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Activisme et traumatisme: de la victimisation à la résilience

CMAQ via Mic, Lundi, Juillet 5, 2010 - 21:01

Comment gérer vos réactions psychologiques à la brutalité de la police et d'autres...

Une chose très étonnante chez les activistes est que nous nous exposons délibérément à la violence lorsque nous pensons que c'est nécessaire. Ce qui est parfois tout aussi étonnant, c'est le peu que nous savons sur les effets psychologiques de cette violence. Nous devons nous y préparer et apprendre à nous soutenir mutuellement dans les conséquences physiques et émotionnelles du traumatisme.

 

Trois réactions au traumatisme

Les réactions qui peuvent survenir après des expériences directes ou indirectes de brutalité sont appelées « Stress post-traumatique », ou PTS (en anglais). Elles peuvent être de trois types :

1. Revivre l'événement traumatique
cauchemars, flashbacks, souvenirs fréquents de l'événement, sentiment d'envahissement de la conscience...

2. Refoulement / évitement
pertes de mémoire, auto-médication (alcool, drogues...), isolation, retrait sur soi-même, évitement de tout ce qui pourrait rappeler l'expérience traumatisante...

3. Excitation anormale
Insomnie, irritation, susceptibilité, accès de colère, explosion émotionnelle, attaque panique, peur, hyper vigilance, difficultés de concentration et de réalisation de tâches normales...

Ces réactions sont typiques des expériences extrêmes. Nombreux sont ceux qui les ont vécues et surmontées. Les gens réagissent aux expériences traumatiques de différentes manières et avec différentes intensités. Ils ont également des besoins différents en termes de soutien. Vous pouvez être traumatisé(e) par votre propre expérience, en étant témoin, mais également en dehors de l'action, en connaissant la victime, ou simplement en entendant parler de l'expérience traumatisante.

 

Deux éléments essentiels à la guérison :

1. Restez quelques temps dans un endroit calme, dans lequel vous vous sentez en sécurité et avec des gens autour de vous en qui vous avez confiance et qui peuvent s'occuper de vous.

2. Travaillez sur votre expérience traumatique. Mettez des mots sur ce qui s'est passé. Donnez les détails à un(e) ami(e). Écrivez ce qui s'est passé. Exprimez-vous de la manière qui vous convient.

Pour environ 70 % des gens, ces symptômes disparaissent progressivement en quatre à six semaines. Mais s'ils perdurent, on parle de « syndrome de stress post-traumatique », ou PTSD. Si vos réactions ne se calment pas après cette période, recherchez une aide professionnelle (qui peut de toute façon être utile si la réaction dans les premières semaines est forte).

Il se peut que le « PTSD » survienne seulement plusieurs mois, voire plusieurs années après l'expérience. Sur le principe, il s'agit d'un dysfonctionnement du traitement (notre système ne traite pas l'expérience traumatisante). L'expérience est bloquée, elle continue donc à blesser. Il y a différents types de thérapies et traitements. Le but est d'intégrer l'expérience traumatisante dans votre vie. Elle ne disparaîtra pas, mais la douleur diminuera.

 

Réactions possibles après une expérience traumatique

– Images et souvenirs qui reviennent en mémoire

– Flashbacks (l'impression de revivre la situation), cauchemars

– Dépression, impossibilité de profiter de la vie, sentiment d'être seul(e) et abandonné(e)

– Sentiment d'être engourdi(e), ailleurs

– Retrait, évitement des interactions sociales, auto-isolement

– Changements dans les habitudes alimentaires, de sommeil ou sexuelles

– Douleurs d'estomac, nausées, tension musculaire, fatigue

– Peur, anxiété, hyper vigilance, attaques paniques, phobies

– Impression de ne jamais trouver de repos

– Culpabilité, honte, auto-accusation, regrets

– Incapacité à poursuivre sa vie comme d'habitude, à faire des plans ou prendre des décisions

– Irritabilité, rage, explosions émotionnelles, pleurs incontrôlés, douleur intérieure

– Pensées suicidaires, sentiment que la vie n'a pas d'intérêt

– Doutes concernant l'activisme politique et les relations avec les amis

– Revivre d'autres expériences traumatiques passées

– Plus d'espoir en l'avenir, impression que cette phase ne finira jamais

 

Ce que vous pouvez faire pour vous-même

– Rappelez-vous toujours : vos réactions sont normales et vous pouvez obtenir de l'aide ; c'est une phase pénible, mais vous irez mieux.

– Immédiatement après l'expérience, trouvez un lieu dans lequel vous vous sentez en sécurité, et prenez soin de vous. Ceci peut aussi signifier autoriser d'autres personnes à prendre soin de vous.

– Ne vous isolez pas. Tournez-vous vers vos amis et dites-leur ce dont vous avez besoin.

– Tournez-vous vers un professionnel si vous en ressentez le besoin.

– Éliminez l'adrénaline encore présente dans votre corps : faites une petite balade, en marchant, en vélo ou en footing, faites des exercices.

– Prenez votre temps pour guérir, soyez patient(e) avec vous-même et ne vous condamnez pas pour vos sentiments et vos réactions. Les plaies intérieures demandent du temps et de la patience pour guérir, comme les plaies physiques.

– Vous pourrez vous sentir mal à l'aise si vous pensez que les autres gèrent une expérience traumatisante mieux que vous. Mais rappelez-vous que le gens sont différents et réagissent différemment. Il n'y a pas de « bonne » manière de réagir. (Si vous avez vécu d'autres expériences traumatisantes, y compris des abus durant l'enfance, vous pourrez subir des réactions plus fortes.) Les personnes plus sensibles auront souvent des réactions plus fortes. Ce n'est pas un signe de faiblesse que de ressentir de la douleur lorsque l'on a été agressé(e).

– Vous pourrez vous sentir coupable de ce qui est arrivé et vous accuser vous-même. Rappelez-vous : ce n'était pas votre faute ! Les agresseurs sont les coupables !

– Souvent, la famille et les amis ne savent pas comment vous aider. Dites-leur ce dont vous avez besoin et ce dont vous n'avez pas besoin.

– Si vous pensez : « Je n'ai pas le droit de me sentir mal – ce qui m'est arrivé n'est rien comparé à X », rappelez-vous que vous avez vécu quelque chose de grave et que vous avez le droit de vous sentir ainsi. Si vous vous sentez mal, c'est parce que l'expérience a été mauvaise pour vous. On ne peut pas comparer les brutalités. Si vous acceptez votre condition, vous irez mieux plus vite.

– L'évitement et le refoulement ont des effets dommageables à long terme et vous gêneront dans votre vie. L'auto-médication avec l'alcool et les drogues pourra vous sembler efficace sur le moment, mais elle a des effets négatifs à long terme.

– Les élixirs floraux du Docteur Bach et l'acupuncture peuvent vous aider à gérer vos émotions. La valériane est efficace contre l'insomnie. Les massages et les bains chauds sont toujours une bonne idée. Alcool et drogues ont plutôt un effet négatif.

– Renseignez-vous sur le stress post-traumatique. Plus vous en savez, plus il vous sera facile de considérer vos réactions comme des réactions normales à des événements « anormaux ».

 

Comment aider votre ami / amie

– N'attendez pas qu'il / elle demande de l'aide. Soyez là pour lui / elle.

– Raconter l'histoire dans l'ordre chronologique, tel qu'elle est arrivée, aide le cerveau à traiter l'expérience. Encouragez avec précaution votre ami(e) à parler de ce qui est arrivé, ce qu'il (elle) a vu, entendu, ressenti et pensé. Mais ne le (la) forcez pas s'il ou elle ne veut pas.

– Le manque de soutien peut aggraver la réaction. Ceci s'appelle le « traumatisme secondaire » et il faut le prendre très au sérieux. Les agresseurs sont connus pour être brutaux. Mais si vous avez l'impression que vos amis ne vous soutiennent pas par la suite, c'est votre monde qui s'écroule.

– Les jours qui suivent l'expérience sont cruciaux. Toutes les émotions sont encore facilement accessibles. C'est le moment idéal pour parler. Plus tard, les gens se referment souvent.

– Souvent, les personnes traumatisées se retirent des activités sociales et s'isolent. Vous ne verrez peut-être plus votre ami(e) dans les parages. Allez le (la) chercher et trouvez-le (la).

– Parfois, vous aurez l'impression de vous trouver devant un mur, voire rejeté(e). Voyez-le comme un symptôme, ne le prenez pas personnellement et restez présent(e).

– Vous ne saurez peut-être pas comment aider. Renseignez-vous sur le stress post-traumatique, afin de mieux le comprendre. Demandez à la personne de dont elle a besoin, n'imposez pas vos solutions.

– Comportez-vous normalement. Montrer de la pitié ou se faire trop pressant(e) n'aide pas. Le plus important est que votre ami(e) se sente en sécurité et au chaud en votre présence.

– Ayez en tête que de nombreuses personnes ont l'air tout à fait normales après une expérience traumatique, et que les réactions peuvent survenir plus tard.

– Écoutez. Évitez de parler trop tôt, trop longtemps et trop. Nous avons souvent tendance à donner des conseils plutôt que d'écouter attentivement. Mettez-vous à sa place. Essayez de comprendre comment la personne se sent, et pas comment vous vous seriez senti(e).

– Les personnes traumatisées ont souvent du mal à demander de l'aide. Prenez les devants mais ne soyez pas pressant(e).

– Les personnes traumatisées luttent souvent pour les tâches les plus simples. Faire la cuisine, le ménage ou les courses pour elles peut être d'une aide très précieuse, tant que vous ne virez pas au paternalisme et que vous n'empiétez pas sur leur indépendance.

– L'irritabilité, l'ingratitude et la distance sont des réactions communes. Ne les prenez pas personnellement, continuez votre soutien.

– Dire « Tu devrais commencer à t'en sortir maintenant, prends-toi un peu en main » est complètement inutile. Le seul résultat probable est que votre ami(e) se sente incompris(e) et prenne ses distances.

– Important : apporter de l'aide et de l'attention peut être extrêmement difficile, pour vous aussi. Prenez soin de vous, faites des choses qui vous rendent joyeux (joyeuse). Parlez avec quelqu'un d'autre de comment VOUS allez. Obtenir du soutien pour vous-même vous aidera à soutenir les autres.

– Les bons thérapeutes peuvent vous venir en aide. Aidez la personne à en trouver un(e). Le ou la thérapeute doit avoir une certaine expérience du travail avec les traumatismes, sinon son action risque d'être inutile, voire contre-productive. Il est bienvenu que les thérapeutes soient également politiquement proches, ou du moins neutres.

 

Ce que vous pouvez faire en tant que groupe

– Si vous avez tous été impliqués dans une expérience traumatisante, prenez le temps d'en parler ensemble. Vous pouvez vous mettre en rond et parler tout à tour, afin de laisser de la place à chacun pour qu'il ou elle parle de ce qui est arrivé, où ils étaient, ce qu'ils ont vu et entendu, ce qu'ils ont ressenti et pensé, s'ils le souhaitent. La participation est volontaire et elle est plus utile si les gens ont le même degré de traumatisme ; si ce n'est pas le cas, certains participants risquent eux-mêmes d'être encore plus traumatisés.

– Vous pouvez également travailler en groupe avec un(e) thérapeute.

– Souvenez-vous : un soutien a aussi besoin de soutien. Soutenir un soutien est essentiel.

 

À propos des traumatismes

Les réactions post-traumatiques sont les tentatives du cerveau pour reprendre le contrôle sur nos vies. Nos vies dépendent de notre sentiment d'avoir une certaine influence sur ce qui nous arrive. Si ce pouvoir nous est subtilisé, nous nous sentons sans force, à la merci de la brutalité, et ceci produit le stress. Après coup, notre cerveau et notre corps tentent de reprendre le contrôle et de tirer un enseignement de l'expérience, afin d'éviter qu'elle ne se reproduise. Le cerveau rejoue donc la scène devant notre œil intérieur et essaie de l'appréhender, alors que nous essayons en même temps d'éviter tout ce qui peut être connecté à cette expérience. Nous devenons perturbés émotionnellement, car nous ne nous sentons plus en sécurité, nous nous sentons mal par rapport à ce qui est arrivé. Même l'auto-accusation est basée sur ce concept, car si c'est de notre faute, nous agirons différemment la prochaine fois, n'est-ce pas ? Nous n'avons certes pas le contrôle absolu sur nos vies, mais nos actions et pensées sont néanmoins basées sur un certain sens de puissance et d'efficacité personnelle.

Prévention

Effectuez des actions fondées. Des liens forts avec votre groupe et une confiance mutuelle vous rendront plus forts. Effectuez un tour de table des sentiments des membres du groupe, afin que vous soyez conscients des besoins et des forces de chacun(e).

Dans nos mouvements politiques

Il est vital pour nous d'être conscients de la manière dont la brutalité affecte nos émotions. La répression est dans d'autres mains, mais nous avons la capacité de gérer ses effets sur nous. La répression sera moins efficace si notre soutien mutuel est fort. Beaucoup trop souvent, le stress post-traumatique est encore vu comme une faiblesse personnelle. Souvent, le soutien est insuffisant. Il est primordial que notre culture change complètement d'attitude par rapport à ce problème. Ce que nous pouvons faire dans nos groupes, c'est créer les fondations d'une culture dans laquelle parler de la peur et des conséquences émotionnelles de la répression et des autres traumatismes ne soit plus ni tabou, ni vu comme faible, ou encore « pas cool ».

Structures de soutien

Des groupes proposant un soutien post-traumatique apparaissent dans de nombreux pays – en Allemagne, au Royaume-Uni, aux Pays-Bas, en Israël, aux États-Unis. Nous espérons qu'un réseau international de soutien post-traumatique apparaîtra un jour, à l'image du réseau Streetmedic. Notre travail actuel consiste essentiellement en de la prévention contre le stress, de l'éducation et de l'information ; nous fournissons également une aide émotionnelle d'urgence, des espaces de repos et des numéros de soutien pour les grands événements, ainsi qu'un soutien à plus long terme.

TAKE CARE OF EACH OTHER

Plus d'infos :
Activist Trauma Support :
www.activist-trauma.net
www.healingtrauma.pscap.org

Un très bon livre Trauma and recovery de Judith Hermann


Page d'info de la CLAC2010 : Soutien légal et psycho-social aux arrêté.e.s



Sujet: 
Comité de soutien psychosocial | Et mini-réflexions
Auteur-e: 
Michael Lessard...
Date: 
Lun, 2010-07-05 21:09

On m'informe qu'il y a un comité d'aide psychosociale de former à Montréal, donc je vais probablement ajouter sous peu des coordonnées.

Le voici:
Comité de soutien psychosocial de la CLAC2010
soutien.psycho.social [arobas] gmail.com

AJOUT : J'ai ajouté la nouvelle page d'aide de la CLAC2010 au bas de ce texte.

MAIS je vous rappelle que vous pouvez tou-tes publier librement ici des ressources, commentaires, réflexions personnelles, etc.


 

Personnellement, de laisser mes droits ou le droit être violé, sans offrir une réelle résistance, parce que j'étais sous la menace bien réel d'une arrestation massive et punitive de l'autobus de Québec, c'est un choc pour moi. J'ai violé mes principes par crainte de répression. Mais bon, il y a un lendemain, c'est-à-dire qu'il y a aura de nombreuses répliques juridiques et politiques à travers le Québec et le Canada.

Comme reporteur indépendant, donc non officiel et solidaire dans mon cas, je vivais évidemment dans la crainte constante de me faire frapper ou arrêter pour cause d'être altermondialiste —car les policiers donnaient parfois signe d'hésiter en voyant mon badge de médias alternatifs, parce que ça puait la répression politique sans arrêt. On vit de la colère face à ce genre de pouvoir macho de gros hommes armurés. Je suis parmi les chanceux/chanceuses ayant subi seulement les menaces et l'impuissance devant leurs pouvoirs anticonstitutionnels: je n'ai pas subi la brutalité, les insultes ni la «disparition» de mes biens.

Je remercie la vie néanmoins d'avoir évité la détention! Suite à la violence psychologique subie dans ce «centre de détention», surtout pour les gens ayant passé plus de 15 heures (genre 60 heures pour certain.es), j'estime qu'un choc ou traumatisme est totalement compréhensible et inévitable.

Michaël Lessard [me contacter]


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Très beau dessin: des oiseaux s'unissent pour couper une cloture de métal, sur fonds bleauté de la ville de Toronto.
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