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Il y a 90 ans...

PCQ, Jeudi, Janvier 22, 2009 - 19:38

André Parizeau

Il y a 90 ans, Rosa Luxembourg était torturée, assassinée et son corps était jeté dans un canal de Berlin par les forces armées allemandes, mais sa contribution, en tant que militante révolutionnaire, demeure énorme.

Si vous vous rendez au Musée du Québec, à Québec, vous ne pourrez faire autrement que de voir cette peinture de Riopel qui est en même temps un hommage à Rosa Luxembourg. Cette année marque en même temps le 90e anniversaire de sa mort. Le 15 janvier 1919, alors que la première guerre mondiale venait à peine de finir et que des millions de gens à travers le monde espéraient enfin que les choses puissent aller pour le mieux, Rosa Luxembourg était de son côté arrêtée, torturée, assassinée et son corps était ensuite jeté dans un canal à Berlin.

Décrié par les uns pour ses idées radicales de l'époque et son intransigeance, grande militante contre la guerre, féministe avant l'heure, fervente défenseur des travailleurs et des travailleuses, Rosa Luxembourg fut une des grandes figures du mouvement socialiste et communiste du début du XXe siècle en Europe. Malgré tout, c'est un personnage qui demeure assez largement inconnu au sein d'une bonne partie de la population; y compris ici. C'est bien dommage, même si cela n'est pas, à proprement parler, surprenant puisque c'est assez souvent le cas avec tous ceux et celles qui marquèrent l'apparition et le développement de ces mouvements, à cette époque.

Nous ne connaissons pas vraiment notre Histoire. La vie de Rosa Luxembourg, ce qu'elle a dit, écrit, et fait, n'en est pas moins sans un intérêt certain pour quiconque veut mieux comprendre les différences qui pouvaient alors marquer les forces de gauche de cette époque et qui, encore aujourd'hui, continuent encore à influencer certains des débats que nous pouvons avoir, toujours au sein de ces mêmes forces de gauche. Notamment lorsqu'il s'agit de parler d'alliances.

Un exemple. Encore aujourd'hui, beaucoup de gens continuent toujours à utiliser l'expression "social-démocratie" ou "social-démocrates" pour s'identifier eux-mêmes sur le plan politique, ou encore pour parler des autres ... Pour beaucoup, ce terme représenterait tous ceux et celles qui désirent plus de justice sociale. Sans plus. Ce serait à leur yeux une manière de regrouper, sous une même étiquette, tous ceux et celles qui voudraient que la richesse soit mieux redistribuée, qu'il n'y ait plus de pauvreté, etc. Pour d'autres, ces termes représenteraient une vision un peu plus restrictive et plus modérée, par rapport aux idées communistes par exemple. Bien peu connaissent en même temps les fondements de ce qu'était au départ le mouvement social-démocrate et de comment celui-ci a par la suite évolué, comment le mouvement s'est aussi fractionné avec le temps, ce qui nous différencie de la social-démocratie plus traditionnelle, etc.

Un retour sur le passé

Il y a effectivement une époque où à peu près tout le monde à gauche, tout au moins en Europe, s'identifiait à la social-démocratie et faisait partie d'un parti social-démocrate. C'était le cas de Rosa Luxembourg, mais aussi de bien d'autres leaders de l'époque, y compris Jean Jaurès, en France, de même que Lénine, en Russie.

À ce moment-là, ces différents partis sociaux-démocrates sont en même temps pas mal plus radicaux que ce à quoi ces mêmes partis nous ont habitué depuis déjà pas mal de temps. Ainsi, en Allemagne, les sociaux-démocrates appellent alors carrément à la «transformation collective du système capitaliste de propriété privée des moyens de production».

Mais la 1ère guerre mondiale allait rapidement changer cette relative unanimité de l'époque; cela fera en même temps ressortir le fait que les références programmatiques ne sont pas tout. Et pour cause. La première grande fracture fut autour de la nécessité ou non de donner, dans chaque pays, son appui aux efforts de guerre visant alors à écraser les pays de l'autre camp impérialiste. Fallait-il ou non faire passer les intérêts nationaux des uns (à ce moment-là, ceux-ci étaient clairement de nature impérialistes) par dessus la nécessité de l'unité des travailleurs et des travailleuses contre notre propre bourgeoisie ? Telle fut une des premiers enjeux des conflits qui allaient alors diviser les forces de gauche et contribuent encore aujourd'hui, dans une large mesure à créer, à l'occasion, bien des frictions. Mais ce ne fut pas le seul point de friction.

Rosa Luxembourg, qui finira d'ailleurs par être arrêtée et exécutée par les forces de l'ordre en Allemagne pour ses idées, ainsi que ses actions, -- et ce, il faut bien le dire, sous les ordres de gens qui se disaient pourtant de gauche et d'orientation plus «modérée» -- fait partie de ceux et de celles qui firent longtemps partie de ce mouvement, mais qui finirent également par s'en dissocier.

Comme bien d'autres, Rosa Luxembourg était contre toute forme de participation à la 1ere guerre mondiale. Mais elle s'érigeait également contre ce qu'elle appelait alors une "dérive" de la part d'une bonne partie de la direction du mouvement social-démocrate de l'époque. Elle en voulait en particulier à un dénommé Bernstein -- un des grands théoriciens social-démocrates de l'époque -- qui avait déclaré que "le but final, quel qu’il soit, n’est rien, le mouvement est tout". Pour Bernstein, ce qui importait le plus alors était d'amoindrir les effets du capitalisme le plus possible, sans nécessairement chercher à remettre en cause les fondements de ce même système, d'autant que la perspective d'un changement plus radical n'était pas forcément à la porte selon lui ... Rosa Luxembourg n'était pas d'accord. Pour elle, c'était du révisionnisme. Lénine non plus n'était pas d'accord. Pour elle, comme pour tous ceux et celles qui avaient un point de vue plus radical, ils ne pouvaient y avoir, à terme, de 3e voie, entre capitalisme et socialisme. D'où le slogan : "Le socialisme ou la barbarie".

Tous n'étaient pas forcément contre le fait de faire des alliances avec de tels gens, mais ils ne pouvaient concevoir que tous les socialistes en viennent à abandonner leur objectif premier, simplement parce que la situation pouvait ne pas être autant favorable.

Si la classe ouvrière doit être abordée comme «spontanément révolutionnaire», de dire Rosa Luxembourg, c’est uniquement dans la mesure où elle fait au quotidien l’expérience de la dictature capitaliste. Pour Rosa Luxembourg, le parti ouvrier ne devait pas se substituer à la classe. De l'autre côté, et en tant «avant-garde la plus éclairée et la plus consciente du prolétariat», le parti social-démocrate se devait de «devancer le cours des choses, chercher à le précipiter». Autrement dit, la social-démocratie se devait donc de porter le but final socialiste, ne pas chercher à avoir peur d'en parler; il fallait aussi analyser la société capitaliste du point de vue de la société sans classes à venir.

On notera au passage quelques points intéressants. Premier point : même après avoir quitté le parti social-démocrate, Rosa Luxembourg continuait encore, à se définir comme social-démocrate. Il faut dire que la révolution russe n'avait pas encore eu lieu au moment d'écrire où elle écrivit lignes et que le parti communiste allemand, qu'elle allait d'ailleurs elle-même créé quelques années plus tard avec Karl Liebknecht et plusieurs autres, n'existait pas encore non plus. Deuxième point : à cette époque là, on n'avait pas autant peur qu'aujourd'hui d'utiliser ouvertement le terme de «parti d'avant-garde», y compris au sein du mouvement social-démocrate. Troisième point : hier comme aujourd'hui, ils se trouvaient déjà des gens pour dire qu'il ne fallait pas nécessairement parler de nos objectifs, question de ne pas s'aliéner certaines personnes ... Comme quoi, parfois, plus cela change et plus c'est pareil ...

Rosa Luxembourg avait aussi ses différences avec Lénine, ainsi que certains autres représentants des ailes plus radicales du mouvement européen. Ainsi, elle était beaucoup plus fermée que Lénine par rapport à un éventuel appui aux luttes nationales de certains groupes nationaux vivant toujours sous la tutelle et l'oppression d'autres. Elle-même était d'origine polonaise et son objection féroce à toute idée d'une éventuelle indépendance de la Pologne (qui n'était pas encore indépendante à son époque) est bien connue.

Quand les bolcheviks prennent finalement le pouvoir au cours de la Révolution russe, en octobre 1917, Rosa Luxemburg leur reprochera d'abord certains actes jugés trop autoritaires, au point que certains y verront par la suite une critique avant coureuse des dérives ultérieures qui allaient survenir. Mais elle se solidarisera malgré tout, et à l’image de nombreux militants d’alors, avec la Révolution russe dont le « mérite » restait pour elle, d'être « impérissable ».

On notera au passage une autre grande leçon de l'Histoire, à savoir le fait que les choses ne se passent que rarement comme on le voudrait et que les choses ne sont également que rarement tout blanc ou tout noir.

Que faut-il donc faire quand les choses ne tournent pas exactement comme on avait pu l'espérer ?

Lorsque le processus révolutionnaire, amorcé en Russie, commence ensuite à s'étendre à l'Allemagne, avec la chute du Kaiser (l'empereur de l'époque) -- nous sommes alors à la fin de 1918 et la 1ere guerre mondiale vient juste de finir comme nous le disions plus haut-- les choses vont vite se précipiter. Une fois encore, cela ne se passera pas exactement et de la même manière, que certains avaient pu le prévoir. La situation semble être similaire à ce qu'elle était, il y a à peine deux ans, en Russie, et bien des gens se mettent du même coup à rêver qu'une nouvelle révolution pourrait encore voir le jour, cette fois en Allemagne. Une nouvelle République est proclamée. Non pas un fois, mais bien deux fois, et à chaque fois le même jour, soit le 9 novembre 1918 : Scheidemann (du côté social-démocrate) déclare alors au Reichstag que la « République allemande » vient de naître, tandis que Karl Liebknecht (qui deviendra avec Rosa Luxembourg quelques semaines plus tard les nouveaux leaders du tout nouveau Parti communiste) déclare, de son côté, du balcon du château des Hohenzollern, « Vive la République allemande socialiste ! ». Deux options possibles vont très vite apparaître et vont en même temps assez rapidement créer comme deux pôles; d'un côté, on retrouve en effet les sociaux démocrates, qui se disent toujours en faveur du socialisme, mais qui dans les faits prônent une ligne beaucoup plus modérée, et de l'autre les communistes. Le Parti communiste allemand (KPD) naît en même temps le 1er janvier 1919, soit quelques semaines seulement plus tard, et les spartakistes (dont sont issus aussi bien Rosa Luxembourg et Karl Liebknecht) en forment la composante essentielle. Chaque parti, y compris le tout nouveau parti communiste, possède en même temps, faut-il le préciser, une large influence et sont tout autant capables de mobiliser des centaines de milliers de personnes dans la rue.

Dans cette période de forte agitation sociale, et alors que la guerre vient juste de prendre fin, la social-démocratie plus modérée, dirigée par un dénommé Ebert et par une autre personne appelée Scheidemann, va assez rapidement choisir l’alliance avec la vieille armée de l'ex-kaiser, de peur de perdre complètement le contrôle de la situation face à l’aile plus radicale et révolutionnaire du nouveau KPD. La bourgeoisie allemande, de son côté, va également, et tout aussi rapidement, sauter sur l'occasion, pour se ranger, tout au moins au début (plus tard, lorsque Hitler commencera également à émerger comme une option de plus en plus "plausible" pour la bourgeoisie, ce sera une autre affaire), derrière ces sociaux-démocrates, l'idée étant, qu'à tout prendre, cela pouvait être moins dangereux que de laisser la révolte populaire continuer de grandir sous l'égide des communistes.

Et puis, le 6 janvier, c'est le début d'une insurrection à Berlin. Les gens ne sont plus prêts à attendre. Selon plusieurs historiens, Rosa Luxembourg aurait su dès le départ que les conditions n'étaient alors pas les plus propices et que cette insurrection avait aussi toutes les chances de ne pas réussir. Qu'importe ! Malgré toutes ses réserves, elle aurait néanmoins décidé de se porter à l'avant-plan de cette insurrection parce qu'elle considérait aussi qu'en tant que communiste, on ne pouvait pas rester à l'écart, alors que les ouvriers se faisaient massacrer. Les gens veulent du changement et sont prêts pour cela à descendre dans les rues. Mais sont-ils à ce moment-là assez forts pour faire face à la réaction ? L'insurrection ne durera que quelques jours. Et puis, immédiatement après, aussi bien Karl Liebknecht que Rosa Luxembourg étaient tous deux arrêtés par un commando de l'armée allemande, torturés, puis exécutés, et leurs corps étaient finalement jetés dans les eaux d'un canal de la capitale. On ne retrouvera d'ailleurs ceux-ci que plusieurs mois plus tard ... Ce qui n'empêchera pas des milliers et des milliers d'ouvriers de se joindre alors au cortège funèbre.

Sauf que naîtra en même temps de cette répression sauvage (ainsi que de plusieurs autres qui surviendront après, et à travers l'Europe) une profonde division du mouvement ouvrier allemand, un fossé de plus en plus grand qui finira également par s'étendre bien au delà des frontières de l'Allemagne, entre sociaux-démocrates et communistes, et qui contribuera également, avec le temps, à l'éventuelle défaite de ces deux mouvements face au nazisme, une décennie plus tard. Un bien triste travers de l'histoire.

Des années plus tard, les choses ne sont guère mieux ...

1923. Depuis 1919, les sociaux démocrates (SPD) participent toujours au gouvernement central allemand, de même qu'à de nombreux autres administrations régionales, dont celle de la Prusse, qui inclut la ville de Berlin. Les communistes, pour leur part, représentent le principal parti d'opposition, toujours en Allemagne. À Hambourg, une nouvelle insurrection ouvrière éclate, à la tête de laquelle, on retrouvera une fois encore les communistes. Nouvel échec durement réprimé.

1929. Les choses ne vont pas tellement mieux entre communistes et sociaux-démocrates. À Berlin, lors des grandes manifestations du 1er mai, et sous les ordres du ministre prussien de l'Intérieur, qui vient des rangs sociaux-démocrates, la police tire carrément sur la foule et tue 30 personnes. Au sein des rangs communistes, la colère est totale et la presse communiste dénonce plus fortement que jamais la direction du parti social démocrate comme des étant des "sociaux fascistes".

Fin 1932. La situation devient encore plus tendue du fait que les nazis, pendant ce temps, ne cessent en effet de gagner du terrain et sont maintenant majoritaires au Reichstag, le parlement central. Des élections présidentielles ont alors lieu. Il y a trois candidats principaux : Adolf Hitler pour les nazis, Hindenburg (qui était chef d'État-major sous l'ancien Kaiser, durant la 1ere guerre mondiale, qui peut entre autres compter sur l'appui des sociaux-démocrates, et qui est en même temps le président sortant), et Ernst Thälmann (qui est depuis déjà plusieurs années le chef du Parti communiste). Finalement, c'est Hindenburg qui est une fois de plus réélu, sauf que coup de théâtre, son premier geste consiste alors à nommer Hitler comme chancelier (l'équivalent chez nous de premier ministre) !!!

Le premier geste d'Hitler sera de faire incendier le Reichstag et d'en imputer la responsabilité aux communistes. Son 2e geste sera ensuite d'interdire le parti communiste, d'éliminer l'habeas corpus (soit la présomption d'innocence) ainsi que toutes les principales règles de fonctionnement démocratique. L'objectif : réduire à néant toute forme d'opposition.

Dès le mois de janvier 1933, le Parti communiste, qui s'était toujours montré très intransigeant face aux sociaux-démocrates (ce qui peut se comprendre jusqu'à un certain point, vu tout ce qui avait pu se passer jusqu'à là en termes de relations entre ceux deux partis), change alors son fusil d'épaule et lance plutôt un appel plutôt inhabituel vis à vis des sociaux démocrates, les appelant à collaborer ensemble à l'organisation d'une grève générale à travers toute l'Allemagne pour essayer de faire renverser le tout nouveau gouvernement nazi. Peine perdue, car la direction du parti social-démocrate ne veut toujours rien savoir de faire alliance avec les communistes.

Il faut souligner ici, à quel point cette soudaine ouverture face à la direction du parti social-démocrate ne fut sans doute pas facile à prendre. Non seulement à cause de tout ce qui avait pu arriver avant, mais aussi parce que cela transgressait la ligne officielle de l'Internationale communiste, auquel le parti communiste allemand appartenait. Il faut en effet savoir que l'orientation visant à encourager la conclusion d'alliances avec le reste des forces de gauche, y compris avec les establishments des grands partis sociaux-démocrates, pour mieux combattre la montée du fascisme, ne fera partie de la stratégie officielle de l'Internationale communiste qu'à partir de la fin de 1935 ... Nous ne sommes alors qu'au début de 1933.

On ne peut évidemment que spéculer sur l'impact qu'aurait pu avoir une telle alliance si celle-ci s'était effectivement matérialisée. Peut-être Hitler aurait fini par perdre le pouvoir et n'aurait donc pu déclencher la 2e guerre mondiale ... Chose certaine, cela contribue en même temps à donner une autre image, un peu moins caricaturale, des relations qui pouvaient alors exister entre l'Internationale communiste et ses différentes composantes, dans chaque pays. Encore aujourd'hui, bien des gens pensent que les différents partis communistes de l'époque étaient tous complètement inféodés à la ligne de Moscou et n'étaient qu'une sorte de "5e colonne", au service de l'URSS et de sa politique étrangère; c'est ce qu'affirmaient la plupart des gouvernements bourgeois à ce moment-là; cela faisait partie de la propagande anti-communiste de ces gouvernements; la réalité est cependant pas mal plus complexe. Dans le cas du parti communiste allemand, cela est d'autant plus vrai que le chef de ce parti, siégeait en même temps sur le Comité exécutif central de l'Internationale communiste.

Pour revenir à 1933, c'est alors plus que jamais l'impasse, d'autant que toutes les tentatives passées pour essayer d'organiser dans le passé des soulèvements, sur la seule base des appuis en provenance du parti communiste, n'ont pas marché. Le mois suivant néanmoins -- on est alors en février -- la direction du Parti communiste se réunit dans la clandestinité et appelle malgré tout, et une fois de plus, à renverser le gouvernement en place, maintenant dirigé par les nazis. Mais là encore, cela ne marchera pas et dans les jours qui suivront, une bonne partie de la direction du Parti communiste se retrouvera derrière les barreaux dans les prisons des nouveaux dirigeants que sont les nazis. L'impact sera quasi immédiat. Des milliers et des milliers de communistes seront par la suite pourchassées, arrêtés, assassinés et/ou envoyés vers les premiers camps de concentration (et ce bien avant que les déportations massives de Juifs n'aient même commencé à être organisées). Ernst Thälmann, sera lui-même arrêté, passera 11 ans dans des prisons de la Gestapo, pour finalement finir exécuté au camp de concentration de Buchenwald.

Après les communistes, ce sera aussi au tour des sociaux-démocrates, de même que de tous ceux et celles qui n'étaient pas d'accord pour suivre les nazis ... On connaît la suite. En 1939, ce sera ensuite la 2e guerre mondiale, etc.

1946: Les branches du KPD, autant que du SPD, oeuvrant toujours dans la partie est de l'Allemagne, sous occupation soviétique, acceptent finalement de fusionner. Pendant la guerre, toutes deux avaient réussi tant bien que mal à survivre dans la clandestinité. Ne formant plus qu'un seul parti en Allemagne de l'Est, ils s'appelleront désormais le Parti de l'unité socialiste (SED). Certains diront ensuite que la fusion avait été imposée par les autorités soviétiques; quoiqu'il en soit, et dans les années suivantes, bon nombre d'anciens dirigeants du SPD se retrouveront expulsés du SED, via différentes purges. À partir de 1949, le SED dirigera d'autre part les destinées de la nouvelle République démocratique allemande (RDA).

À l'Ouest, les choses recommencent également à bouger dès la fin du régime nazi. Du côté du SPD, il y a alors un effort concerté pour rayer de son programme toute référence qui pouvait encore ressembler à un projet socialiste. Du côté de ce qui reste encore du KPD, toujours à l'Ouest, il y a également un effort pour relancer le parti, mais cela n'ira pas très loin. De toute manière, dès 1956, ce dernier était déclaré une fois de plus illégal. Dès 1969, les membres du KPD accepteront finalement de changer leur nom pour le DKP, question de pouvoir contourner l'interdit, mais n'arriveront pas pour autant à percer dans la partie Ouest de l'Allemagne.

Étrangement, il faudra attendre jusqu'à la tombée du mur de Berlin et l'éventuelle réunification de l'Allemagne pour que les choses commencent vraiment à changer pour le mieux.

Par rapport à aujourd'hui

Vous me direz qu'on est quand même rendu assez loin de Rosa Luxembourg. Pas vraiment quand on pense qu'il s'agit toujours de décider de comment on devrait aborder toute la question des alliances, de même que de savoir quoi faire quand les choses ne tournent pas vraiment comme on avait pu au départ l'espérer sur le plan politique.

Encore aujourd'hui, au sein des forces de gauche, que ce soit en Europe ou ailleurs, il existe toujours de nombreuses divisions à ce sujet, même si la conjoncture est quand même bien différente. Parfois, on retrouve d'un côté ce qu'on pourrait appeler l'aile social-démocrate plus traditionnelle (telle le Parti travailliste en Angleterre) ou le Parti socialiste en France, encore que ceux-ci soient aussi traversés d'une multitude de courants assez distincts, et de l'autre des forces plus radicales, y compris et en particulier les communistes (sans qu'ils ne soient les seuls cependant).

Parfois, ces divisions portent, une fois de plus, sur les questions de guerre ou de paix; c'est le cas en Angleterre, alors que la direction du Parti travailliste continue toujours à appuyer la guerre contre l'Irak. D'autres fois, cela porte aussi sur d'autres questions, telles que de savoir quelle devrait être la meilleure attitude à suivre pour combattre la détérioration de nos conditions de vie et de travail.

La question, consistant à savoir si les forces plus radicales, y compris les partis communistes, devraient oui ou non chercher à rebâtir (ou à maintenir) des ponts avec les forces social-démocrates plus à gauche, si cela devrait aller également jusqu'à proposer des alliances avec les courants plus conservateurs et plus à droite qui oeuvrent toujours au sein de ce mouvements sociaux-démocrates, tout cela fait aussi partie des débats qui peuvent encore diviser le camp de la gauche, y compris au sein des forces plus radicales.

Sans vouloir prétendre qu'il y aurait une solution magique ou un principe immuable existant à ce propos, on peut ajouter que chaque fois que la gauche aura réussi, au travers de l'histoire, toujours avec un grand H, à unir malgré tous les obstacles le maximum de forces de gauche, surtout à la base, et au de là des différences qui pouvaient exister avant (et qui continueront probablement encore longtemps à exister), chaque fois il en aura sortir des choses positives. L'exemple du Front populaire de 1936, en France, est très certainement un cas probant que toutes les erreurs qui ont pu se produire à ce moment-là ne sauraient effacer.

L'existence, ici même, au Canada et au Québec, d'un mouvement syndical assez fort, tire aussi son origine de luttes épiques, menées dès les années 30 (et donc aussi au même moment), et qui n'auraient probablement jamais pu être menées à terme, n'auraient été des efforts concrets qui furent alors entrepris, sur le terrain, entre toutes sortes de militants et de militantes qui, sur un plan plus à long terme et stratégique, ne s'attendaient pas forcément, mais qui voulaient en même temps oeuvrer ensemble dans les luttes de tous les jours.

Depuis déjà plusieurs années, existent également au Québec un mouvement qui s'appelle Québec solidaire et qui regroupent toutes sortes de gens de diverses tendances à gauche. Certains se définissent plus comme étant social-démocrates, sans nécessairement connaître tous les détails à propos des origines de ce mouvement; d'autres n'aiment pas nécessairement ce vocable tout en refusant en même temps d'être associées à une aile plus radicale; il y a aussi le PCQ; et puis, il y a également d'autres forces qui s'identifient tout autant à une aile plus radicale et ouvertement socialiste; il y a aussi des gens qui aimeraient sans doute plus s'identifier au mouvement anarchiste. Bref c'est un mouvement assez varié et cela prouve en même temps que, tout en étant tous et toutes différent-e-s, nous pouvons aussi apprendre à travailler ensemble, sans pour autant devoir abandonner nos propres idées et devoir se fondre dans une sorte de moule monolithique que d'aucuns recherchent vraiment.

L'Histoire avec un grand H, y compris la vie de militants et de militantes comme Rosa Luxembourg nous rappelle aussi à quel point les choses sont rarement aussi simples qu'elles pourrait y paraître au départ, mais combien il importe aussi d'apprendre à débattre ensemble et aussi à faire avancer ensemble ce mouvement.

Même si cela fait maintenant 90 ans que Rosa Luxembourg est morte, chaque année, au mois de janvier, des milliers de gens continuent encore, en Allemagne, à se rendre au cimetière, là où est enterrée cette militante de la première heure, pour lui rendre hommage.

En Allemagne également, existe depuis déjà plusieurs années un mouvement de plus en plus influent, qui s'appelle le Parti de la gauche ("Die Linke") et qui regroupe, tout comme peut le faire Québec solidaire, un assez large éventail de courants divers. Leurs quartiers généraux, à Berlin, se situent dans la même bâtisse où logeaient également, dans les années 20 ainsi qu'au début des années 30, les locaux de la direction du Parti communiste allemand ... Die Linke regroupe aujourd'hui aussi bien des militants et des militantes issus de la mouvance communiste, provenant aussi bien de l'Ouest que de l'Est, que nombreux anciens membres du Parti social-démocrate, qui formaient auparavant, en son sein, son aile plus à gauche. Serait-ce un signe du futur ? ...

Fait à noter, ce nouveau parti n'exclut pas forcément d'éventuelles alliances avec le vieux SPD, tout dépendant des bases de ces éventuelles alliances. Il y a à peines quelques semaines, il était justement question de former à l'intérieur du "lander" de Hesse un tel gouvernement de coalition, lequel aurait alors réuni le Parti de la gauche, les Verts, ainsi que le SPD. La région de l'Hesse inclut entre autres la ville de Francfort. Tout le projet tomba finalement à l'eau après que 4 députés du SPD décidèrent de voter contre leur propre parti; ils ne pouvaient tout simplement pas concevoir de faire alliance avec un parti comme le Parti de la gauche (die Linke). Comme quoi, le temps peut bien passer, mais certains vieux démons sont plutôt tenaces. Le "lander" de Hesse est une des régions où Die Linke est particulièrement influent. À cause de cette défection au sein du SPD, il devrait y avoir sous peu de nouvelles élections régionales dans cette partie de l'Allemagne.

Il existe finalement des ententes sur le terrain entre Die Linke et quelques autres organisations beaucoup plus petites de la gauche radicale. Tout en insistant pour rester à l'extérieur de Die Linke, ces plus petites organisations appuient néanmoins celui-ci quand vient le temps des élections. Au sein de Die Linke, il existe d'autre part près d'une demi-douzaine de tendances ou de regroupements formels, correspondant à autant de courants distincts.

Le Parti de la gauche allemande Die Linke possède déjà, dès suites des élections des 2005, 54 députés au sein du Parlement central et ses appuis ne cessent de grandir. En vue des prochaines élections fédérales de 2009, les sondages lui donneraient entre 12 et 15% du votes. Sur le plan régional, selon les "landers", ce parti recueillerait même jusqu'à 24% des intentions de votes, ce qui fait d'ores et déjà de lui, non seulement le 3e parti le plus influent parti en Allemagne, mais aussi et de loin le plus important regroupement au sein de la Gauche unie européenne (GUE). C'est comme si on assistait à nouveau à une sorte de retour du balancier, plus à gauche en Allemagne ...

La situation demeure en même temps fragile, puisque dans au moins 4 "landers", Die Linke fait toujours l'objet d'une enquète pour déterminer si oui ou non ce parti pourrait constituer une "menace à la démocratie", première étape vers une éventuelle mise hors la loi. Il faut savoir qu'en Allemagne, tout comme c'est généralement le cas dans la plupart des autres pays dits «démocratiques», il existe en effet des lois permettant de prendre de telles mesures d'exception.

Parti communiste du Québec (PCQ)
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