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Des centaines de manifestantEs contre l'armée canadienne

Eric Smith, Dimanche, Juin 24, 2007 - 22:46

Arsenal-express

Ce sont finalement près d'un millier de personnes qui ont répondu à l'appel de la coalition Guerre à la Guerre: Valcartier 2007 et se sont rassemblées vendredi le 22 juin à Québec à l'occasion du défilé militaire du Royal 22e régiment, dont les membres s'apprêtent à prendre la relève du détachement des Forces canadiennes qui participe déjà à l'occupation de l'Afghanistan.

Prévu depuis plusieurs semaines, ce défilé s'inscrivait dans le cadre d'une vaste opération de relations publiques menée par la hiérarchie de l'armée et le gouvernement Harper. La veille, une bonne partie des quelque 2 000 soldats rattachés à la base militaire de Valcartier ont assisté au match de football des Alouettes à Montréal, où ils ont été reçus avec tous les honneurs. Dans les prochaines semaines, les membres du régiment canadien français se promèneront dans au moins huit villes à travers la province, dans le but avoué de "gagner les cœurs et les esprits" des Québécoises et Québécois qui demeurent largement opposéEs à la guerre impérialiste.

Les membres du Royal 22e ont maintenant terminé leur entraînement en vue de leur prochain déploiement. D'ici leur départ qui s'échelonnera de la mi-juillet à la fin août, ils se prêteront à une campagne de propagande massive dans le but d'attirer la sympathie de la population québécoise et de renverser le courant d'opinion défavorable à l'occupation militaire canado-états-unienne en Afghanistan.

La dernière semaine aura donc été marquée par un large débat sur la légitimité de cette occupation. En visite à Québec, le secrétaire général de l'OTAN est venu exhorter le gouvernement canadien à s'engager dès maintenant au-delà de l'année 2009, date à laquelle la mission canadienne doit officiellement prendre fin. On sait que le premier ministre Stephen Harper a déjà témoigné de son "ouverture" face à cette hypothèse qui convient parfaitement au rôle de partenaire junior de l'impérialisme US que la bourgeoisie canadienne essaie de jouer sur la scène internationale. Quelques jours auparavant, les médias capitalistes avaient bénéficié du coulage d'un document des Forces canadiennes qui évoque la possibilité que "l'ennemi taliban", connaissant la tradition anti-militariste québécoise, profite du déploiement du Royal 22e pour attaquer délibérément des soldats québécois, ce qui ne manquerait pas de provoquer des remous importants dans l'opinion publique.

La veille du défilé, un sondage publié dans les journaux du groupe Québecor révélait que plus de 70% de la population québécoise s'oppose en effet au déploiement du Royal 22e et à la poursuite de l'occupation militaire en Afghanistan -- cela, en dépit de l'intense campagne de propagande menée par l'armée et le gouvernement Harper et du ralliement de la quasi totalité de la "classe politique" québécoise et canadienne, qui n'a cessé de marteler sur toutes les tribunes qu'il faut "appuyer nos troupes".

Qu'il s'agisse de Stephen Harper lui-même, de sa "lieutenante québécoise" Josée Verner, du leader libéral Stéphane Dion ou de son porte-parole en matière de Défense (l'ineffable Denis Coderre), du chef du NPD Jack Layton, du premier ministre du Québec Jean Charest et même du chef du Bloc québécois Gilles Duceppe, tout ce beau monde s'est entendu pour répéter le même mantra, à savoir "qu'indépendamment de notre point de vue respectif sur la mission canadienne en Afghanistan [sic], on doit se ranger inconditionnellement derrière les soldats canadiens".

Maintenant que le gouvernement canadien semble avoir perdu la bataille à propos du caractère prétendument "humanitaire" de cette mission (la plupart des gens ont bien compris que la distribution d'une douzaine de cahiers scolaires à une poignée de fillettes afghanes par Stephen Harper il y a trois semaines n'avait pour but que d'épater la galerie), les partisans de l'occupation militaire en Afghanistan en sont maintenant réduits à jouer la carte de la "solidarité avec nos frères et sœurs soldats", qui iront risquer leur vie contre "l'ennemi taliban". Pour quoi et pour qui, au juste? L'histoire le dit de moins en moins, tellement le jupon dépasse.

Les grandes gueules réactionnaires qui dominent les médias à Québec ont passé la semaine à mobiliser la population contre ceux et celles qui allaient oser se désolidariser des soldats de Valcartier en manifestant contre le défilé militaire. Le morning man du 93,3 FM (un dénommé Bouchard) a même appelé ses auditeurs à former un "bouclier humain" pour empêcher les manifestantes et manifestants de "perturber la fête de nos soldats et de leurs familles". Heureusement, pour une fois, personne ne semble l'avoir écouté, puisqu'on n'a pas vu l'ombre de la queue d'un tel "bouclier" - hormis la présence de quelques néo-nazis qui ont vite été neutralisés.

Il n'est jamais venu à l'esprit de ces grands pourfendeurs de "pacifistes et gauchistes" de se demander comment il se fait que dans cette guerre contre "l'ennemi taliban", les victimes s'avèrent de plus en plus systématiquement de simples civils, comme on a pu le voir depuis une dizaine de jours avec la mort d'au moins 90 civils sous les assauts des troupes de l'OTAN (une situation que le pantin Karzaï -- le "président afghan" choisi par George W. Bush -- s'est vu contraint de dénoncer, au risque de déplaire à ses maîtres).

En appelant à "défier le défilé militaire", la coalition Guerre à la guerre: Valcartier 2007 a posé un geste à la fois courageux et nécessaire. Elle a forcé un peu tout le monde à choisir son camp et à afficher ses couleurs. Ce faisant, elle a contribué à redynamiser un mouvement anti-guerre qui en avait bien besoin.

À l'heure prévue, i.e. à 18h30, les manifestantes et manifestants se sont donc rassembléEs sur les Plaines d'Abraham, devant le Musée du Québec.

Plusieurs organisations avaient apporté leurs bannières. On pouvait voir celles du groupe Bloquez l'empire qui avait nolisé deux autocars à partir de Montréal, des coalitions québécoises à l'initiative de la manifestation, de la Fédération des communistes libertaires du Nord-Est (la NEFAC) et bien entendu, du Parti communiste révolutionnaire -- le PCR, qui a soutenu la manifestation et fait campagne pour la populariser dès le lendemain du 1er mai. Quelques membres du parti de Françoise David, Québec solidaire, étaient également présentEs, tout comme des militantEs impliquéEs dans la solidarité avec l'Amérique latine et la Palestine, ainsi qu'un manifestant solitaire portant le drapeau du parti révisionniste -- le "Parti communiste du Québec", qui avait pourtant officiellement donné son appui à la manifestation!

L'atmosphère qui régnait était à la fois sérieuse et fébrile. Les pancartes affichaient des mots d'ordre clairement anti-impérialistes et les slogans, criés avec force (au lieu d'être simplement relayés par la sonorisation), étaient à l'avenant. De toute évidence, les participantes et participants étaient bien conscientEs de l'importance historique et des enjeux entourant cette manifestation. La foule était à la fois bigarrée et solidaire: il y a d'ailleurs longtemps qu'on avait vu des militants de la NEFAC fraterniser avec les maoïstes... C'est dire à quel point nous partagions le sentiment de devoir être à la hauteur de l'enjeu pour lequel nous avions décidé de prendre la rue et de confronter l'armée canadienne -- celui de mettre fin à la guerre et l'occupation impérialistes.

Vers 19h30, après une première prise de parole, les manifestantes et manifestants ont pris la rue et se sont dirigés vers le quartier Saint-Jean-Baptiste -- un quartier populaire où l'opposition à la guerre impérialiste semble très forte si l'on en juge par l'accueil enthousiaste que la manifestation y a reçu.

Peu après 20h30, et comme les organisateurs et organisatrices l'avaient prévu, la manifestation s'est divisée en deux. Tandis qu'environ le quart des quelque 1 000 manifestantes et manifestants se sont disperséEs au Carré d'Youville, les autres se sont dirigéEs vers le quadrilatère où devaient défiler les membres du Royal 22e. La police de Québec a alors formé un premier barrage pour les empêcher de s'approcher mais les manifestantEs, plus rapides et déterminéEs, ont réussi à le contourner et à rattraper le défilé militaire!

En moins de temps qu'il n'en faut pour crier "À vos ordres!", des centaines de manifestantEs se sont faufiléEs entre la foule clairsemée venue assister au défilé et le contingent militaire. Marchant d'un pas plus rapide que les soldats, les manifestantEs les ont vite doublés pour prendre la tête du défilé! C'est alors qu'on a pu assister à cette scène inusitée où pendant de longues minutes, les militaires furent contraints de suivre un fort groupe de militantes et de militants, dont plusieurs arboraient le drapeau rouge et scandaient des slogans anti-guerre!

Contrairement à ce qu'ont rapporté plusieurs médias, les manifestantEs sont donc bien loin de s'être "défilés"! Au contraire, ils et elles ont su faire preuve d'audace pour atteindre leurs objectifs et empêcher l'armée et le gouvernement Harper de monopoliser le débat public. En l'absence de la "casse" qu'ils appréhendaient (souhaitaient?), il faut croire que plusieurs des nombreux journalistes étaient déjà partis quand la manifestation a rejoint le défilé militaire.

L'esprit militant, anti-impérialiste et solidaire qui régnait vendredi soir à Québec constitue un bon point de départ en vue de développer un mouvement populaire plus large contre l'occupation impérialiste canadienne et états-unienne.

D'autres échéances importantes auront lieu au cours des prochaines semaines: qu'on pense au sommet de Montebello du 20 au 22 août, qui réunira Stephen Harper, George W. Bush et le président mexicain Felipe Calderon; ou encore, au Forum social québécois qui le suivra tout de suite après. Concernant cet événement, ce serait tout simplement indécent qu'on s'y contente de pérorer à propos de ce que pourrait avoir l'air un "autre Québec possible" alors même que l'armée canadienne poursuit sa guerre injuste pour imposer un régime aux ordres en Afghanistan -- cela, en notre nom! Tout comme le sommet de Montebello, le Forum social québécois devra être l'occasion d'une forte mobilisation qui verra les forces opposées à la guerre et à l'occupation s'exprimer de façon militante.

Souhaitons qu'à ces occasions, "le vent d'Est" (ou plutôt "l'esprit révolutionnaire de Québec") saura l'emporter sur le vent d'Ouest...

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Article paru dans Arsenal-express, nº 144, le 24 juin 2007.
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