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Quand manifester son désaccord devient "Mission Impossible"

Anonyme, Sunday, April 28, 2002 - 15:23

Bruno Dubuc

Récit subjectif relatant la perplexité d'un citoyen envers les méthodes utilisées par la police lors de la manifestation anti-G8 du 26 avril 2002 à Montréal.

Je rentre tard, fatigué. J'ai l'impression d'avoir vu un mauvais film. Je vous le raconte. Si j’abuse de cette tribune, vous me le dites…

Musique de vieilles séries policières des années ’70, style Mannix. Voix off intense mais tout en retenue, très intérieure…

17 :30 h. J’arrive au carré Dominion pour la manifestation annoncée contre les sinistres du G-8 qui sont en train de siroter leur scotch dans un hôtel pas loin. Ça s’annonce une belle manif malgré le temps frisquet. Beaucoup de banderoles, des flambeaux, des cartons qui explique ce qu’il faut entendre quand ces messieurs parlent de « flexibilité » du travail, etc.

17 :45 h. Je quitte temporairement le rassemblement (toujours aussi calme à écouter les discours au mégaphone) pour me rendre au carré Philips où je joins une « masse critique » de vélo qui doit rattraper la manif après avoir fait son trajet de sensibilisation habituel (les « masses critiques » sont une gang de cyclistes qui envahissent les rues du centre-ville tous les derniers vendredis du mois un peu pour faire chier les automobilistes mais surtout pour leur faire prendre conscience qu’ils sont ridicules tout seul dans leur châr pogné dans l’traffic…)

18 :05 h. On arrive carré Dominion. Il y a du monde dans la rue. Je me dis c’est cool, ils viennent juste de partir. Sauf qu’en s’approchant, ce qu’on découvre c’est au moins 200 personnes encerclées par des flics qui sont dans la rue juste à côté du parc. Je vais aux nouvelles. Flash-back.

17 :55 h. Les manifestants s’apprêtent à partir (le départ de la manif avait été annoncé à 18 h.) Soudain, des flics surgissent des quatre coins du parc et, sans qu’aucun avis de dispersement (audible) n’ait été entendu, ils encerclent les manifestants. En fait, pas seulement les manifestants, mais aussi les observateurs des droits et libertés (dûment identifiés par un dossard) et tout ce qui passait par là (guides touristiques, passants). Ellipse.

22 : 05 h. Le bulletin de désinformation de Radio-Cadenas (même en grève, ils continuent de faire de la bonne job…) y va de son commentaire laconique habituel, avec emphase sur les 2 boules de billards (un 4 et un beau 8 noir, paraît-il) et les cailloux trouvés dans les poches des « jeunes marginaux manifestants professionnels », dixit André « je suis petit, j’ai des grosses babines, mais maudit que je rassure les vieilles matantes » Durocher.

Donc les bons gagnent une fois de plus. Ouf. Fin du navet policier hollywoodien.

Je crois qu’on vient de franchir un pas important dans ce qu’on appellera peut-être dans quelques années la perte des droits de toute manifestation allant à l’encontre de l’agenda des Maîtres. Avant, on tolérait. Nos honorables imbus d’eux-mêmes devaient se la jouer très relaxe dans leur 5 à 7 de luxe : « C’est vrai, vous dans le sud, la dictature c’est « Ferme ta gueule »… Nous ici on est un peu plus raffiné : on appelle ça « démocratie » et c’est « Cause toujours »… Ha, ha, est vieille, mais est encore bonne ! Tin mon Ti-Paul, goûte à ces ti-biscuits avec des tites boules noires dessus… »

Mais depuis une couple d’années, on rit un peu jaune. C’est qu’à la longue ça devient fatiguant tout ce monde dans la rue. Même pu moyen de réquisitionner une ville au complet pour se faire un p’tit Sommet tranquille. Les montagnes de l’Ouest, c’est ben beau, mais bon, c’est pas le même trip…

Fait qu’on les gaze, on les tire (version européenne, plus hard) ou on les coffre (version très à la mode à Montréal). Plus de 1 500 arrestations politiques depuis 1999 au Québec seulement. Ça commence à ressembler de plus en plus à « Ferme ta gueule », non ?…

J’ose croire que les têtes pensantes qui dirigent ces robots (qu’on appelle aussi des bœufs, des cochons, des chiens, des poulets mais rarement des êtres humains, on se demande bien pourquoi), j’ose croire, donc, que ces guignols du pouvoir viennent de faire une gaffe monumentale. Parce qu’arrêter indistinctement des centaines de citoyens dans un parc parce qu’ils s’apprêtent à dire tout haut ce que toute personne bien informée pense tout bas, c’est de l’ordre de la dictature. On s’en doutait, mais il nous manquait l’exemple type, le précédent, la preuve noir sur blanc. Maintenant on l’a. Qu’est-ce qu’on fait avec ?

Fin ouverte qui laisse espérer des jours meilleurs (c’est mieux pour le box office…).



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