judo aurait immobilisé Mario en 3 secondes là ou 4 policiers lui prennent la vie comme à plaisir, comme s’il fallait prouver que certaines lignes d’exaspération franchies à cause de la maladie et de la misère, c’est le mur de balles assuré. La police montréalaise montre tout simplement qu’elle ne protège personne mais au contraire prolifère à la périphérie de la population, tout en étant grassement payée par elle, en tuant dès qu’elle sort de la routine de la circulation, mais jamais à travers les coups portés à la Mafia (les risibles résultats de l’opération Marteau par exemple), sans doute trop dangereuse pour ses petits soldats. La qualité de leur formation se révèle ; elle est fondée sur la peur de l’autre, sur le profilage racial et social, sur la condamnation et la seule répression, sur le meurtre, fragments de prairies où l’on peut brouter et battre du sabot en prévoyant d’utiliser au plus vite son Walter P99.

Les campagnes de rapprochement avec la population initiées par le SPVM vont donc dégringoler en chute libre…

Tuer est-elle une subtile et délicieuse tactique apprise à l’école des techniques policières? Comment en effet maîtriser un sans-abri si ce n’est en le criblant de balles ? Voilà une belle question d’examen final ! On tire dessus ? Ben oui sans le rater c’est mieux. Sans disperser ses munitions c’est mieux encore ! On s’en veut de ne pas y avoir pensé. On croyait qu’il existait une formation qui permettrait de contrôler des situations de violence sans avoir à tuer. On s’aperçoit qu’il n’en est rien. Les policiers réagissent comme ces membres de gang qu’ils dénoncent à satiété. On tire pour tuer d’abord, on discute ensuite entre gens du même poste, devant une bière glacée, le pied posé sur le corps pour la photo du jour, pour le trophée sur la cheminée.

Comprenons la situation, chaque passant est menacé ; on savait que chaque geste de rébellion ou la marginalité sociale s’exposait à la peine ultime mais le cours de la guerre policière en cours a prononcé son jugement : tous coupables. Aucune considération ne peut arrêter le cours de cette guerre qui ne dit pas son nom. Pourquoi se gêner. L’impunité leur est acquise. Et pas un élu, pas un gouvernement ni même un syndicat (vous avez dit quoi ?) ne tente de contrôler ceux qui immolent tranquillement leurs marginaux et quelques citoyens par an. Déni démocratique ? Partant du point de vue de Mario Hamel et de Patrick Limoges, on dira que la démocratie est finie, terminée. Milice syndicale toute puissante, la Fraternité des policiers et policières de Montréal, à force d’amnisties et d’agents blanchis par la justice à partir des enquêtes de ses propres syndiqués de la SQ, peut garantir discrètement à ses membres une totale impunité en cas d’homicides. L’enquête sur l’assassinat de Freddy Villanueva a largement démontré le rôle occulte et nocif pour la vérité de ce syndicat qui prend tout en main dès l’annonce de l’homicide. Ses affiliés sont tout à la fois enquêteur, témoin, accusateur et au final souvent juge (les inébranlables commissions de déontologie) ; le vent de la remise en cause n’effleure pas un seul instant la police, tous corps confondus, puisque l’indépendance de la justice, vieux rêve antique, s’évapore devant le trône de cette Fraternité qui porte si bien son nom.

Le lendemain des meurtres La presse (8/06/2011), annonçait qu’un membre d’un gang de rue prenait 8 ans de prison « pour avoir fait feu en plein jour devant une vingtaine de témoins au cœur d’un secteur populaire de Montréal, sans toutefois atteindre sa cible ». On attend de voir, mais la comparaison est intéressante car aucun uniforme, encore moins avec les stickers de la Fraternité, ne devrait être laissé libre, en état de massacrer aussi délibérément un sans abri alors qu’il existe des procédures particulières adaptées à ce genre de situation, procédures, faut-il le préciser, inutilisées et délibérément oubliées dans ce cas comme dans beaucoup d’autres.

Mario et Patrick seront - quant à eux - disséqués par l’Institut médico-légal comme s’ils n’avaient pas compris la fin du voyage. Punis encore une fois, tout s’effondre, vie de misère, pas de cachette possible, et on prend place une étiquette à l’orteil dans la longue nuit des faits divers. Tout s’effondre, on est tué par ceux qu’on n’attendait pas, des barbares en uniformes qui en d’autres temps auraient été brigands.

On comptera les balles extraites de leurs corps, on se penchera longuement sur les trajectoires avec une forme de détachement qui les surprendrait s’ils n’étaient déjà morts ; on constatera devant leurs corps ouverts et sanglants, l’expression de leur mort parfaite et rien ne les exposera plus aux rêves, aux visages aimés, aux autres détestés, plus de souffle et plus de policiers qui tuent. La mort méprise le réel, c’est bien connu. Les deux corps éventrés, nus, n’auront plus rien à dire, leur existence reculée à l’infini. Étendus sur une paillasse de médecine légale, regard en l’air, ils auront de la peine à démontrer qu’ils avaient raison et que les policiers tueurs avaient torts de vouloir les tuer en faisant pleuvoir en eux une grêle de balles comme des épines mortelles. On mettra dans leurs plaies des mots sans contact direct avec leur vie, avec leurs espérances et leur évocation servira d’artifice et d’exemple à une population aussi lointaine qu’indifférente.
4 autres victimes sont à déplorer : Les 4 policiers ont eu un choc nerveux après avoir criblé de balles Mario Hamel, et égaré un petit bout de ferraille raidi dans le corps vivant bientôt mort de Patrick Limoges. Un choc nerveux c’est grave, plus grave que les droits limités de ceux qui sont déjà morts. Quelques journalistes ont noté que « les policiers ont eu recours 4 fois à leur arme de service dans la même semaine de mars 2011 » – mais « il fait chaud, le temps est à l’orage, on sue beaucoup, on a tous des problèmes, les nerfs à fleur de peau, faut pas nous emmerder ». Le monde policier est un monde de néant moral et de vanité, où ils se croient autorisés à considérer quiconque n’est pas dans la norme comme une ordure qu’il faut balayer pour purifier la surface de la terre. Pour eux, c’est un problème purement technique et les balles terminent le travail.

Quelqu’un pourrait affirmer de manière parfaitement irresponsable que la violence policière fait tôt ou tard justice des lois pour justifier des assassinats commis par ses membres. Cela ce serait même vu en Amérique latine, dans les ex. pays communistes, mais jamais, dit-on, au Canada. Pourtant Yves Francoeur, président de la Fraternité, a raison d’affirmer que la police est un organisme paramilitaire. En effet ces paramilitaires, en toute logique, mènent une guerre sociale, une guerre à la dissidence et à la marginalité, une guerre sale, une guerre sans règles, sinon de ne pas se faire prendre comme il en va de toutes les armées en campagne ; n’oublions pas que les lois de l’état sont un moyen d’oppression qui justifie la tyrannie mais aussi l’existence des milices à son service ; les différents corps policiers québécois et canadiens n’agissent pas autrement et la prolifération des arrestations de masse de ces dernières années et la criminalisation de toute contestation en sont des preuves quotidiennes. Comment ne pas être d’accord avec l’état ? Impossible ! Il faut donc accepter ses mœurs et ses abus, et l’immolation de quelques citoyens parmi les plus faibles ou les plus anonymes n’est pas à récuser mais au contraire à considérer comme l’expression d’une logique parfaite.

À l’heure où la politique se fendille de partout, doit-on reprocher à la police de se comporter en milice privée ? L’administration municipale n’a aucun pouvoir sur elle. L’état, gangrené par la corruption de ses élus, plie plus souvent qu’à son tour devant les menaces de grève des policiers. Il en est de même en Colombie, au Mexique, au Guatemala. Mais on a pu voir récemment en Tunisie que les policiers sont les premiers à payer leur brutalité et leur impunité en cas d’agitation sociale et la rancune dans ces cas-là est tenace ; la population radicalisée, les groupes politiques ou révolutionnaires se retournent immédiatement contre eux car ils sont les garants de l’injustice sociale et des inégalités, des abus de l’ordre dans un sens qui ne va jamais vers celui de la liberté.

Les mouvements sociaux sont imprévisibles, renaissant là où on les pensait terrassés, et les arrestations de masse québécoises et canadiennes n’empêcheront jamais personne d’être authentique et sincère et las de cette police qui fait reposer son destin sur son impunité.

Le silence doit-il cautionner les crimes policiers et leur impunité ?

Titusdenfer
08/06/2011



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