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Défusion et social démocratie ne sont pas incompatibles…

Alain Dubois, Jeudi, Juin 3, 2004 - 18:45

Alain Dubois

 
Ce texte se veut une contribution positive au débat en cours sur les fusions/défusions municipales. Je ne prétends aucunement que sa conclusion est l’unique réponse à donner. Mais vous conviendrez certainement que le contenu de ce texte d’opinion permet de porter le débat au-delà des arguments entendus jusqu’à maintenant ...

 
Lors d’un reportage radiophonique sur les fusions/défusions municipales, un citoyen interrogé déclarait : « Ces fusions-là, c’est du socialisme ! » Cette affirmation est à l’image du débat depuis le début, un débat où on tente d’identifier les fusionnistes comme des sociaux-démocrates soucieux d’équité fiscale (des socialistes & progressistes), et les défusionnistes comme des réactionnaires qui s’opposent à la « modernisation de l’État ». Cette explication simpliste des forces en présence pourrait être satisfaisante si elle ne masquait pas les véritables questions de fond sous-tendues par les fusions municipales.

LES ACCORDS SUR LES MARCHÉS PUBLICS – Accords de libre échange & néolibéralisme économique

N’en déplaise à notre citoyen, les fusions municipales ne sont pas « socialistes » mais on ne peut plus capitalistes. Ces fusions, bien qu’elles aient été réalisées sous un gouvernement péquiste, s’inscrivent tout à fait dans les plans de réingénérie néolibérale du gouvernement Charest.

Poursuivant de façon plus « musclée » le travail amorcé par le gouvernement du Parti Québécois, le gouvernement Charest légifère depuis l’automne, sous le bâillon si nécessaire, pour « ajuster » la société québécoise et la législation du Québec aux accords de libre-échange, principalement les Accords sur les marchés publics (AMP). Vous ne les connaissez pas ? Si on vous résume : ces accords stipulent que les organismes publics et les ministères qui auront sous-traité une seule fois des services, des produits ou des travaux de construction vont être dans l’obligation de continuer à sous-traiter sous peine d’être poursuivis pour perte éventuelle de profits. Les entreprises privées des provinces, états et pays signataires de ces accords pourront alors soumissionner pour obtenir le contrat.

Cependant, une condition doit être remplie pour que les organismes publics et les ministères soient assujettis à ces accords : le volume des dépenses sous-traitées doit atteindre certains seuils minimaux. On vous explique : une petite municipalité seule pourrait ne pas atteindre les seuils requis de dépenses en sous-traitance pour être assujettie aux AMP. Mais si vous regroupez plusieurs municipalités ensemble avec une ville centre plus importante (Montréal, Québec, Sherbrooke, etc.) dans une nouvelle ville avec un seul conseil municipal, il devient alors très facile pour cette nouvelle méga-municipalité d’avoir un niveau suffisant de dépenses en sous-traitance pour être assujettie aux accords. Vous suivez ? ...

En faisant office de frontières administratives et fiscales, les centaines de petites municipalités du Québec entravaient jusqu’à maintenant ce plan visant à ouvrir grande la porte de nos services publics à l’entreprise privée. La fusion de plusieurs de ces villes, les plus rentables, vient régler en bonne partie le problème.

Cette façon de faire, on la retrouve également en santé, où grâce à la loi 25, les nouveaux Centres de Santé et de Services Sociaux (CSSS) résultant de la fusion des CLSC, CHSLD et CH pourront atteindre les seuils de dépenses sous-traitées requis pour être eux aussi assujettis aux AMP.

Bien qu’il existe différents Accords sur les Marchés Publics, chacun avec leurs particularités (incluant ou excluant tel ou tel secteur ou service gouvernemental), le fait est qu’ils sont en perpétuelle négociation, et que d’ici quelques années, nous assisterons à leur élargissement à l’ensemble des provinces, états américains et pays signataires.

Ainsi, dans les prochaines années, nous risquons de voir non seulement des emplois syndiqués et correctement rémunérés dans les services publics provinciaux et municipaux passer à l’entreprise privée, mais aussi des services publics entiers. Les services d’aqueduc, par exemple, sont déjà dans la mire des entrepreneurs privés qui rêvent de faire de l’argent « comme de l’eau ». Au préalable, le gouvernement, sous de fallacieux prétextes environnementaux, aura installé des compteurs d’eau d’abord dans les entreprises, puis dans les résidences de nos concitoyenNEs, pour finalement en céder la gestion et la distribution à l’entreprise privée.

Politique-fiction, dites-vous ? ... Rappelez-vous qu’à l’automne dernier, face aux graves problèmes d’aqueduc que connaissait Montréal, la ministre en chef de la réingénérie, madame Jérôme-Forget, a abordé cette éventualité !

Et les syndicats ...

À l’exception de la Fédération des Infirmières et des Infirmiers du Québec (FIIQ), il est étonnant de constater qu’aucune des grandes centrales québécoises ne s’est attardée aux impacts des différents accords sur les marchés publics. Pourtant, ces traités expliquent en bonne partie les objectifs visés par la réingénérie du gouvernement Charest. De plus, leurs impacts seront lourds de conséquences sur une partie importante des syndiquéEs !
À court terme, le regroupement des accréditations syndicales municipales a donné de plus gros syndicats municipaux, ayant plus de moyens de défense et de promotion de leurs membres. De même, la négociation des nouvelles conventions collectives a uniformisé à la hausse les conditions salariales et de travail des membres. Ces éléments, bien qu’intéressants, risquent pourtant de fondre comme neige au soleil quand la sous-traitance, facilitée par la loi 31, s’appliquera dans le cadre des Accords sur les Marchés Publics. Ce sera alors les emplois mêmes qui seront menacés.

Et les PME ...

En appuyant les fusions municipales et l’ensemble de la réingénérie Charest, les petites et moyennes entreprises ont la vue un peu courte. Elles devraient, elles aussi, s’attarder aux impacts de ces accords de libre-échange sur leur propre avenir.

Parce que quand vous ouvrez un marché public, vous vous empêchez de faire du développement local et régional : vous devez ouvrir aux soumissions de partout, par conséquent vous perdez les effets multiplicateurs de l’achat « local » et les répercussions des investissements régionaux. Le maire de Saguenay l’a appris à ses dépens récemment quand il a voulu renouveler sa flotte d’autos de police. Les seuils de dépenses atteints, il s’est vu obligé de se soumettre à des appels d’offres tels que stipulés dans les accords, des appels d’offres dépassant amplement sa région. « Quand j’achète des affaires de même, moi, j’achète local, je fais du développement régional ! », aurait-il déclaré en refusant de se plier aux accords. Mais tout ce qu’il a pu faire pour l’instant, c’est d’annuler sa commande !

Les entreprises d’une même région devront très prochainement entrer en compétition non seulement entre elles mais avec les entreprises d’autres régions et même d’autres pays signataires des AMP, et éventuellement avec celles des pays membres de la Zone de Libre Échange des Amériques ... Dans ce futur pas trop lointain, les grandes compagnies et conglomérats canadiens et surtout américains pourront compétitionner les petites et moyennes entreprises québécoises ... À la manière des entreprises qui font affaire avec Walmart, les PME québécoises ne tarderont pas à devenir de simples sous-traitants, si elles n’en meurent pas tout simplement.

Gens soucieux du bien commun de toutes les villes et villages : unissez-vous !

Indépendamment des autres enjeux qui s’y greffent, la lutte pour les défusions municipales revêt une importance particulière parce qu’elle devient une excellente occasion de s’opposer aux politiques néolibérales, à celles de Charest bien sûr, mais aussi à celles défendues par le PQ et l’ADQ. Les villes défusionnées seront autant d’obstacles à la privatisation de nos services publics et à la réingénérie néolibérale de l’actuel et des précédents gouvernements.

Les défusions réalisées, nous devrons batailler ferme pour que nos villes et villages retrouvent les pouvoirs qu’ils auront perdus. Mais ça, on en reparlera après. Pour l’instant : citoyennes et citoyens, au vote !

- Alain Dubois, résident de Saint-Bruno de Montarville
(progressiste, social démocrate, syndicaliste)

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