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Mutilations génitales : Le cœur du problème

Cris Yaves, Jeudi, Avril 3, 2008 - 14:16

Cris Yaves

La quasi-totalité des articles et vidéos dénonçant les mutilations génitales mettent en première ligne de leur argumentation les questions de santé et de vie. Aussi importantes soient ces questions, elles ne sont pas le sujet mais des dérives et à-côtés. Pire, en étant systématiquement mises en avant, ces questions détournent du débat de fond.

Les risques inhérents des mutilations et la gravité de leurs conséquences ne sont pas la seule chose à regarder pour savoir s'il faut ou pas mutiler. Ce ne sont pas des arguments centraux mais des arguments qui s'ajoutent à la question racine (sans que ça minimise leur importance). La question principale pour le débat est celle de la valeur même de la mutilation, non de ce qui s'y additionne.

C'est un peu comme la question du meurtre : La torture est évidemment un facteur aggravant. Elle peut même être perçue comme plus grave que le meurtre. Mais même sans la moindre souffrance, le meurtre est criminel. La question centrale du meurtre est celle de prise de la vie. Même sans toute la gravité des conséquences des mutilations, la question de mutiler se pose toujours.

De plus les articles, et qui plus est les vidéos qui jouent sur le sensationnel, se tirent souvent dans les pattes. Les uns évoquent les mutilations génitales "féminines"(MGF) et refusent de faire le lien avec les circoncisions au prétexte de lutte féministe ou de gravité incomparable (1). D'autres dénoncent les circoncisions et minimisent la misogynie des MGF. Quelques-uns font le lien entre les deux mais ignorent les autres. Même dans les mouvements engagés contre les mutilations génitales, peu savent que les enfants qui naissent intersexués (2) sont également mutilés. Dans ce cas, c'est pour masquer au plus tôt leur non conformité à la binarité officielle (3). C'est pourtant ici aussi contre la santé, la sexualité, l'intégrité physique, l'intérêt et la volonté de la personne.

Une mutilation se définit par l'amputation ou le dommage d'un organe ou d'une de ses parties.

Donc toute circoncision (amputation du prépuce) ou excision (amputation d'au moins une partie du clitoris) est par définition une mutilation génitale. Il en va de même pour la "chirurgie" de normalisation subie par les enfants intersexués (4), puisqu'il y a toujours une part des tissus et de la fonctionnalité qui est amputée et endommagée.

Le côté mutilant est particulièrement mis en avant quand ce qui est amputé est un tissu sain. Là encore, c'est le cas pour l'excision, les "chirurgies" génitales de normalisation ainsi que pour la circoncision.

La définition n'induit pas que c'est mal. Souvent l'idée d'atteinte à l'intégrité physique suffit à la condamnation morale. Pourtant la mutilation n'est pas mauvaise en elle-même. C'est injustifiable de décréter selon une vision totalitaire ce qui doit être bon pour tous. C'est surtout le droit à disposer de son corps qui est encore mis en péril. Au nom de quoi peut-on dire ce qui est bon pour une personne à sa place, si elle est pleinement consciente de tout ce qui est en jeu ? Ce qui compte est ce que ça induit pour la personne concernée.

Même si ça va à l'encontre de son intégrité physique voire de sa santé, une personne peut vouloir une "mutilation". Dans certains cas, elle peut vivre mieux avec une "mutilation". Dans cette situation, c'est donc dans son intérêt. Par exemple une personne avec une "gynécomastie", c'est à dire des seins (qu'elle soit femelle, intersexuée ou mâle), peut préférer être considérée comme un homme. Ce que la présence des seins empêche dans notre société. Une chirurgie de la poitrine comprenant l'ablation des glandes mammaires est alors dans l'intérêt de cette personne qui vit mieux sans seins.

Evidemment, ce qui est le mieux pour une personne ne l'est pas forcément pour une autre. Des personnes extérieures et des médecins peuvent percevoir, par exemple une modification de sexuation, comme une mutilation, pourtant la personne transsexuée vit mieux dans le sexe qui lui correspond. C'est pourquoi la personne doit toujours être pleinement informée pour qu'elle puisse faire elle-même tous les choix la concernant.

Ce qui importe est le désir de la personne pour elle-même. C'est d'ailleurs un principe fondamental : le libre arbitre (5). Or une personne doit être responsable et éclairée pour prendre des décisions sur son corps. Prendre une décision à la place de l'intéressé avant qu'il soit mûr pour décider est profondément abject et devrait toujours être condamné. Toute mutilation commise sur une personne encore immature pour prendre une telle décision devrait être considérée comme un crime. Il faut toujours attendre que la personne soit en âge de faire des choix responsables, pour qu'elle décide elle-même et de façon éclairée de ce qui la concerne.

Les risques des mutilations pour la santé voire pour la vie ne sont pas le cœur du problème. C'est au nom du libre arbitre qu'il faut condamner tout acte sur le corps d'une personne non consentante. Usurper les décisions qu'une personne devrait pouvoir prendre pour elle, une fois mûre et avertie, est très grave. Un enfant n'est pas le bien de ses parents, du corps médical, d'un ordre religieux ou d'une communauté. Tout ce qui lui est imposé pendant l'enfance, sur son corps, sa sexualité et sa vie, est une atteinte à sa liberté. C'est aussi une négation de sa personne en tant que telle, une déshumanisation.

Et aucune tradition ne peut justifier les mutilations. Le corps appartient à celui qui l'habite. Lui seul doit pouvoir en disposer. Le fait que des horreurs existaient, n'est pas une raison pour les perpétuer.

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Sites anglophones
qui posent la question de fond des mutilations génitales sans faire de discrimination selon le sexe de la victime :

http://www.studentsforgenitalintegrity.org

http://www.intersexualite.org/Circumcision.html

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Sur la chirurgie reconstructrice du clitoris :

Dossier : http://www.france5.fr/sante/traitements/W00514/72/152571.cfm

Adresses utiles :

Clinique Louis-XIV
Consultation du docteur Pierre Foldès
4, place Louis-XIV - 78100 Saint-Germain-en-Laye
Tél. : 01 39 10 26 26

CHU d'Angers
Consultation du docteur Sébastien Madzou
Tel. Rdv consultations : 02 41 35 44 59
Tel. service urgences : 02 41 35 42 74
Fax : 02 41 35 42 54
Email : SeMa...@chu-angers.fr

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Notes :

1) Une des motivations à l'excision est de supprimer un organe trop ressemblant au pénis : perçu comme un symbole de masculinité et des avantages qui s'y rattachent. L'excision est donc incontestablement sexiste.

L'excision n'est pas comparable à la circoncision vis-à-vis de ce qui est amputé. Ce qui est comparable, c'est l'organe sexuel. Clitoris comme pénis possèdent un gland, une tige, un prépuce et des parties internes aussi longues. La circoncision est l'amputation du prépuce seul. L'excision est l'amputation d'au moins le gland. L'excision est donc physiologiquement plus conséquente que la circoncision.

Ce n'est par contre pas une raison pour ne pas faire le lien avec les circoncisions. La misogynie se rajoute à la question de mutilation, pour les MGF. Il ne faut pas évacuer la question commune. (Pour approfondir la question des différences entre excision et circoncision, voir chapitre "Excision (clitor(id)ectomie) vs circoncision".)

2) Une personne intersexuée est une personne qui n'est pas pleinement et exclusivement femelle ou mâle. Mais il n'existe pas de définition et encore moins de limites clairement établies pour mâle et femelle.

3) http://membres.lycos.fr/crisyaves/isphob.html

4) Voir aussi http://membres.lycos.fr/crisyaves/despot.html#mineurs

5) http://membres.lycos.fr/crisyaves/eclaire1.html



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