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Préparer les conditions pour traiter les Canadiens comme des combattants ennemis illégaux: L'essence du Discours du trône

Anonyme, Jeudi, Décembre 13, 2007 - 12:47

Pierre Chénier

Préparer les conditions pour traiter les Canadiens comme des combattants ennemis illégaux:
L'essence du Discours du trône
du gouvernement Harper
- Présentation de Pierre Chénier, secrétaire, Centre ouvrier du PCC(M-L),
à la réunion du PMLC à Hamilton le 22 novembre 2007 -

( Envoyé par le Parti marxiste-léniniste du Québec )

L'essence du Discours du trône du gouvernement conservateur présenté à l'ouverture du parlement le 16 octobre et qui, selon Harper, inaugure la «deuxième phase» du mandat de son gouvernement, peut être caractérisée ainsi: quiconque est en désaccord avec les «valeurs canadiennes» épousées par les cercles dominants canadiens est l'équivalent d'un combattant ennemi illégal et l'État est justifié de le priver de ses droits civils. La logique est que quiconque n'épouse pas nos valeurs pose une menace à notre sécurité. Le rôle de l'État est de garantir la sécurité intérieure et extérieure. En conséquence, cette logique est inattaquable et le programme raisonnable.

Le discours commence par cette phrase: «J'aimerais destiner aux membres des Forces canadiennes, dont certains sont parmi nous aujourd'hui, les premiers mots prononcés en cette enceinte. Leur engagement et leur courage, au nom de la justice, de l'égalité et de la liberté, dont les bienfaits ne sont pas acquis à tous les peuples du monde, suscitent notre respect.»

Le thème des valeurs

«Le Canada est fondé sur un héritage de valeurs communes pour la défense desquelles des Canadiens se sont battus, et ont parfois péri.»

La question des valeurs est abordée pour nous dire qu'un «héritage de valeurs communes» forme la base de l'identité canadienne.

La définition de l'identité est: «l'aspect collectif d'un ensemble de caractéristiques par laquelle une chose est reconnaissable ou connue avec certitude; un ensemble de comportements ou de caractéristiques personnelles par lequel un individu est reconnu comme membre d'un groupe; la qualité ou la condition d'être semblable à quelque chose d'autre.» (American Heritage Dictionary). L'idée de valeurs comme héritage suggère que ces valeurs ont été arrêtées à un moment dans le passé et qu'être canadien signifie soutenir ces valeurs arrêtées. Cela est en contradiction avec le concept éclairé de renouveler et moderniser de façon continue la société pour qu'elle satisfasse les réclamations de tous sur la base des moyens modernes à sa disposition.

L'idée des valeurs comme héritage implique également que si quelqu'un vient d'ailleurs, ou a d'autres valeurs ou d'autres manières de penser, il doit abandonner ces autres valeurs pour devenir canadien. Le contenu de justice, liberté et égalité n'est pas élaboré de façon à ce qu'il signifie quelque chose pour les Canadiens dans le contexte du vingt-et-unième siècle. En fait, que signifient ces valeurs dans le contexte d'aujourd'hui? En invoquant le sacrifice ultime pour la défense de ces valeurs non définies on veut bien faire comprendre que ces valeurs ne doivent pas être contestées ou discutées

Les «valeurs fondatrices» du Canada sont basées sur les conceptions de la démocratie de l'empire colonial britannique du dix-neuvième siècle, sur la mission civilisatrice de l'homme blanc, la «paix», l'«ordre» et le «bon gouvernement» et toutes les autres notions dépassées qui sont la source de la crise constitutionnelle et politique actuelle. Harper dit aux Canadiens en termes clairs qu'il n'existe pas d'espace au Canada pour ceux qui épousent des points de vue qui ne correspondent pas à ces «valeurs fondatrices». De cette manière, il prépare le terrain pour diviser la classe ouvrière canadienne et le peuple en suivant le slogan du président américain George W. Bush sur la guerre à la terreur: «Ou bien vous êtes avec nous, ou bien vous êtes avec les terroristes», slogan qui devient la ligne de démarcation au pays et à l'étranger et qui permet la répression de toute opposition au pouvoir des monopoles. Il indique aussi ce qui sera l'enjeu des prochaines élections fédérales. Les conservateurs seraient maintenant le parti de tous les Canadiens, de tous ceux qui sont «avec nous» — le Parti conservateur est le parti, le peuple, la nation qui composent la politique d'une seule nation qui guidera le Canada à l'avenir. Les autres partis à la Chambre des Communes rivalisent et revendiquent la même chose et les élections auront lieu pour déterminer quel est le meilleur champion des monopoles, qui est «avec nous» et apte à exercer le pouvoir en leur nom.

Plusieurs points faits dans le Discours du trône montrent clairement que Harper prépare le terrain pour déclarer combattants ennemis illégaux ceux qui ne se soumettent pas au statu quo et à l'orientation que son gouvernement donne au pays, parce qu'ils constituent une menace à la sécurité nationale et au bien du Canada.

Harper a déclaré devant le Parlement:

«C'est une réalité que nous vivons dans un village global où l'économie, la sécurité, les idées et les idéologies et mêmes les maladies qui surgissent dans une partie du monde peuvent être immédiatement liées ou transmises à une autre partie. Les Canadiens ont toujours compris la nature critique de nos liens avec le reste du monde. Nous n'avons jamais été un pays isolationniste.»

La notion même que «les idées et les idéologies» sont comme des maladies qui constituent une menace à la sécurité canadienne n'a pas d'autre but que de criminaliser le droit de conscience et de déclarer illégal quiconque n'est pas loyal à son souverain et en conséquence peut être priver de ses droits civils».

En d'autres mots, le Canada est un pays assiégé à cause de la transmission des «idées et des idéologies», qui sont assimilées à des «maladies», qui constitue un danger à sa stabilité. Comme exemple des «idées» qui sont un danger pour le Canada, Harper parle de l'importance pour le Canada d'escalader son ingérence dans les pays des Amériques. Il fait spécifiquement référence aux pays qui tombent dans «le nationalisme économique et le protectionnisme, le populisme politique et l'autoritatisme». Le rôle du Canada est de démontrer qu'il existe «des modèles alternatifs qui peuvent répondre aux aspirations du peuple», dit-il. Le choix n'est pas «simplement entre le capitalisme débridé et le socialisme de guerre froide... Le modèle canadien de liberté démocratique et d'ouverture économique combiné avec un appui régional et social efficace offre une voie au centre au pays à la recherche d'institutions démocratiques, de marchés libres et d'égalité sociale.»

Le corollaire de cela est qu'au Canada ceux qui ne considèrent pas le pays comme un «modèle de liberté démocratique» introduisent «des idées et de idéologies» dangereuses, offrent une alternative, ce qui selon Harper n'est pas souhaitable ni raisonnable, comme «le socialisme de guerre froide», et cela ne peut être toléré.

Dans la même veine, l'ordre du jour de loi et ordre de Harper ne s'adresse pas uniquement au problème de la criminalité, comme cela est proposé dans le Discours du trône avec le plan de recruter plus de 2 500 policiers. Il déclare: «Notre gouvernement s'adressera directement aux Canadiens dans une déclaration sur la sécurité nationale à propos du défi constant que représente la protection d'une société libre et ouverte. Il déposera des projets de loi afin de s'assurer que le Canada dispose des outils nécessaires pour arrêter les individus qui représentent une menace pour nos villes, nos communautés et nos familles. Cela comprendra des mesures pour renforcer la loi antiterroriste et pour répondre à la décision de la Cour suprême sur les Certificats de sécurité.»

Examinons de plus près les valeurs fondatrices que le gouvernement Harper dit être la ligne de démarcation entre eux et nous:

«Fort de cet héritage, notre gouvernement est résolu à protéger notre souveraineté ici au pays et à promouvoir nos valeurs à l'étranger.»

Il va sans dire que la formulation de cette position à propos d'un «héritage de valeurs communes» pour lesquelles il vaudrait se battre soulève des questions importantes à propos des intentions du gouvernement Harper concernant la lutte des peuples autochtones pour l'autodétermination, la lutte du peuple québécois pour l'autodétermination et le droit de tous les Canadiens d'être traités en égaux devant la loi, au-delà des origines nationales, de la couleur de la peau et surtout de la conscience personnelle.

Comme nous l'avons déjà dit, le contenu de ces valeurs que Harper lie à «la protection de notre souveraineté» et à la conduite du Canada dans le monde ne sont pas matière à débat. Il ne les précise pas et n'invite pas les Canadiens à le faire. C'est donc l'État qui impose des valeurs aux Canadiens et aux peuples étrangers. Bref, le pouvoir de décider est la prérogative de l'exécutif. Les raisons pour lesquelles le Canada est censé agir comme il agit sont l'affaire privée de l'exécutif.

Prenant la parole à la Chambre de commerce Canada-R.-U., à Londres en juillet 2006, le premier ministre Stephen Harper a été beaucoup plus direct sur ce qu'il entend lorsqu'il parle de valeurs: il s'agit des conceptions des bâtisseurs d'empire du 19e siècle. Citant un discours de Churchill pour «rappeler aux Canadiennes et aux Canadiens ce qu'ils devaient à la Grande-Bretagne», il a dit que Churchill avait raison lorsqu'il a dit que «le Grand Dominion» est «le cercle doré de la Couronne qui nous lie tous ensemble au passé glorieux [...] toutes ces pierres de gué considérables que les peuples britanniques ont façonnées et forgées pour la joie, la paix et la gloire de l'humanité». Ce à quoi Harper ajoute: «Combien il avait raison!»

Selon Stephen Harper, «les actions de l'empire britannique ont été en grande partie bienveillantes et, occasionnellement, brillantes». La conquête du Québec est le fait de «dispositions magnanimes» et les traités de la Grande-Bretagne avec les peuples autochtones sont «parmi les plus justes et les plus généreux de l'époque». Jurant que le Canada et la Grande-Bretagne seront des «alliés éternels», il a dit que cette alliance a été forgée dans le sang par des générations de Britanniques et de Canadiens, en référence à la participation du Canada à la première et la deuxième guerres mondiales et à la «génération» qui a «aidé nos cousins américains à résister à la menace du communisme soviétique». Harper dit que depuis l'effondrement de l'Union soviétique, lorsque «nous avons pensé être témoins de 'la fin de l'histoire', nous nous sommes alliés dans un nouveau conflit mondial», celui de la guerre au terrorisme. Empruntant à Churchill l'expression «des groupes de bandits qui cherchent à assombrir la lumière du monde», il a dit: «Et une fois de plus, nous devons nous en remettre à nos valeurs, exploiter nos ressources et faire preuve d'une volonté inébranlable pour les vaincre.» Harper a dit à la Chambre de commerce Canada-R.-U. que «notre gouvernement fera tout ce qui est en son pouvoir pour faire en sorte que notre société soit sécuritaire et que le terrorisme ne soit pas toléré au Canada. Et nous le ferons en préservant et en consolidant les valeurs que nous avons héritées de vous: la liberté, la démocratie, les droits de la personne et la primauté du droit, les valeurs sur lesquelles le Canada est fondé, les valeurs qui unissent l'ensemble des Canadiennes et des Canadiens et les valeurs qui garderont nos deux pays forts et sécuritaires.»

Cette déclaration de fidélité aux conceptions des bâtisseurs d'empire du 19e siècle revient constamment dans le Discours du trône. Elle trouve son expression aujourd'hui dans l'engagement du gouvernement à jouer un rôle toujours plus grand dans la création d'un empire moderne sous la conduite de l'impérialisme américain.

Le Discours du trône évoque entre autres le rêve de bâtir le nord canadien. Il présente l'«affirmation de la souveraineté dans l'Arctique» comme essentiel au renforcement de la «souveraineté du Canada» et annonce un programme de militarisation et d'infrastructure pour exploiter les ressources du Nord. Il affirme: «Aujourd'hui, il faut poser un nouveau regard sur le Nord. De nouvelles possibilités émergent d'un bout à l'autre de l'Arctique, mais aussi de nouveaux défis provenant d'ailleurs.» Les plans du gouvernement Harper dans le Nord seraient intimement liés à l'histoire du Canada et à la nation canadienne. Le Nord serait lié au projet d'empire des Pères de la Confédération, même si ce projet, qui était basé sur l'opposition à l'annexion, n'est plus à l'ordre du jour des cercles dirigeants du Canada. Le projet actuel est la création des États-Unis des Monopoles d'Amérique du Nord. Les Canadiens sont très au fait de ce projet et savent que ce sont les États-Unis qui menacent la souveraineté du Canada. La référence aux «nouveaux défis provenant d'ailleurs» vise à maintenir la fausse impression d'un conflit entre les cercles dirigeants du Canada et des États-Unis sur le contrôle de l'Arctique, alors qu'en réalité il s'agit du positionnement du Canada du côté des États-Unis dans leur rivalité avec la Russie.

Dans ce contexte, la référence à D'Arcy McGee et à son intérêt pour le Nord dans le Discours du trône sort de l'ordinaire. Il dit: «L'Arctique fait partie intégrante de l'histoire du Canada. L'un des Pères de la Confédération, D'Arcy McGee, disait du Canada qu'il était un pays nordique, bordé par le bleu des océans. Nous voyons dans le Nord l'expression de nos aspirations les plus profondes: notre goût de l'exploration, la beauté et la richesse de nos terres, et le potentiel illimité de notre pays.» Si cette référence à D'Arcy McGee, qui n'est pas une référence courante dans le discours politique publique, attire l'attention, c'est que l'ex-procureur général des États-Unis John Ashcroft a dit exactement la même chose lors du 7e Forum annuel Canada-É-U sur le crime frontalier en mai 2003. À cette rencontre où fut créé un comité chargé de développer la coopération «anti-terroriste» entre le Canada et les États-Unis, Ashcroft a cité l'extrait que Harper paraphrase dans le Discours du trône. Il a dit:

«Un des Pères de la Confédération du Canada, Thomas D'Arcy McGee, a dit: 'Je vois, dans un avenir rapproché, une grande nationalité délimitée, comme le bouclier d'Achille, par la bande bleue de l'océan. Je vois à l'intérieur de ce bouclier les sommets des montagnes de l'Ouest et la crête des vagues de l'Est. Je vois une génération d'hommes industrieux, satisfaits et de valeur morale, libres en paroles et dans les faits, des hommes capables de maintenir, dans la paix et dans la guerre, une constitution digne de ce pays.'

«McGee parlait du Canada, mais il aurait tout aussi bien décrit les États-Unis. Nous sommes des pays qui aimons la liberté et qui respectons la primauté du droit. Le Canada et les États-Unis doivent continuer d'agir en partenaires et en grands amis. Nous devons demeurer vigilants. Nous devons continuer de protéger nos frontières, garder notre peuple en sécurité, maintenir notre mode de vie et bâtir un brillant avenir pour les générations à venir.»

L'amour commun de Harper et Ashcroft pour le Nord canadien, le texte de D'Arcy McGee et la défense des «valeurs canadiennes» et de «notre mode de vie» est sans doute perçu dans certains cercles comme un signe que les plans vont comme prévu.

Le déroulement des événements sous le contrôle de la Deuxième Session du 39e Parlement révèle les graves dangers que représente le programme de l'oligarchie financière dans le système international d'États. C'est un programme pour le fascisme et la guerre. Le Discours du trône laisse entendre que ce sont les peuples et nations avec des valeurs et des façons de penser différentes qui menacent les valeurs canadiennes. Leur existence même serait cause de conflit et une menace à l'«héritage de valeurs communes» du Canada. Les valeurs différentes ne peuvent pas coexister, alors pour que le Canada et ses alliés soient en sûreté il faut remettre dans le droit chemin ceux qui n'ont pas les bonnes valeurs.

Avant de conclure, je veux rappeler l'appel du PMLC à bâtir l'alternative en faisant les pas nécessaires pour établir un gouvernement anti-guerre. Sinon c'est le national-socialisme.



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