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<i>Consulta</i> sur la ZLÉA : encore quelques jours...

sonia, Viernes, Noviembre 7, 2003 - 12:10

Sonia Rochette

Dans moins d’un mois, les négociations de l’Accord sur la Zone de Libre-Échange des Amériques (ZLÉA) rentreront dans leur phase finale. Les ministres responsables du commerce se rencontreront les 21 et 22 novembre à Miami pour discuter du projet dans sa version révisée par les différents groupes de travail. Au même moment, le Réseau québécois sur l’intégration continentale (RQIC) présentera les résultats de la Consulta lancée il y a un an pour faire valoir le point de vue de la population québécoise sur les enjeux que pose la ZLÉA.

Une prise de parole citoyenne

Dans moins d’un mois, les négociations de l’Accord sur la Zone de Libre-Échange des Amériques (ZLÉA) rentreront dans leur phase finale. Les ministres responsables du commerce se rencontreront les 21 et 22 novembre à Miami pour discuter du projet dans sa version révisée par les différents groupes de travail. Au même moment, le Réseau québécois sur l’intégration continentale (RQIC) présentera les résultats de la Consulta lancée il y a un an pour faire valoir le point de vue de la population québécoise sur les enjeux que pose la ZLÉA.

« Il reste à peine deux ans avant 2005, la date butoir pour la conclusion d'un accord sur la ZLEA. Les Canadiens doivent donc commencer à réfléchir à ce que la ZLEA représentera pour eux.1 » À lire ces mots, extraits de la brochure sur la Zléa que le Ministre des Affaires Étrangères et du Commerce International a diffusé en ligne en octobre 2002, on pourrait croire que le gouvernement canadien a retenu la leçon du Sommet des Amériques. En avril 2001, la société civile avait en effet énergiquement manifesté sa déception de ne pas avoir été sollicitée alors que les gouvernements de 34 pays s’apprêtaient à dévoiler le premier avant-projet de l’accord sur la Zléa.

Malgré cette exhortation formelle, force est de constater que rien n’a été mis en œuvre efficacement par les instances gouvernementales pour expliciter les enjeux qui se nouent en ce moment autour de la globalisation dans les Amériques. Aucune mention de la Zléa, ni même de négociations commerciales continentales en cours ne se retrouvent en manchettes. À peine une mention de l’ALÉNA dont on prépare la célébration du dixième anniversaire… Où donc sont les versions révisées des chapitres de l’Accord, promises à publication huit semaines au plus tard avant la réunion ministérielle de Miami le mois prochain? Si elles existent, elles ne sont sûrement pas médiatisées.

Qu’à cela ne tienne, un large mouvement populaire s’est mobilisé à la grandeur du continent pour sensibiliser l’opinion publique aux impacts d’un accord économique continental certes particulièrement complexe, mais dont les enjeux sur les conditions de vie et de travail des populations des Amériques sont particulièrement préoccupants.

Le Québec emboîte le pas

Après le Brésil en septembre 2002, le Québec a initié une campagne d’information et de sensibilisation, orchestrée par le RQIC 2, « une opération de grande envergure de conscientisation , d’éducation populaire », selon Louis-Serge Houle, du Conseil Central du Montréal Métropolitain (CSN), impliqué dans la promotion de cette consultation populaire (Consulta en espagnol). Quelque 565 syndicats de Montréal et Laval, représentant 81500 travailleurs œuvrant dans tous les secteurs d’activités, ont été appelés à organiser un vote à bulletin secret dans les milieux de travail, après des sessions de formation puis des ateliers de sensibilisation. « Il s’agit d’un véritable travail de terrain, il faut y aller au cas par cas. On part de loin! » souligne Monsieur Houle, évoquant aussi « l’effet multiplicateur » attendu. « Au-delà du scrutin, la Consulta est un moyen de rejoindre nos membres sur les enjeux liés à l’intégration des marchés. »

Les différentes organisations membres du RQIC jugent comme une nécessité la dénonciation des menaces qui pèsent sur les droits démocratiques des peuples d’Amérique : de la prolifération des maquiladoras à l’insécurité alimentaire, de la militarisation à la commercialisation du corps des femmes, « la mondialisation et les accords de libre-échange […] qu’elle entraîne affectent les hommes et les femmes dans toutes les sociétés ». Et ces préoccupations sont partagées par de plus en plus de monde lorsqu’elles sont expliquées, notamment aux plus jeunes.

Jean-François Pomerleau, coordonateur de la Maison des Jeunes de Farnham, en Montérégie, a plusieurs fois réuni des adolescents autour d’animations liées aux enjeux de la mondialisation. Issus d’un milieu rural, ces jeunes ne restent pas insensibles au sort de ces paysans venus d’ailleurs, prêts à poser des gestes terribles pour attirer l’attention d’institutions comme la Banque Mondiale, le Fonds Monétaire International ou l’Organisation Mondiale du Commerce en l’occurrence, comme cela s’est vu à Cancún en septembre dernier. « Il s’est fait hara-kiri pour dénoncer des accords commerciaux sur l’agriculture? » de s’étonner les jeunes lorsqu’est évoqué le tragique suicide d’un paysan sud-coréen venu réclamer la considération du sort des siens. « Il faut multiplier les ateliers d’éducation populaire autour d’enjeux aussi cruciaux pour les générations qui arrivent. Les exemples de la domination des sociétés transnationales sur les pays du continent et ses répercussions inquiétantes sont déjà légion depuis dix ans qu’a été mis en place l’ALÉNA. » rappelle Monsieur Pomerleau, citant la triste mais lucrative poursuite judiciaire intentée par la multinationale Ethil Corporation contre le gouvernement canadien.

Ces menaces directes, à court ou moyen terme, débordent largement des préoccupations sur la protection et la conservation de l’environnement ou sur la promotion des droits des travailleurs. La prévalence du droit au commerce sur les droits individuels et collectifs, nationaux et internationaux, suscite aussi des réactions inquiètes dans les organismes communautaires de femmes. Dans les locaux du Centraide du quartier Centre-Sud à Montréal, des interventions sont menées pour que soit bien compris « l’impact potentiel et spécifique de la Zléa sur les femmes ». Chaque rencontre ou atelier est depuis quelques semaines introduit par une discussion sur le libre-échange et ses effets qui touchent différemment les deux sexes.

Julie Raby, intervenante sociale, y assure la promotion de la Consulta en s’attaquant aux mythes qui entourent les accords commerciaux continentaux. Sur un panneau de la salle communautaire, on peut lire « La Zléa, ça donne des jobs aux femmes », suivi d’une autre phrase dissimulée sous un carton : « Sauf que ça t’en prend trois pour vivre ! » Madame Raby n’ignore pas non plus que le défi est de taille, qu’ « il est difficile de faire comprendre à une femme qui vit ici sous le seuil de pauvreté que l’implantation d’une maquiladora au Mexique est à condamner. Certes, cela apporte du travail aux femmes, mais au prix de conditions de vie épouvantables. » Mais «la goutte d’eau versée dans l’océan est importante, et les exemples locaux, telle la zone franche de Mirabel, aide à faire passer le message ». Du 20 au 25 octobre, la FFQ mobilise ces femmes en organisant la semaine de la votation au niveau national 3 durant laquelle des boîtes de scrutin seront mises à disposition dans les groupes locaux ou lors d’événements publics, et il sera aussi possible de voter en ligne.

Un appel au gouvernement canadien

Ainsi, avec la Consulta, la société civile mobilisée et informée adresse un appel direct au gouvernement canadien de revenir sur les politiques néo-libérales dévastatrices de négociations et accords commerciaux plus écrasants que libérateurs. Les membres du RQIC souhaitent voir l’État renoncer aux diktats des entreprises et de la finance. Il est intéressant de rappeler qu’il y a un an déjà, au lendemain de la septième réunion ministérielle de Quito, le gouvernement, par la voix de son ministre du commerce, se disait prêt à entendre ce rappel à l’ordre. « Les contributions faites par un vaste éventail de représentants de la société civile ont grandement aidé notre travail cette semaine. Nous avons entendu plusieurs points de vue démontrant que les démocraties des Amériques sont fortes et vigoureuses, et qui serviront à nous rappeler constamment que la ZLEA doit avantager tous les citoyens de l'hémisphère 4».

En déclarant les résultats de la Consulta lors d’une conférence de presse à Ottawa quelques jours avant la rencontre de Miami (?), le RQIC espère bien se faire à nouveau et plus efficacement entendre. S’il veut respecter ses engagements auprès de la société civile, le gouvernement fédéral, avec l’ensemble des autres gouvernements de l’hémisphère, ne pourra pas ignorer le phénomène de la Consulta au Québec, pas plus que le résultat probant du référendum brésilien, les initiatives des assemblées sociales en Équateur ou au Mexique, ou encore les pétitions qui circulent dans le Canada anglais. La Consulta n’est qu’une fraction de l’action panaméricaine de résistance contre l’appauvrissement et la domination économique.

Il suffit de lire la seconde question posée : « Êtes-vous d’accord pour exiger du gouvernement fédéral qu’il ne signe pas d’ententes commerciales dans les Amériques? » Malgré les concessions alignées plus loin, le geste d’opposition politique est assumé : « La consultation populaire est une des démonstrations qu’une autre Amérique est possible» annonce le dépliant diffusé par le RQIC.

Les échos de Porto Alegre résonnent. Avec ses 98% de non au référendum populaire sur la Zléa organisé il y a un an lors d’une semblable campagne, le Brésil n’est sans doute pas le moindre des exemples à suivre…

L'auteure est stagiaire en Médias Alternatifs à Alternatives.
Une version abrégée de ce texte est parue dans le journal Alternatives.
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