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Irak. La honte de l’armée américaine

Anonyme, Samedi, Mai 8, 2004 - 21:24

Pierre Barbancey

Ils prétendaient apporter la liberté, ils avaient la torture dans leurs valises. Les révélations de ces derniers jours éclaboussent le véritable " guerre business " qui gravite autour du Pentagone et confirment l’impasse de l’occupation.

La campagne d’Irak de George W. Bush et de Tony Blair vient d’entrer dans l’histoire. Par la petite porte. Loin des déclarations triomphantes de la " démocratie en marche ", de la " liberté retrouvée de tout un peuple ", de l’élimination (pour l’instant politique) d’un dictateur, la soldatesque se comporte selon le modèle inébranlable des armées d’occupation, des troupes coloniales. Si les pertes civiles occasionnées par la guerre semblent passer par pertes et profits - mais les douleurs des familles couplées aux blessures physiques irréparables pour des centaines de milliers d’entre eux sont bel et bien là - les méthodes employées depuis plus d’un an horrifient chaque jour un peu plus l’opinion publique internationale. Il y a quelques semaines, le siège de la ville de Falouja, à quelques kilomètres de Bagdad, s’est soldé par des dizaines, voire des centaines de morts : artillerie lourde, raids aériens. rien n’a été laissé au hasard par des marines qui, quoi qu’ils fassent ne viennent pas à bout d’une résistance irakienne disparate mais qui tend à s’unifier chaque jour un peu plus. Cette guerre, menée contre le droit international, est sanglante.

Alors, faut-il vraiment s’étonner d’apprendre que dans les centres de détention, les prisons, souvent rouvertes après la chute de Saddam Hussein, on pratique les " tortures modernes " ? Certes, il ne s’agit plus directement de la fameuse gégène, des ongles arrachés et autres supplices que beaucoup d’armées du monde (celle des États-Unis mais aussi de la France) ont pratiqué. Ce qui se passe à Abou Gharib s’apparente plus à ce qui se passe dans les prisons israéliennes ou dans les camps de détention spécialement créés pour les Palestiniens et souvent dénoncés par des organisations comme Betselem : on tente de détruire toute résistance psychologique. Par des tabassages soigneusement étudiés, des humiliations physiques ou sexuelles, on " prépare " les détenus aux interrogatoires du renseignement militaire et, au passage, on se fabrique des souvenirs en réalisant quelques clichés qu’on pourra montrer lors des longues soirées d’hiver dans le fin fond du Texas.

On sait maintenant que le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) avait, dès l’automne dernier, dénoncé les conditions de détention à Abou Gharib (lire ci-après). Mais, avant que ne soient rendues public ces exactions, le sort des prisonniers a été le même. La porte-parole du CICR a expliqué à l’Humanité qu’après chaque visite de ses équipes, une entrevue avait lieu avec le responsable de la prison pour lui communiquer les remarques et les éventuelles modifications à apporter pour se conformer aux conventions de Genève. Soit. Mais dans un numéro du New Yorker, paru en avril, le journaliste Seymour M. Hersh parle de Janis Karpinski, générale de brigade de réserve, nommée commandant de la 800e brigade de police militaire et en charge des prisons militaires en Irak ; on apprend ainsi que depuis l’âge de cinq ans elle ne rêvait que de ça : être militaire. Actuellement, seule femme à un poste de commandement dans ce pays, elle a servi dans les forces spéciales pendant la guerre du Golfe, en 1991. Elle dirigeait - jusqu’à sa suspension il y a quelques semaines - trois grandes prisons, 8 bataillons et 3 400 réservistes. Hersh écrit : " Dans une interview au mois de décembre dernier, elle ne cachait pas son enthousiasme et affirmait que pour beaucoup de prisonniers à Abou Gharib, "les conditions de vie maintenant sont meilleures en prison que chez eux. D’ailleurs, ce qui nous inquiète c’est qu’ils risquent de ne plus vouloir partir". Un mois plus tard, elle était suspendue. " Manier le cynisme à ce point relève du grand art. Visiblement, les " conseils " donnés par les équipes du CICR n’ont pas servi à grand-chose. Surtout, cela montre que, contrairement à ce qu’affirment la Maison-Blanche, le Pentagone et le département d’État américain, il ne s’agit pas de faits isolés mais de pratiques courantes couvertes par la hiérarchie militaire. D’ailleurs Gary Myers, avocat d’un des soldats mis en cause a expliqué à Hersh : " Vous pensez vraiment qu’un groupe de gosses venant de la rurale Virginie ont décidé d’eux-mêmes de faire une chose pareille ? Décidé que la meilleure façon de mettre des Arabes dans l’embarras et de les faire parler c’est de les faire déambuler tout nu ? " Selon le général Antonio Taguba, auteur d’un rapport sur le sujet, délivré en février mais qui stipulait que cela ne devait pas être porté à la connaissance du public, entre octobre et décembre 2003, Abou Gharib a été le théâtre " d’abus sadiques, flagrants et injustifiés ". Les prisonniers d’Irak peuvent être rassurés. Janis Karpinski est repartie outre-Atlantique. Elle est remplacée par un spécialiste du genre, le général Geoffrey Miller. " Si vous attaquez l’Amérique, alors vous aussi, vous pourriez finir à Guantanamo ", avait menacé Miller lorsqu’il avait pris le contrôle de la base américaine située à la pointe est de Cuba, où sont incarcérés les taliban présumés ou membres supposés d’al Qaeda, capturés notamment en Afghanistan, l’un des plus grands dénis du droit international. Il vient d’être appelé dare-dare en Irak pour y exercer ses talents.

Là, il retrouvera bien sûr les hommes de troupe mais également ces employés de firmes privées, qui font parler de plus en plus d’eux. Lors des tragiques événements de Falouja, où des Américains avaient été tués, dépecés, décapités et leurs corps suspendus à un pont, la question était venue sur le devant de la scène : qui sont ces hommes ? Ces agences présentées comme spécialisées dans la sécurité, sont en réalité la version moderne du mercenariat. Le 5 mai dernier, le Washington Post notait d’ailleurs que " l’utilisation de firmes (privées, NDLR) a augmenté de façon significative depuis le 11 septembre 2001 et la frontière entre le militaire et ces firmes de défense devient de plus en plus floue ". À l’instar de CACI International (lire ci-après), il y aurait, selon Deborah Avant, professeur à l’université George-Washington, au moins 35 de ces firmes basées aux États-Unis. " L’utilisation de ces compagnies militaires privées - principalement basées aux États-Unis, en Angleterre et en Afrique du Sud - ont proliféré dans l’après-guerre froide. " On les retrouve d’ailleurs dans de nombreux pays de l’est européen, comme en Hongrie pour restructurer l’armée en vue de l’adhésion à l’OTAN, en Croatie et en Bosnie en 1995 pour l’entraînement et l’équipement des troupes ou encore en Colombie pour un certain nombre de missions. Un véritable business s’est développé, alliant intervention armée et loi du marché capitaliste : toutes ces entreprises sont cotées en Bourse. Selon Deborah Arent, les projections de l’industrie privée dans ce domaine tablent sur une augmentation des revenus de 55,6 milliards de dollars en 1990 à 202 milliards en 2010. Ces mercenaires des temps modernes ne sont plus seulement des supplétifs. À Abou Gharib ils participent aux interrogatoires des prisonniers avec les méthodes que l’on sait. Après tout, comme on peut le constater sur le site Internet de l’une de ces sociétés (http://blackwatersecurity.com), le but est " soutenir la liberté et la démocratie partout ". Peu importent les moyens.

Tiré du Web de l'Humanité. "Depuis 1996, l'Humanité publie l'intégralité de son édition quotidienne sur ce site Web. Après bientôt sept années, le Web de l'Huma constitue l'une des principales base de données francophone et alternative (près de
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Sujet: 
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Auteur-e: 
ataraxic
Date: 
Dim, 2004-05-09 13:06

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Sujet: 
Vérification en cours
Auteur-e: 
cdubois
Date: 
Dim, 2004-05-09 18:13

J'ai envoyé un courriel aux éditeurs de l'humanité . On verra si c'est correct de repiquer de leur site et on sera fixé pour les prochaines fois. En attendant une réponse, comme l'explication envoyée par l'usager ayant posté cet article me convainc qu'on a probablement à faire à contenu redistribuable, je suis pour qu'on lemette en ligne.
Christian,
CMAQ-Québec


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